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Jean 4.10
Vigouroux


Jésus et la femme samaritaine

1 Jésus, ayant su que les pharisiens avaient appris qu’il faisait plus de disciples et baptisait plus que Jean
[4.1 Voir Jean, 3, 22.]
2 (quoique Jésus ne baptisât pas lui-même ; c’étaient ses disciples qui baptisaient)
3 quitta la Judée, et s’en alla de nouveau en Galilée.
4 Or il fallait qu’il passât par la Samarie.
5 Il vint donc dans une ville de Samarie, nommée Sichar, près du champ (de l’héritage) que Jacob avait donné à son fils Joseph.
[4.5-6 Sichar, près de l’héritage que Jacob donna à son fils. Là était le puits de Jacob. Sichar est d’après les uns, Sichem, aujourd’hui Naplouse, à trois kilomètres du puits de Jacob ; d’après d’autres qui jugent la distance de Sichem bien grande, Sichar était un village situé entre le puits et Naplouse, peut-être l’Askar actuel. — « Le champ donné par Jacob à Joseph est au nord de la Fontaine de Jacob, à environ mille mètres. On y voit le tombeau de Joseph dont les restes furent rapportés par les Hébreux de l’Egypte. La Fontaine de Jacob est presque à l’angle du chemin de Naplouse, se bifurquant pour aller à Jérusalem au midi, et au levant vers le Jourdain. Un monument chrétien fut élevé sur l’emplacement de la Fontaine de Jacob. Il n’en reste que quelques colonnes de granit. [Il reste d’une église qui succéda à la première basilique] un chevet carré avec voûte à arêtes, sous lequel est le puits lui-même. L’orifice de la fontaine est aujourd’hui fermé par une énorme pierre. En Orient les fontaines non coulantes, comme celles-ci, étaient autrefois accessibles par un immense escalier droit au moyen duquel on atteignait l’eau. Â» (MICHON.)] [4.5 Voir Genèse, 33, 19 ; 48, 22 ; Josué, 24, 32.]
6 Or là était le puits de Jacob. Et Jésus, fatigué du chemin, était assis sur le puits. Il était environ la sixième heure.
[4.6 La sixième heure ; c’est-à-dire environ midi.]
7 Une femme de la Samarie vint pour puiser de l’eau. Jésus lui dit : Donne-moi à boire.
8 Car ses disciples étaient allés à la ville, pour acheter des vivres.
9 Cette femme samaritaine lui dit : Comment vous, qui êtes Juif, me demandez-vous à boire, à moi qui suis une femme samaritaine ? Les Juifs, en effet, n’ont pas de rapports avec les Samaritains.
[4.9 Les Juifs n’ont pas de commerce avec les Samaritains. Voir Matthieu, 10, 5.]
10 Jésus lui répondit : Si tu connaissais le don de Dieu, et quel est celui qui te dit : Donne-moi à boire, peut-être lui aurais-tu fait toi-même cette demande, et il t’aurait donné de l’eau vive.
11 La femme lui dit : Seigneur, vous n’avez rien pour puiser, et le puits est profond ; d’où avez-vous donc de l’eau vive ?
12 Etes-vous plus grand que notre père Jacob, qui nous a donné ce puits, et qui en a bu lui-même, ainsi que ses fils et ses troupeaux ?
13 Jésus lui répondit : Quiconque boit de cette eau aura encore soif ; mais celui qui boira de l’eau que je lui donnerai n’aura jamais soif ;
14 car l’eau que je lui donnerai deviendra en lui une source d’eau qui jaillira jusque dans la vie éternelle.
15 La femme lui dit : Seigneur, donnez-moi de cette eau, afin que je n’aie plus soif, et que je ne vienne plus ici pour puiser.
16 Jésus lui dit : Va, appelle ton mari, et viens ici.
17 La femme répondit : Je n’ai pas de mari. Jésus lui dit : Tu as eu raison de dire : Je n’ai pas de mari ;
18 car tu as eu cinq maris, et maintenant celui que tu as n’est pas ton mari ; en cela, tu as dit vrai.
19 La femme lui dit : Seigneur, je vois bien que vous êtes un prophète.
[4.19 Touchée au vif, à cause de sa vie peu recommandable, la Samaritaine cherche à faire dévier la conversation, elle fait intervenir une question religieuse. « Jésus ne répond pas à la question de la femme, mais il s’élève plus haut. Â» (saint Augustin).]
20 Nos pères ont adoré sur cette montagne, et vous, vous dites que Jérusalem est le lieu où il faut adorer.
[4.20 Voir Deutéronome, 12, 5. — Sur cette montagne, le mont Garizim, où les Samaritains avaient élevé un temple schismatique, près de Sichem, avec l’autorisation du roi perse Darius Nothus. Jean Hyrcan détruisit ce temple, mais du temps de Notre Seigneur, les Samaritains avaient encore un autel sur cette montagne.]
21 Jésus lui dit : Femme, crois-moi, l’heure vient où ce ne sera ni sur cette montagne, ni à Jérusalem, que vous adorerez le Père.
22 Vous adorez ce que vous ne connaissez pas ; nous, nous adorons ce que nous connaissons, car le salut vient des Juifs.
[4.22 Voir 4 Rois, 17, 41.]
23 Mais l’heure vient, et elle est déjà venue, où les vrais adorateurs adoreront le Père en esprit et en vérité ; car ce sont de tels adorateurs que cherche le Père.
24 Dieu est esprit, et il faut que ceux qui l’adorent l’adorent en esprit et en vérité.
[4.24 Voir 1 Corinthiens, 3, 17.]
25 La femme lui dit : Je sais que le Messie (c’est-à-dire le Christ) doit venir ; lors donc qu’il sera venu, il nous annoncera toutes choses.
[4.25 Les Samaritains lisaient et vénéraient les livres de Moïse et attendaient le Messie.]
26 Jésus lui dit : Je le suis, moi qui te parle.
27 Au même instant ses disciples arrivèrent, et ils s’étonnaient de ce qu’il parlait avec une femme. Cependant aucun ne lui dit : Que demandez-vous ? ou : Pourquoi parlez-vous avec elle ?
[4.27 Les rabbins estimaient indigne d’un homme de parler avec une femme.]
28 La femme laissa donc là sa cruche, et s’en alla dans la ville. Et elle dit aux gens :
29 Venez, et voyez un homme qui m’a dit tout ce que j’ai fait. Ne serait-il pas le Christ ?
30 Ils sortirent donc de la ville, et vinrent auprès de lui.
31 Cependant les disciples le priaient, en disant : Maître, mangez.
32 Mais il leur dit : J’ai à manger une nourriture que vous ne connaissez pas.
33 Les disciples se disaient donc l’un à l’autre : Quelqu’un lui a-t-il apporté à manger ?
34 Jésus leur dit : Ma nourriture est de faire la volonté de celui qui m’a envoyé, pour accomplir son œuvre.
35 Ne dites-vous pas : Encore quatre mois, et la moisson viendra ? Voici que je vous dis : Levez vos yeux, et voyez les campagnes qui blanchissent déjà pour la moisson.
[4.35 Voir Matthieu, 9, 37 ; Luc, 10, 2. — Il y a encore quatre mois et la moisson viendra. Comme la moisson commence en Palestine vers le milieu d’avril, il résulte de ces paroles que les faits racontés dans ce chapitre se passèrent vers le milieu du mois de décembre.]
36 Et celui qui moissonne reçoit une récompense, et amasse du fruit pour la vie éternelle, afin que celui qui sème se réjouisse, aussi bien que celui qui moissonne.
[4.36 Les prophètes et les justes répandirent la semence et les apôtres moissonneront (saint Chrysostome).]
37 Car ici se vérifie cette parole : Autre est celui qui sème, et autre celui qui moissonne.
38 Je vous ai envoyés moissonner là où vous n’avez pas travaillé ; d’autres ont travaillé, et vous, vous êtes entrés dans leurs travaux.
39 Or beaucoup de Samaritains de cette ville crurent en lui, sur la parole de la femme qui lui rendait ce témoignage : Il m’a dit tout ce que j’ai fait.
40 Les Samaritains, étant donc venus auprès de lui, le prièrent de demeurer chez eux ; et il y demeura deux jours.
41 Et il y en eut un bien plus grand nombre qui crurent en lui, à cause de sa parole.
42 Et ils disaient à la femme : Ce n’est plus à cause de ce que tu nous as dit que nous croyons ; car nous l’avons entendu nous-mêmes, et nous savons qu’il est vraiment le Sauveur du monde.

Guérison du fils d’un officier

43 Deux jours après, il partit de là et s’en alla en Galilée.
44 Car Jésus lui-même a rendu ce témoignage, qu’un prophète n’est pas honoré dans sa patrie.
[4.44 Voir Matthieu, 13, 57 ; Marc, 6, 4 ; Luc, 4, 24.]
45 Lors donc qu’il vint en Galilée, les Galiléens l’accueillirent, parce qu’ils avaient vu tout ce qu’il avait fait à Jérusalem au jour de la fête ; car eux aussi ils étaient allés à la fête.
[4.45 Voir Matthieu, 4, 12 ; Marc, 1, 14 ; Luc, 4, 14. — Pendant la fête ; c’est-à-dire pendant la fête de Pâque, qui était la grande solennité des Juifs.]
46 Jésus vint donc de nouveau à Cana en Galilée, où il avait changé l’eau en vin. Et il y avait un officier du roi, dont le fils était malade à Capharnaüm.
[4.46 Voir Jean, 2, 9. — Cana de Galilée. Voir Jean, 2, 1. — Capharnaüm, voir Matthieu, 4, 13.]
47 Ayant appris que Jésus venait de Judée en Galilée, il alla auprès de lui, et le pria de descendre, et de guérir son fils, qui était près de mourir.
48 Jésus lui dit : Si vous ne voyez des signes et des prodiges, vous ne croyez pas.
49 L’officier lui dit : Seigneur, descendez avant que mon fils meure.
50 Jésus lui dit : Va, ton fils vit. Cet homme crut à la parole que Jésus lui avait dite, et il s’en alla.
51 Comme déjà il descendait, ses serviteurs vinrent au-devant de lui, et lui annoncèrent que son fils vivait.
52 Il leur demanda l’heure à laquelle il s’était trouvé mieux ; et ils lui dirent : Hier, à la septième heure, la fièvre l’a quitté.
[4.52 La septième heure ; vers une heure après midi.]
53 Le père reconnut que c’était à cette heure-là que Jésus lui avait dit : Ton fils vit ; et il crut, lui et toute sa maison.
54 Ce fut là le second miracle que fit Jésus, après être revenu de Judée en Galilée.

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