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Juges 5.10
Vigouroux


Cantique de Débora

1 En ce jour-là Debbora et Barac, fils d’Abinoëm, chantèrent (ce cantique) :
2 Vous qui, parmi les enfants d’Israël, avez exposé spontanément votre vie au péril, bénissez le Seigneur.
3 Ecoutez, rois ; princes, prêtez l’oreille. C’est moi, c’est moi qui chanterai au (le) Seigneur, qui consacrerai un hymne au Seigneur, le Dieu d’Israël.
4 Seigneur, lorsque vous êtes sorti de Séir, et que vous passiez par le pays d’Edom, la terre a tremblé ; les cieux et les nuées se sont fondus en eau.
5 Les montagnes se sont écoulées comme l’eau devant la face du Seigneur, aussi bien que le Sinaï en la présence du Seigneur Dieu d’Israël.
6 Au temps de Samgar, fils d’Anath, au temps de Jahel, les routes étaient abandonnées, et ceux qui voyageaient marchaient par des sentiers détournés.
7 On a cessé de voir de vaillants hommes dans Israël. Il ne s’en trouvait plus, jusqu’à ce que Debbora se fût élevée, jusqu’à ce qu’il se fût élevé une mère en Israël.
8 Le Seigneur a choisi de nouveaux combats, et il renverse lui-même les portes des ennemis ; tandis qu’auparavant on ne voyait ni bouclier ni lance parmi quarante mille Israélites.
[5.8 Est-ce que ; littéralement si. Cette particule est souvent en hébreu interrogative, ou négative ; on pourrait donc traduire aussi : Ni lance ni bouclier ne paraissaient.]
9 Mon cœur aime les princes d’Israël. Vous qui vous êtes exposés volontairement au péril, bénissez le Seigneur.
10 Parlez, vous qui montez sur des ânes brillants ; vous qui êtes assis sur le siège de la justice, vous qui marchez sur les chemins.
[5.10 Dans la Palestine, les juges et les principaux du pays n’avaient que des ânes pour monture. Voir Juges, 10, 4 ; 12, 14.]

11 Qu’au lieu où les chars ont été brisés, l’armée des ennemis taillée en pièces, on publie la justice du Seigneur et sa clémence envers les braves d’Israël. Alors le peuple du Seigneur a paru aux portes des villes, et il s’est acquis la principauté.
12 Lève-toi, lève-toi, Debbora ; lève-toi, lève-toi, et chante un cantique. Lève-toi, Barac ; saisis tes captifs, fils d’Abinoëm.
13 Les restes du peuple ont été sauvés ; c’est le Seigneur qui a combattu par les héros (forts).
14 Il s’est servi (d’un héros sorti) d’Ephraïm pour exterminer les Chananéens dans Amalec et il s’est servi (d’un autre) aussi de Benjamin contre tes peuples, ô Amalec. Les princes de Machir sont descendus, et il en est venu de Zabulon pour mener l’armée au combat.
[5.14 Ce verset, qui est différent dans l’hébreu et aussi obscur que dans la Vulgate par sa concision, se traduit diversement ; nous avons choisi l’interprétation qui nous a paru la plus conforme au latin.]
15 Les chefs d’Issachar ont été avec Debbora ; ils ont suivi les traces de Barac, qui s’est jeté dans le péril comme s’il se fût précipité dans un abîme. Ruben alors était divisé contre lui-même, et les plus vaillants (magnanimes) de cette tribu n’ont fait autre chose que disputer.
16 Pourquoi donc demeure-tu entre deux limites à entendre les cris des troupeaux ? Ainsi, Ruben étant divisé contre lui-même, les plus vaillants (magnanimes) de cette tribu ne se sont occupés qu’à contester.
17 Pendant que Galaad était en repos au-delà du Jourdain, et que Dan s’occupait à ses vaisseaux, qu’Aser demeurait sur le rivage de la mer et se tenait dans ses ports
18 Zabulon et Nephtali se sont exposés à la mort au pays de Méromé.
19 Les (Des) rois sont venus et ont combattu, les rois de Chanaan ont combattu à Thanach, près des eaux de Mageddo, mais (butinant) ils n’ont pas emporté de butin.
20 On a combattu contre eux du haut du ciel ; les étoiles, demeurant dans leur rang et dans leur course ordinaire, ont combattu contre Sisara.
21 Le torrent de Cison a entraîné leurs cadavres, le torrent de Cadumim, le torrent de Cison. O mon âme, foule aux pieds les corps de ces braves (les forts).
[5.21 Le torrent de Cadumim ; c’est-à-dire le torrent des combats. Le torrent de Cison s’appelle aujourd’hui Nahr el-Mukatta, la rivière du Massacre.]
22 Leurs chevaux se sont rompu la corne du pied dans l’impétuosité de leur course (La corne des chevaux est tombée) ; les plus vaillants des ennemis ont fui à toute bride, se renversant les uns sur les autres.
[5.23 Méroz, probablement le Kephr Murs actuel.]
23 Malheur à (Maudissez) la terre de Méroz, dit l’ange du Seigneur ; malheur à (maudissez) ceux qui l’habitent, parce qu’ils ne sont point venus au secours du Seigneur, au secours des plus vaillants d’entre ses guerriers.
24 Bénie soit entre les femmes Jahel, femme d’Haber le Cinéen, et qu’elle soit bénie dans sa tente (son tabernacle).
[5.24-27 Voir ce que nous avons dit de l’action de Jahel, Juges, 4, 21.]
25 Il (Sisara) demandait de l’eau, elle lui donna du lait ; elle lui présenta de la crème (du beurre) dans la coupe des princes.
26 Elle prit le clou de la main gauche, et de la droite le marteau des ouvriers ; et choisissant l’endroit de la tête de Sisara où elle donnerait son coup, elle lui enfonça (fortement) le clou dans la tempe.
[5.26 Au clou. Voir Juges, 4, 21. ― A des marteaux ; dans l’hébreu, à un marteau d’ouvriers.]
27 Il tomba à ses pieds, il s’affaissa, et il mourut ; après s’être roulé à ses pieds, il demeura étendu sans vie, dans un état misérable (digne de pitié).
28 Cependant sa mère regardait par la fenêtre, et, parlant de sa chambre, elle criait (poussait des cris perçants) : Pourquoi son char ne revient-il pas encore ? Pourquoi ses chars (quadriges) tardent-ils tant ?
29 Et la plus sage d’entre (que) les (autres) femmes de Sisara répondit ainsi à sa belle-mère :
30 Peut-être que maintenant on partage le butin, et qu’on choisit pour lui la plus belle des captives ; on choisit parmi toutes les dépouilles des vêtements de diverses couleurs pour les donner à Sisara, et on lui destine quelque écharpe précieuse brodée à l’aiguille, qu’il puisse porter sur son cou comme un ornement.
31 (Qu’) Ainsi périssent, Seigneur, tous vos ennemis ; mais que ceux qui vous aiment brillent comme le soleil, lorsque ses rayons éclatent au matin. Or (Et) tout le pays demeura en paix pendant quarante ans. [5.31 Le cantique de Debbora est d’une belle et forte poésie ; c’est un des monuments littéraires les plus remarquables de l’antiquité, mais ce qui le caractérise surtout, c’est que la prophétesse le consacré à la louange du Dieu des combats qui a vaincu par Israël, et non à la glorification des vainqueurs : les chefs et les soldats ne paraissent qu’au second plan ; c’est Dieu qui tient la première place. Cet admirable cantique se compose de trois parties, chacune de trois strophes : I. Introduction, chapitre 5, versets 2 à 8 ; 1° Adresse du poème, versets 2 et 3 ; 2° Puissance de Jéhovah, gage de victoire pour les Hébreux fidèles, versets 4 et 5 ; 3° Malheurs d’Israël avant Debbora, versets 6 à 8. ― II. Préparatifs du combat, versets 9 à 17 ; 1° Nouvelle exhortation à tous ceux qui doivent chanter et bénir Jéhovah, versets 9 à 12 ; 2° Enumération des combattants, versets 12 à 15c ; 3° Reproches aux tribus qui n’ont pas secouru leurs frères, versets 15d à 17. ― III. Tableau du combat et de ses suites, versets 18 à 31 ; 1° Description de la bataille, versets 18 à 22 ; 2° Malédiction de Méroz, bénédiction de Jahel, versets 23 à 27 ; 3° Inquiétude et illusions de la mère et des femmes de Sisara ; souhait final, versets 28 à 31. ― Herder appelle ce poème « le plus beau chant héroïque des Hébreux… Chez Debbora, dit-il, tout est présent vivant, agissant. »]

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