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Job 3.4
Vigouroux


Dialogue entre Job et ses amis

Intervention n° 1 de Job

1 Après cela Job ouvrit la bouche, et maudit le jour de sa naissance,
[3.1-26 Les malédictions et les imprécations suivantes ne sont que des expressions emphatiques très usitées en Orient pour peindre une vive douleur. ― Ici commence la deuxième partie, contenant la discussion de Job et de ses trois amis, du chapitre 3 au chapitre 31. Première discussion, du chapitre 3 au chapitre 14. ― 1° Monologue de Job, chapitre 3. Il renferme trois idées principales : 1° Job maudit le jour de sa naissance, versets 3 à 10 ; ― 2° il regrette de n’être pas mort, versets 11 à 19 ; ― 3° il se demande pourquoi la vie a été adonnée au misérable, versets 20 à 26. ― Sa douleur longtemps comprimée éclate avec véhémence : il se plaint tout d’abord avec une amère éloquence de ce qu’il souffre et, après avoir épanché ses sentiments, il donne la raison de ses plaintes. Job n’est pas un stoïcien, un Titan ou un Prométhée révolté, comme on l’a prétendu, c’est un homme qui souffre : les aiguillons de la maladie lui font pousser des cris d’angoisse ; mais comme c’est aussi un juste, au fond de sa conscience il demeure ferme, comptant sur la justice de Dieu. Tel nous le verrons dans tout le cours du livre, sentant vivement la souffrance, mais fort de son innocence et animé d’une confiance inébranlable dans le jugement de Dieu.]
2 et il parla (ainsi) :
3 Périsse le jour où je suis né, et la nuit dans laquelle il a été dit : Un homme est (a été) conçu.
[3.3 Voir Jérémie, 20, 14.]
4 Ce jour, qu’il se change en ténèbres ; que Dieu ne le regarde pas du ciel ; qu’il ne soit pas éclairé de la lumière.
5 Que les (des) ténèbres et l’ombre de la mort l’obscurcissent, qu’une noire obscurité l’environne, et qu’il soit plongé dans l’amertume.
6 Cette nuit, qu’un tourbillon ténébreux s’en empare ; qu’elle ne soit pas comptée parmi les jours de l’année, ni mise au nombre des mois.
7 Que cette nuit soit désolée (solitaire) et indigne de louanges.
8 Que ceux qui maudissent le jour le maudissent, ceux qui sont prêts à susciter Léviathan.
[3.8 Ceux qui maudissent le jour ; les enchanteurs qui ont des formules de bénédiction et de malédiction pour les jours, qui prédisent des jours heureux ou malheureux, et exercent leur pouvoir sur les animaux les plus terribles. Comparer à Job, 40, 20 ; 41, 1. ― On entend généralement par Léviathan le crocodile.]
9 Que les étoiles soient obscurcies par sa noirceur ; qu’elle attende la lumière, et qu’elle ne la voie pas, non plus que l’aurore, lorsqu’elle commence à poindre
10 parce qu’elle n’a pas fermé le sein qui m’a porté, ni dérobé les souffrances à (maux de devant de) mes regards (yeux).
11 Pourquoi ne suis-je pas mort dans le sein de ma mère ? Pourquoi n’ai-je pas expiré aussitôt que j’en suis sorti ?
12 Pourquoi ai-je été reçu sur des genoux, allaité par des mamelles ?
[3.12 Ai-je été reçu sur des genoux ? Voir Genèse, 30, 3.]
13 Car je dormirais maintenant dans le silence, et je me reposerais dans mon sommeil,
[3.13 La mort est souvent appelée dans l’Ecriture un sommeil, pour nous rappeler le souvenir de la résurrection future.]
14 avec les rois et les consuls de la terre, qui se bâtissent des (de vastes) solitudes ;
[3.14 Les consuls ; les conseillers du roi, les grands. ― Bâtissent de vastes solitudes ; c’est-à-dire de superbes mausolées, où ils sont ensevelis seuls, ou bien ils bâtissent de magnifiques palais dans de vastes solitudes.]
15 (ou) avec les princes qui possèdent l’or, et qui remplissent d’argent leurs maisons.
16 Ou, comme un avorton caché (dans le sein de sa mère), je n’existerais plus ; ou comme ceux qui, ayant été conçus, n’ont pas vu la lumière.
17 Là les impies ont cessé leur tumulte ; là se reposent ceux qui sont épuisés, sans force.
18 Et ceux qui étaient autrefois enchaînés ensemble ne souffrent plus aucun mal, et ils n’entendent plus la voix du maître de corvées (d’un exacteur).
[3.18 Enchaînés ensemble. On enchaînait deux ensemble (par deux ?) les esclaves fugitifs et indociles. ― Job ne nie pas ici les jugements que Dieu doit exercer contre les méchants après leur mort ; mais il parle un langage humain et conforme à la manière ordinaire de regarder la mort, c’est-à-dire comme la fin de tous les maux de la vie.]
19 Là sont le grand et le petit, et l’esclave est affranchi de son maître.
20 Pourquoi la lumière a-t-elle été donnée au misérable, et la vie à ceux qui sont dans l’amertume du cœur ;
21 qui attendent la mort, et elle ne vient pas ; qui la cherchent comme s’ils creusaient pour trouver un trésor,
[3.21 Qui attendent la mort, et la recherchent avec autant d’ardeur que s’ils creusaient la terre pour trouver un trésor.]
22 et qui sont ravis de joie lorsqu’ils ont trouvé le tombeau (un sépulcre) ?
23 Pourquoi la vie a-t-elle été donnée (A un) à l’homme dont la voie est cachée, et que Dieu a environné de ténèbres ?
[3.23 A un homme ; c’est le complément de pourquoi la lumière ou la vie a-t-elle été donnée, du verset 20. ― Dont la voie est cachée. Le sentier dans lequel il doit marcher est tellement couvert, qu’il ne sait où poser le pied.]
24 Avant de manger je soupire, et mes cris (rugissements) sont comme des eaux qui débordent.
25 Car ce qui faisait le sujet de ma crainte m’est arrivé, et ce que je redoutais est tombé sur moi.
26 Ne me suis-je pas tenu dans la réserve ? N’ai-je pas gardé le silence, le repos ? Et la colère divine (l’indignation de Dieu) est tombée sur moi.

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