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Matthieu 21.25
Vigouroux


Entrée triomphale de Jésus à Jérusalem

1 Lorsqu’ils approchèrent de Jérusalem, et qu’ils furent arrivés à Bethphagé, près de la montagne des Oliviers, Jésus envoya deux de Ses disciples,
[21.1 Voir Marc, 11, 1 ; Luc, 19, 29. — Bethphagé était un village non loin de Béthanie, et, comme le dit le texte, près du mont des Oliviers. — Le mont des Oliviers lui-même est situé à l’est de Jérusalem dont il est séparé par le torrent de Cédron et la vallée de Josaphat. « Pour s’y rendre, on passe par la porte Saint-Etienne et la vallée de Josaphat ; on traverse le torrent de sur un pont d’une seule arche. Le torrent de Cédron traverse la vallée de Josaphat ; il est à vingt pas de Gethsémani. Non loin de Gethsémani est l’endroit où, malgré l’incertitude des traditions à cet égard, les chrétiens d’Orient soutiennent qu’eurent lieu les merveilles de l’Assomption de la très sainte Mère de Dieu. De cet endroit, on commence à monter le mont des Olives qui est fort roide. Rien n’égale la surprise que l’on éprouve, lorsque, arrivé à la moitié de sa hauteur, en se retournant, on aperçoit devant soi Jérusalem [et l’on jouit du magnifique spectacle qu’elle présente. Du haut de la montagne, en s’avançant vers le levant, on voit] la mer Morte, la plaine de Jéricho, le Jourdain et au-delà les montagnes de l’Arabie Pétrée. Â» (DE GERAMB.)]
2 en leur disant : Allez au village qui est devant vous, et aussitôt vous trouverez une ânesse liée, et son ânon avec elle ; déliez-la (les) et amenez-la (les) Moi
3 et si quelqu’un vous dit quelque chose, dites que le Seigneur en a besoin, et aussitôt il les laissera emmener.
4 Or tout cela s’est fait, afin que s’accomplît ce qui avait été dit par le prophète :
5 Dites à la fille de Sion : voici que ton Roi vient à toi plein de douceur, monté sur une ânesse et sur l’ânon de celle qui porte le joug.
[21.5 Voir Isaïe, 62, 11 ; Zacharie, 9, 9 ; Jean, 12, 15. — Cette citation paraît être empruntée d’Isaïe et de Zacharie, mais surtout de ce dernier. Nous devons faire observer que l’évangéliste donne le sens du texte, sans en rapporter les propres termes.]
6 Les disciples allèrent et firent ce que Jésus leur avait ordonné.
7 Ils amenèrent l’ânesse et l’ânon, mirent sur eux leurs vêtements et Le firent asseoir dessus.
8 Or, une foule nombreuse étendit leurs vêtements sur le chemin ; d’autres coupaient des branches d’arbres, et en jonchaient le chemin.
9 Et les foules qui précédaient Jésus, et celles qui Le suivaient, criaient : Hosanna au fils de David ! Béni soit celui qui vient au nom du Seigneur ! Hosanna au plus haut des cieux !
[21.9 Voir Psaumes, 117, 26 ; Marc, 11, 10 ; Luc, 19, 38. — Hosanna est un mot formé de l’hébreu signifiant : Sauvez, je vous prie, et renfermant, comme le latin vivat, non seulement le souhait d’une longue vie, mais d’une vie accompagnée de prospérité et de gloire.]
10 Et lorsqu’Il fut entré dans Jérusalem, toute la ville fut émue, et disait : Quel est Celui-ci ?
[21.10 Lorsqu’il fut entré dans Jérusalem. Une tradition très vraisemblable fait entrer Notre-Seigneur dans la ville par la porte Dorée, située à l’est du temple et aujourd’hui murée.]
11 Et le peuple disait : C’est Jésus, le prophète de Nazareth en Galilée.

Jésus dans le temple

12 Jésus entra dans le temple de Dieu, et Il chassa tous ceux qui vendaient et achetaient dans le temple, et Il renversa les tables des changeurs et les sièges de ceux qui vendaient des colombes.
[21.12 Voir Marc, 11, 15 ; Luc, 19, 45 ; Jean, 2, 14. — Dans le temple, en grec, hiéron. Le texte original distingue toujours soigneusement le hiéron et le naos. Le hiéron était l’ensemble des bâtiments et des cours qui étaient consacrés à Dieu ; le naos était le sanctuaire proprement dit. Comme nos églises consistent exclusivement dans l’édifice qui est la maison de Dieu, nos langues n’ont point de termes propres pour désigner ces deux choses autrefois si distinctes. Le naos ou maison de Dieu proprement dite se composait d’un portique, puis du Saint où étaient l’autel des parfums, le chandelier à sept branches et les pains de proposition, et enfin du Saint des Saints où avait été d’abord l’arche et où le grand prêtre seul pouvait pénétrer une fois par an. Les sacrifices ne s’offraient point dans le naos, mais au dehors. Devant le naos était une cour ou terrasse, appelée le parvis des Prêtres ; c’est là qu’était l’autel des holocaustes sur lequel on offrait les victimes immolées au Seigneur. Les prêtres et les Lévites seuls pouvaient y pénétrer. Autour de cette terrasse en était une autre, plus basse de quinze marches, qui portait le nom de parvis des Israélites. A l’est, une cour élevée de cinq marches était réservée aux femmes. Une barrière séparait la cour des Juifs d’une troisième cour qui portait le nom de parvis des Gentils, parce que les Gentils eux-mêmes pouvaient y pénétrer, tandis qu’il leur était défendu sous peine de mort de pénétrer dans la cour d’Israël. Le parvis des Gentils était plus étendu à l’est et surtout au sud qu’au nord et qu’à l’ouest, parce que le naos n’était pas au milieu de la plateforme du mont Moriah, mais au nord-ouest. Le parvis des Gentils était fermé au levant par le portique de Salomon et au midi par le portique royal qui était beaucoup plus large que celui de Salomon. L’un et l’autre étaient magnifiques ; ils étaient formés de colonnes monolithes de marbre blanc de douze à treize mètres de haut. C’est sous ces portiques que se sont passées une partie des scènes racontées par les Evangiles, et en particulier celle des vendeurs du temple. — Les tables de changeurs. « Ces usages se sont perpétués à Jérusalem, où, dans les rues voisines du bazar, les changeurs sont assis devant de petites tables chargées de diverses espèces de monnaie. Â» (J.-H. MICHON.)]
13 Et Il leur dit : Il est écrit : Ma maison sera appelée une maison de prière ; mais vous, vous en avez fait une caverne de voleurs.
[21.13 Voir Isaïe, 56, 7 ; Jérémie, 7, 11 ; Luc, 19, 46.]
14 Alors des aveugles et des boiteux s’approchèrent de Lui dans le temple, et Il les guérit.
15 Mais les princes des prêtres et les scribes, voyant les merveilles qu’Il avait faites, et les enfants qui criaient dans le temple, et qui disaient : Hosanna au Fils de David ! s’indignèrent
16 et ils Lui dirent : Entendez-vous ce qu’ils disent ? Jésus leur dit : Oui. N’avez-vous jamais lu cette parole : De la bouche des enfants, et de ceux qui sont à la mamelle, Vous avez tiré une louange parfaite ?
[21.16 Voir Psaumes, 8, 3.]
17 Et les ayant laissés, Il S’en alla hors de la ville, à Béthanie, où Il demeura.
[21.17 Béthanie, aujourd’hui el-Azariyéh ou Lazariéh, si célèbre par les récits de l’Evangile, est maintenant un pauvre petit village d’une vingtaine de familles. Elevé sur la pente orientale du mont des Oliviers, il est proche de l’endroit où la route de Jérusalem à Jéricho commence à descendre avec rapidité vers la vallée du Jourdain. On y montre le site traditionnel de la maison et du tombeau de Lazare, ainsi que la maison de Simon le lépreux.]
18 Le matin, en revenant à la ville, Il eut faim.
19 Et voyant un figuier près du chemin, Il S’en approcha ; mais Il n’y trouva que des feuilles. Et Il lui dit : Qu’à jamais il ne naisse de toi aucun fruit. Et aussitôt le figuier se déssécha.
[21.19 Et à l’instant le figuier sécha. « En arrivant de Béthanie à Jérusalem le matin, Jésus eut faim  ; ayant vu de loin un figuier, il s’en approcha pour voir s’il s’y trouverait du fruit ; mais n’y trouvant que des feuilles, parce que ce n’était pas le temps des fruits, il le maudit. — C’est une parabole de choses, semblable à celle des paroles qu’on trouve en saint Luc, 13, 6. Il ne faut donc point demander ce qu’avait fait ce figuier, ni ce qu’il avait mérité : car qui ne sait qu’un arbre ne mérite rien ? ni regarder cette malédiction du Sauveur par rapport au figuier, qui n’était que la matière de la parabole. Il faut voir ce qu’il représentait, c’est-à-dire la créature raisonnable qui doit toujours des fruits à son créateur en quelque temps qu’il lui en demande ; et lorsqu’il ne trouve que des feuilles, un dehors apparent, et rien de solide, il la maudit. Jésus-Christ continua son voyage et revint à Béthanie, selon sa coutume, et la matinée d’après, ses disciples s’arrêtèrent au figuier, qu’ils trouvèrent desséché depuis la racine ; et Pierre dit au Sauveur : Maître, le figuier que vous avez maudit est séché. Jésus-Christ ne voulait pas sortir de ce monde sans faire voir les effets sensibles de sa malédiction, voulant faire sentir ce qu’elle pouvait ; mais par un effet admirable de sa bonté, il frappe l’arbre et épargne l’homme. Ainsi quand il voulut faire sentir combien les démons étaient malfaisants, et jusqu’où allait leur puissance, lorsqu’il leur lâchait la main, il le fit paraître sur un troupeau de pourceaux que les démons précipitèrent dans la mer (voir Matthieu, 8, 32). Qu’il est bon et qu’il a de la peine à frapper l’homme ! Â» (BOSSUET.) — Il faut d’ailleurs remarquer que Notre-Seigneur pouvait s’étonner, en Palestine, de ne pas trouver de figues sur un figuier, quoique ce ne fut pas le temps ordinaire des figues (voir Marc, 11, 13), parce qu’en Palestine les figuiers ont des fruits à peu près toute l’année, voir Luc, note 13.6. Josèphe dit qu’on cueillait des figues sur les figuiers des bords du lac de Génésareth pendant dix mois de l’année. Souvent, surtout sur les vieux arbres, il y a des figues qui ne sont pas encore mûres quand les feuilles tombent et que la végétation s’arrête ; elles ne se détachent point des arbres, mais y restent suspendues pendant tout l’hiver et deviennent bonnes à manger quand la végétation recommence au printemps. Notre-Seigneur pouvait donc trouver des fruits sur l’arbre aux environs de Pâques. Les figuiers étaient nombreux autrefois sur le mont des Oliviers et il y en a encore quelques-uns aujourd’hui.]
20 Voyant cela, les disciples s’étonnèrent, et dirent : Comment s’est-il desséché en un instant ?
[21.20 Voir Marc, 11, 20.]
21 Jésus leur répondit : En vérité, Je vous le dis, si vous avez la foi et que vous n’hésitiez point, non seulement vous feriez ce que J’ai fait à ce figuier, mais quand même vous diriez à cette montagne : Ote-toi de là et jette-toi dans la mer, cela se ferait.
22 Et quoi que ce soit que vous demandiez avec foi dans la prière, vous le recevrez.
[21.22 Voir Matthieu, 7, 7 ; Marc, 11, 24 ; 1 Jean, 3, 22.]
23 Lorsqu’Il fut arrivé dans le temple, les princes des prêtres et les anciens du peuple s’approchèrent de Lui pendant qu’Il enseignait, et Lui dirent : Par quelle autorité faites-Vous ces choses ? et qui Vous a donné ce pouvoir ?
[21.23 Voir Marc, 11, 28 ; Luc, 20, 2. — Les princes des prêtres, les chefs des vingt-quatre familles sacerdotales. — Les anciens du peuple, les membres du sanhédrin.]
24 Jésus leur répondit : Je vous adresserai Moi aussi, une question ; si vous M’y répondez, Je vous dirai, Moi aussi, par quelle autorité Je fais ces choses.
25 Le baptême de Jean, d’où était-il ? du Ciel ou des hommes ? Mais ils raisonnaient entre eux, et disaient :
26 Si nous répondons : Du Ciel, Il nous dira : Pourquoi donc n’avez-vous pas cru en lui ? Et si nous répondons : Des hommes, nous avons à craindre la foule ; car tous regardaient Jean comme un prophète.
[21.26 Voir Matthieu, 14, 5.]
27 Ils répondirent donc à Jésus : Nous ne savons. Et Il leur répondit, lui aussi : Je ne vous dirai pas non plus par quelle autorité Je fais ces choses.

Parabole des deux fils

28 Que vous en semble ? Un homme avait deux fils ; et s’approchant du premier, il lui dit : Mon fils, va aujourd’hui travailler à ma vigne.
29 Celui-ci répondit : Je ne veux pas. Mais ensuite, touché de repentir, il y alla.
30 S’approchant ensuite de l’autre, il lui dit la même chose. Celui-ci répondit : J’y vais, Seigneur. Et il n’y alla point.
31 Lequel des deux a fait la volonté de son père ? Ils lui dirent : Le premier. Jésus leur dit : En vérité, Je vous le dis, les publicains et les prostituées vous devanceront dans le royaume de Dieu.
32 Car Jean est venu à vous dans la voie de la justice, et vous n’avez pas cru en lui. Mais les publicains et les prostituées ont cru en lui ; et vous, voyant cela, vous ne vous êtes pas repentis ensuite, pour croire en lui.

Parabole des vignerons

33 Ecoutez une autre parabole. Il y avait un père de famille, qui planta une vigne, l’entoura d’une haie, y creusa un pressoir, et y bâtit une tour ; puis il la loua à des vignerons, et partit pour un pays lointain.
[21.33 Voir Isaïe, 5, 1 ; Jérémie, 2, 21 ; Marc, 12, 1 ; Luc, 20, 9. — Y creusa un pressoir. Les pressoirs étaient des cuves souterraines où l’on conservait le vin sur ses lies jusqu’à ce qu’on le mît dans des cruches ou dans des outres. — On trouve encore aujourd’hui en Palestine, spécialement dans le sud, d’anciens pressoirs qui ont été creusés ou taillés dans le roc. — Et bâtit une tour. « L’habitude de construire des tours pour protéger, principalement à l’époque de la récolte, les enclos qu’elles dominent, remonte en Palestine à la plus haute antiquité. [Encore aujourd’hui], au centre de la plupart des jardins que délimitent de petits murs en pierres sèches, on remarque des tours de garde de forme ronde, et dont plusieurs sont peut-être très anciennes. Elles servent à protéger la récolte contre les déprédations des voleurs et les dévastations des bêtes fauves, principalement des chacals. Â» (V. GUERIN.) Judée, I, 125.]
34 Or, lorsque le temps des fruits approcha, il envoya ses serviteurs aux vignerons, pour recueillir les fruits de sa vigne.
35 Mais les vignerons, s’étant saisis de ses serviteurs, battirent l’un, tuèrent l’autre, et en lapidèrent un autre.
[21.35 Ils déchirèrent, etc. C’est le vrai sens du texte ; car le mot employé par la Vulgate signifie faire tomber, couper, trancher, tailler en pièces ; et celui du grec, écorcher, arracher, enlever la peau.]
36 Il leur envoya encore d’autres serviteurs, en plus grand nombre que les premiers, et ils les traitèrent de même.
37 Enfin il leur envoya son fils, en disant : Ils auront du respect pour mon fils.
38 Mais les vignerons, voyant le fils, dirent entre eux : Voici l’héritier ; venez, tuons-le, et nous aurons son héritage.
[21.38 Voir Matthieu, 26, 3 ; 27, 1 ; Jean, 11, 53.]
39 Et s’étant saisis de lui, ils le jetèrent hors de la vigne, et le tuèrent.
40 Lors donc que le maître de la vigne sera venu, que fera-t-il à ces vignerons ?
41 Ils lui dirent : Il fera périr misérablement ces misérables, et il louera sa vigne à d’autres vignerons, qui en rendront les fruits en leur temps.
42 Jésus leur dit : N’avez-vous jamais lu dans les Ecritures : La pierre qu’ont rejetée ceux qui bâtissaient, celle-là même est devenue la tête de l’angle ; c’est le Seigneur qui a fait cela, et c’est une chose admirable à nos yeux ?
[21.42 Voir Psaumes, 117, 22 ; Actes des Apôtres, 4, 11 ; Romains, 9, 33 ; 1 Pierre, 2, 7.]
43 C’est pourquoi, Je vous dis que le royaume de Dieu vous sera enlevé, et qu’il sera donné à une nation qui en produira les fruits.
44 Et celui qui tombera sur cette pierre, s’y brisera, et celui sur qui elle tombera, elle l’écrasera.
45 Lorsque les princes des prêtres et les pharisiens eurent entendu ces paraboles, ils comprirent que Jésus parlait d’eux.
46 Et, cherchant à se saisir de Lui, ils craignirent les foules, parce qu’elles Le regardaient comme un prophète.

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