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Luc 10.36
Vigouroux


Mission des soixante dix disciples

1 Après cela, le Seigneur désigna encore soixante-douze autres disciples, et il les envoya devant lui, deux à deux, dans toutes les villes et tous les lieux où il devait aller lui-même.
[10.1 « La liste des soixante-douze disciples ne nous a pas été transmise. Un petit nombre seulement sont connus avec certitude. On sait qu’ils furent choisis parmi ceux qui suivaient habituellement le Sauveur, et que le divin Maître les associa aux Apôtres pour les aider à instruire le peuple et le préparer à sa venue. Il est certain qu’ils étaient inférieurs aux douze, puisque Mathias, l’un d’entre eux, fut promu à l’apostolat à la place de Judas. Saint Ignace les assimile aux diacres et saint Jérôme aux prêtres. Leur ministère fut transitoire et purement personnel : ils ne transmirent à personne les pouvoirs qu’ils avaient reçus. — Au lieu de soixante-douze disciples, la plupart des manuscrits grecs portent soixante-dix ; mais on peut croire que c’est un nombre rond employé pour soixante-douze, comme lorsqu’il s’agit des interprètes de l’Ancien Testament, ou des personnes dont se composait la famille de Jacob à son entrée en Egypte. — On a fait cette remarque, que ce nombre répond à celui des peuples dont Moïse fait le dénombrement dans la Genèse, de même que le nombre douze répond à celui des tribus d’Israël ; car, d’après les Juifs, l’humanité se composait de soixante-dix (ou soixante-douze) peuples : quinze de Japhet, trente de Cham et vingt-sept de Sem. Cet accroissement du nombre des ouvriers apostoliques, de douze à soixante-douze, semblait annoncer l’extension prochaine de la prédication à l’univers entier. Â» (L. BACUEZ.)]
2 Et il leur disait : La moisson est grande, mais les ouvriers sont peu nombreux. Priez donc le maître de la moisson d’envoyer des ouvriers dans sa moisson.
[10.2 Voir Matthieu, 9, 37.]
3 Allez ; voici que je vous envoie comme des agneaux au milieu des loups.
[10.3 Voir Matthieu, 10, 16.]
4 Ne portez ni bourse, ni sac, ni chaussures, et ne saluez personne en chemin.
[10.4 Voir Marc, 6, 8 ; Matthieu, 10, 10 ; 4 Rois, 4, 29. — Ne saluez personne dans votre chemin, manière de parler des Hébreux pour dire qu’il faut que rien ne les arrête en chemin.]
5 Dans quelque maison que vous entriez, dites d’abord : Paix à cette maison.
6 Et s’il s’y trouve un enfant de paix, votre paix reposera sur lui ; sinon, elle reviendra à vous.
[10.6 Un fils de la paix ; hébraïsme, pour quelqu’un digne de la paix.]
7 Demeurez dans la même maison, mangeant et buvant de ce qu’il y aura chez eux ; car l’ouvrier est digne de son salaire. Ne passez pas de maison en maison.
[10.7 Voir Deutéronome, 24, 14 ; Matthieu, 10, 10 ; 1 Timothée, 5, 18.]
8 Dans quelque ville que vous entriez, et où l’on vous recevra, mangez ce qui vous sera présenté.
[10.8 Mangez ce qui vous sera présenté. Comparer à Matthieu, 15, 11.]
9 Guérissez les malades qui s’y trouvent, et dites-leur : Le royaume de Dieu s’est approché de vous.
10 Et dans quelque ville que vous entriez, et où l’on ne vous recevra pas, sortez sur les places publiques, et dites :
11 La poussière même de votre ville, qui s’est attachée à nous, nous la secouons contre vous ; sachez cependant ceci, que le royaume de Dieu est proche.
[10.11 Voir Actes des Apôtres, 13, 51.]
12 Je vous le dis, en ce jour-là, il y aura moins de rigueur pour Sodome que pour cette ville.
13 Malheur à toi, Corozaïn ! malheur à toi, Bethsaïde ! car si les miracles qui ont été faits au milieu de vous avaient été faits dans Tyr et dans Sidon, depuis longtemps elles auraient fait pénitence, revêtues d’un sac et assises dans la cendre.
[10.13 Voir Matthieu, 11, 21. — Corozaïn, Bethsaïde. Voir Matthieu, note 11.21. — Tyr et Sidon. Voir Marc, 3, 8.]
14 C’est pourquoi, au jugement, il y aura moins de rigueur pour Tyr et pour Sidon que pour vous.
15 Et toi, Capharnaüm, qui as été élevée jusqu’au ciel, tu seras plongée jusque (au fond de) dans l’enfer.
[10.15 Capharnaüm. Voir Matthieu, 4, 13.]
16 Celui qui vous écoute, m’écoute ; celui qui vous méprise, me méprise. Et celui qui me méprise, méprise celui qui m’a envoyé.
[10.16 Voir Matthieu, 10, 40 ; Jean, 13, 20.]
17 Or les soixante-douze revinrent avec joie, disant : Seigneur, les démons même nous sont soumis en votre nom.
18 Et il leur dit : Je voyais Satan tomber du ciel comme la foudre.
19 Voici que je vous ai donné le pouvoir de fouler aux pieds les serpents, et les scorpions, et toute la puissance de l’ennemi ; et rien ne pourra vous nuire.
20 Cependant, ne vous réjouissez pas de ce que les esprits vous sont soumis ; mais réjouissez-vous de ce que vos noms sont écrits dans les cieux.
21 En cette heure même, il tressaillit de joie dans l’Esprit-Saint, et dit : Je vous rends gloire, Père, Seigneur du ciel et de la terre, de ce que vous avez caché ces choses aux sages et aux prudents, et de ce que vous les avez révélées aux petits. Oui, Père, car il vous a plu ainsi.
[10.21 Voir Matthieu, 11, 25.]
22 Toutes choses m’ont été données par mon Père ; et nul ne sait qui est le Fils, si ce n’est le Père ; ni qui est le Père, si ce n’est le Fils, et celui à qui le Fils aura voulu le révéler.
23 Et se tournant vers ses disciples, il dit : Heureux les yeux qui voient ce que vous voyez.
[10.23 Voir Matthieu, 13, 16.]
24 Car je vous le dis, beaucoup de prophètes et de rois ont voulu voir ce que vous voyez, et ne l’ont pas vu ; et entendre ce que vous entendez, et ne l’ont pas entendu.

Parabole du bon Samaritain

25 Et voici qu’un docteur de la loi se leva pour le tenter, et lui dit : Maître, que dois-je faire pour posséder la vie éternelle ?
[10.25 Voir Matthieu, 22, 35 ; Marc, 12, 28.]
26 Et Jésus lui dit : Qu’y a-t-il d’écrit dans la loi ? qu’y lis-tu ?
27 Il répondit : Tu aimeras le Seigneur ton Dieu de tout ton cœur, et de toute ton âme, et de toutes tes forces, et de tout ton esprit ; et ton prochain comme toi-même.
[10.27 Voir Deutéronome, 6, 5.]
28 Jésus lui dit : Tu as bien répondu ; fais cela, et tu vivras.
29 Mais lui, voulant se justifier, dit à Jésus : Et qui est mon prochain ?
30 Alors Jésus, prenant la parole, dit : Un homme descendait de Jérusalem à Jéricho, et il tomba au milieu des voleurs, qui le dépouillèrent, et, après l’avoir couvert de blessures, s’en allèrent, le laissant à demi mort.
[10.30 Un homme descendait de Jérusalem à Jéricho. « Il descendait, car Jérusalem est beaucoup plus élevée que Jéricho. La distance entre ces deux villes était d’environ cent cinquante stades (en stades olympiques, de 27 à 28 kilomètres) ; la route traversait une contrée aride, un désert. La plaine de Jéricho, véritable oasis dans le désert, était d’une grande fertilité, renommée pour ses roses, son miel et les meilleurs produits de la Palestine. Le misérable village de Riha occupe aujourd’hui l’emplacement de l’ancienne Jéricho. — Pendant son voyage, il tomba entre les mains des voleurs qui, l’ayant dépouillée, etc. Josèphe raconte que la Palestine était alors infestée de brigands, et saint Jérôme nous apprend qu’une partie de la route de Jérusalem à Jéricho était appelée le chemin du sang, à cause du sang qui y avait été répandu ; il y avait là une garnison romaine, pour la protection des voyageurs. Aujourd’hui encore les Arabes du désert pillent fréquemment ceux qui parcourent cette contrée. Â» (TRENCH.)]
31 Or il arriva qu’un prêtre descendait par le même chemin ; et l’ayant vu, il passa outre.
32 Pareillement, un lévite, qui se trouvait en cet endroit, le vit et passa outre.
33 Mais un Samaritain, qui était en voyage, vint près de lui, et, le voyant, fut touché de compassion.
34 Et s’étant approché, il banda ses plaies, et y versa de l’huile et du vin ; puis, le plaçant sur sa monture, il le conduisit dans une hôtellerie et prit soin de lui.
[10.34 De l’huile et du vin. Les anciens se servaient de l’huile et du vin pour panser les blessures, du vin pour les laver et les purifier, de l’huile pour en calmer l’irritation. — En une hôtellerie, non en une hôtellerie proprement dite, mais dans le khan ou caravansérail. Voir Luc, 2, 7. La tradition place ce caravansérail à Khan-el-Akhmar.]
35 Le lendemain, il tira deux deniers, et les donna à l’hôtelier, et dit : Aie soin de lui ; et tout ce que tu dépenseras de plus, je te le rendrai à mon retour.
[10.35 Deux deniers. Voir Matthieu, 18, 28. — L’hôte, celui qui est chargé de la garde du caravansérail.]
36 Lequel de ces trois te semble avoir été le prochain de celui qui était tombé entre les mains des voleurs ?
37 Le docteur répondit : Celui qui a exercé la miséricorde envers lui. Et Jésus lui dit : Va, et fais de même.

Marthe et Marie

38 Or il arriva, tandis qu’ils étaient en chemin, qu’il entra dans un bourg ; et une femme, nommée Marthe, le reçut dans sa maison.
[10.38 Dans un village. « Dans la partie méridionale de la Galilée, non loin de Naïm. Â» (Mgr DARBOY.) A Béthanie, selon d’autres commentateurs. — Une femme nommée Marthe le reçut dans sa maison. « Marthe avait pour sœur Marie-Madeleine et pour frère Lazare ; ils appartenaient à une famille considérable. Il semble que Marthe fut l’aînée, car elle est toujours citée la première ; c’est aussi à cause de cette qualité sans doute qu’on la voit faire à Jésus-Christ les honneurs de la maison et déployer plus que personne les sollicitudes de l’hospitalité. Sa sœur Marie était d’une nature moins agissante. On pense que Lazare, Marthe et Marie-Madeleine quittèrent la Galilée avec leur maître et ami divin, et fixèrent leur séjour en Judée, non loin de Jérusalem. Il est certain, dans tous les cas, qu’ils habitaient le bourg de Béthanie, à quinze stades ou trois quarts de lieue de la ville sainte, durant les six mois qui précédèrent la mort du Sauveur Â» (Mgr DARBOY) Voir Matthieu, note 27.56.]
39 Et elle avait une soeur, nommée Marie, qui, assise aux pieds du Seigneur, écoutait sa parole ;
[10.39 Marie Madeleine. Voir Matthieu, 27, 56.]
40 mais Marthe s’empressait aux soins multiples du service. Elle s’arrêta, et dit : Seigneur, n’avez-vous aucun souci de ce que ma soeur me laisse servir seule ? Dites-lui donc de m’aider.
41 (Mais) Le Seigneur, répondant, lui dit : Marthe, Marthe, tu t’inquiètes et tu te troubles pour beaucoup de choses.
42 Or une seule chose est nécessaire. Marie a choisi la meilleure part, qui ne lui sera pas ôtée. [10.42 Marie a choisi la meilleure part. « Non pas que le Seigneur voulût blâmer Marthe, car elle eut aussi sa récompense, c’est-à-dire le don de la foi et de la charité, mais il voulait recommander la noble occupation de Marie, qui a tant d’influence sur les destinées de l’âme humaine. L’antiquité ecclésiastique a toujours vu dans ces deux femmes le double symbole de la vie active et répandue en bonnes œuvres et de la vie contemplative et consumée en ardentes prières. Â» (Mgr DARBOY.)]

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