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Actes 18.5
Vigouroux


L’Évangile à Corinthe

1 Après cela Paul partit d’Athènes et vint à Corinthe.
[18.1 A Corinthe, ville capitale de l’Achaïe propre, dans l’isthme du Péloponnèse, entre la mer Ionienne et la mer Egée. Voir l’introduction aux Epîtres aux Corinthiens. Le voyage de saint Paul à Corinthe eut lieu l’an 53 de notre ère. Il y séjourna pendant une partir de l’an 54 jusque vers la fête de Pâques.]
2 Et ayant trouvé un Juif nommé Aquila, originaire du Pont, qui était venu récemment d’Italie avec Priscille sa femme (parce que Claude avait ordonné à tous les Juifs de sortir de Rome), il se joignit à eux.
[18.2 Aquila, d’origine juive, né en Asie Mineure, dans le Pont (voir Actes des Apôtres, 2, 9), avait vécu à Rome avec sa femme Priscille jusqu’en l’an 50 ou 51 où l’empereur Claude (voir Actes des Apôtres, 11, 28) bannit tous les juifs de sa capitale, à cause des troubles qu’ils y avaient excités et qui paraissaient avoir eu pour cause la division que la prédication du christianisme amena contre les Juifs qui refusèrent de se convertir et ceux qui se convertirent. Priscille paraît avoir été une femme remarquable et avoir joué avec Aquila un rôle assez important dans les temps apostoliques. Elle s’était retirée avec son mari à Corinthe et c’est là qu’ils rencontrèrent saint Paul. On ignore s’ils étaient déjà chrétiens ou si ce fut l’Apôtre qui leur fit embrasser la religion nouvelle. Ils accompagnèrent plus tard saint Paul à Ephèse et quand le décret de bannissement de Claude fut tombé en désuétude, ils retournèrent à Rome. La tradition nous apprend qu’ils moururent l’un et l’autre martyrs. — Priscille est le diminutif de Prisca ou Prisque et cette femme est nommée indifféremment sous l’une ou l’autre forme, conformément à un usage commun chez les Latins.]
3 Et comme il était du même métier, il demeurait chez eux et travaillait : leur métier consistait à faire des tentes.
[18.3 Leur métier était de faire des tentes. En Orient, pour faire des voyages un peu considérables, il fallait emporter avec soi des tentes afin de s’y abriter. Saint Paul et Aquila fabriquaient de ces petites tentes. Ce métier était très commun en Cilicie, patrie de saint Paul ; on y faisait des tentes en grand nombre avec du poil de chèvre et ce tissu avait pris le nom de cilicium, du pays d’où il venait, saint Paul avait dû apprendre ce métier pendant qu’il faisait ses études, selon la coutume juive d’enseigner à chacun les moyens de gagner sa vie en cas de besoin.]
4 Il discourait dans la synagogue chaque sabbat, et faisant intervenir le nom du Seigneur Jésus, il persuadait (s’efforçait de persuader) les Juifs et les Grecs.
5 Mais lorsque Silas et Timothée furent venus de Macédoine, Paul se donnait tout entier à la parole, attestant aux Juifs que Jésus était le Christ.
[18.5 Silas. Voir Actes des Apôtres, 15, 22. — Timothée. Voir Actes des Apôtres, 16, 1. — De Macédoine. Voir Actes des Apôtres, 16, 9.]

6 Comme ils le contredisaient et le blasphémaient, secouant ses vêtements, il leur dit : Que votre sang soit sur votre tête ; pour moi, j’en suis innocent, et désormais j’irai vers les gentils.
7 Et sortant de là, il entra chez un certain Tite Juste, qui honorait Dieu, et dont la maison était attenante à la synagogue.
[18.7 Tite Juste. Le nom de Tite ne se lit pas dans la plupart des manuscrits grecs. Ce Corinthien n’est point le Tite à qui saint Paul a écrit un des Epîtres pastorales.]
8 Crispus, chef de la synagogue, crut au Seigneur avec toute sa famille ; et beaucoup de Corinthiens, en entendant Paul, croyaient et étaient baptisés.
[18.8 Voir 1 Corinthiens, 1, 14. — Crispe, chef de la synagogue. Sur le chef de la synagogue, voir Marc, 5, 22. Crispe ou Crispus fut baptisé par saint Paul, voir 1 Corinthiens, 1, 14.]
9 Une nuit, le Seigneur dit à Paul dans une vision : Ne crains point, mais parle, et ne te tais pas ;
10 car je suis avec toi, et personne ne s’opposera à toi pour te nuire, parce que j’ai un peuple nombreux dans cette ville.
11 Il demeura là un an et six mois, enseignant chez eux la parole de Dieu.
12 Or Gallion étant proconsul d’Achaïe, les Juifs, d’un commun accord, s’élevèrent contre Paul et l’amenèrent au tribunal,
[18.12 Gallion. « Le proconsul au tribunal duquel on traîne l’Apôtre est Gallion († 65), frère de Sénèque le philosophe et oncle du poète Lucain. Non moins versé dans la littérature que dans l’administration, ce magistrat, d’origine obscure, avait pris le nom d’un Romain opulent, Junius Gallio, qui l’avait adopté ; et la faveur de son frère lui avait valu le proconsulat d’Achaïe. Sénèque lui dédia son traité De la Colère, en lui rendant ce témoignage, confirmé par Stace et non contredit par saint Luc, qu’il était le plus patient et le plus pacifique des hommes : Dulcis Gallio. Il eut besoin plus tard de sa patience et de sa philosophie pour supporter la disgrâce de son frère, et la sienne qui suivit de près. Saint Paul était à Corinthe depuis dix-huit mois, lorsqu’il comparut devant ce proconsul. (L. BACUEZ.) — Proconsul d’Achaïe. L’Achaïe, dans le sens restreint, désignait la partie maritime septentrionale du Péloponnèse. Dans son sens plus étendu, celui qu’il a ici et dans tout le Nouveau Testament, l’Achaïe est la province romaine qui depuis l’an 146 avant Jésus-Christ comprenait toute la Grèce, à l’exception de la Thessalie, qui faisait partie de la province de Macédoine.]
13 en disant : Celui-ci persuade aux hommes de rendre à Dieu un culte contraire à la loi.
14 Comme Paul commençait à ouvrir la bouche, Gallion dit aux Juifs : S’il s’agissait de quelque injustice ou de quelque acte criminel, ô Juifs, je vous écouterais comme il convient ;
15 mais s’il est question de mots, de noms et de votre loi, vous y aviserez vous-mêmes, car je ne veux pas être juge de ces choses.
16 Puis il les éconduisit (renvoya) du (de son) tribunal.
17 Alors tous, se saisissant de Sosthène, chef de la synagogue, le battaient devant le tribunal ; et Gallion ne s’en mit pas en peine.
[18.17 Sosthène avait peut-être remplacé Crispe comme chef de la synagogue de Corinthe après la conversion de ce dernier. Saint Paul, dans sa première Epître aux Corinthiens, 1, 1, nomme un Sosthène parmi ses collaborateurs. On ignore si c’est celui dont il est question ici. Ce nom était assez commun chez les Grecs.]
18 Paul, après être resté là des jours nombreux, prit congé des frères, et s’embarqua pour la Syrie avec Priscille et Aquila ; il s’était fait couper les cheveux à Cenchrée, car il avait fait un vœu.
[18.18 Voir Nombres, 6, 18 ; Actes des Apôtres, 21, 24. — Pour la Syrie. Voir Matthieu, 4, 24. — S’étant fait auparavant couper les cheveux…, car il avait fait un vœu, pour remercier sans doute le Seigneur du succès de sa mission apostolique. Josèphe dit que c’était de son temps une pieuse coutume parmi les Juifs de recourir à la protection divine en s’engageant à offrir un sacrifice dans le temple de Jérusalem et, trente jours auparavant, à se couper les cheveux et à s’abstenir de vin. — A Cenchrée, un des ports de Corinthe, du côté de l’Asie, sur le golfe Salonique.]
19 Il arriva à Ephèse, et il y laissa Priscille et Aquila. Pour lui, étant entré dans la synagogue, il discutait avec les Juifs.
[18.19 « Ephèse, ville libre de l’empire bâtie sur les bords du Caïstre, entre Milet et Smyrne, célèbre par son commerce, son temple de Diane et son zèle pour le culte de sa grande déesse, était la métropole de l’Asie proconsulaire. Au-dessous du proconsul, qui avait le gouvernement de la province, était un magistrat, nommé Scribe, ou intendant de la cité. Des dignitaires nommés Asiarques, veillaient aux fêtes religieuses et aux représentations scéniques. Les Ephésiens passionnés pour l’honneur de la déesse ne l’étaient pas moins pour le plaisir et la magie, et il était difficile de trouver ailleurs plus de fanatisme et de superstition. — Le premier séjour de saint Paul, en cette ville, au retour de sa seconde mission, fut de courte durée ; mais l’Apôtre revint bientôt et y séjourna deux ans et quelques mois (55-58), c’est-à-dire plus longtemps qu’en aucun endroit, excepté Rome. Malgré l’opposition des Juifs, qui s’y étaient établis en grand nombre, ses travaux produisirent des fruits abondants qui s’étendirent à toute la province d’Asie. Il écrivit de là sa première Epître aux Corinthiens. Obligé de s’éloigner de l’Eglise qu’il avait fondée, il lui donna pour évêque Timothée, son disciple ; ce qui n’empêcha pas saint Jean de s’établir aussi à Ephèse après la mort de la sainte Vierge et d’exercer longtemps sur toute la contrée le pouvoir exceptionnel que lui donnait sa qualité d’apôtre. — Le tableau si vif et si frappant que l’auteur des Actes trace de la sédition à laquelle saint Paul crut devoir céder aussi bien que de son séjour à Athènes, semble ne pouvoir venir que d’un témoin oculaire. Néanmoins il est remarquable qu’il y parle toujours à la troisième personne. Il ne recommence à se mêler au récit qu’après le passage de l’Apôtre en Grèce, à son retour par la Macédoine. Â» (L. BACUEZ.)]
20 Comme ils le priaient de rester plus longtemps, il ne consentit pas ;
21 mais il prit congé d’eux, en disant : Je reviendrai auprès de vous, si c’est la volonté de Dieu ; et il partit d’Ephèse.
22 Etant descendu à Césarée, il monta à Jérusalem, et salua l’Eglise ; puis il descendit à Antioche.
[18.22 Césarée. Voir Actes des Apôtres, 9, 30. — Il monta à Jérusalem. Ce voyage de saint Paul à Jérusalem était le quatrième qu’il faisait dans cette ville depuis sa conversion. — Il descendit de Jérusalem à Antioche de Syrie et là se termina le second voyage apostolique de saint Paul, qui avait duré trois ans, de 51 à 54.]

Troisième voyage missionnaire

L’Évangile à Éphèse

23 Après y être resté quelque temps, il repartit, et traversa successivement la Galatie et la Phrygie, fortifiant tous les disciples.
[18.23 Par ordre ; c’est-à-dire en suivant l’ordre des lieux. — Il partit. C’est le commencement de la troisième mission de saint Paul, entreprise avec Timothée et Eraste, en 54. — Galatie, province du centre de l’Asie Mineure. Elle tirait son nom des Gaulois qui, après avoir quitté leur patrie, s’étaient rendus en Thrace et de là au IIIe siècle avant notre ère en Asie Mineure. En 188 avant Jésus-Christ, ils furent soumis par les Romains, mais eurent néanmoins des rois propres jusqu’en 26 avant Jésus-Christ, où leur pays fut réduit en province romaine. — La Phrygie. Voir Actes des Apôtres, 2, 10.]
24 Or un Juif nommé Apollo, originaire d’Alexandrie, homme éloquent, vint à Ephèse ; il était habile dans les Ecritures.
[18.24 Apollo. Voir 1 Corinthiens, 1, 12.]
25 Il avait été instruit en ce qui regarde la voie du Seigneur ; et fervent d’esprit, il parlait et il enseignait avec soin ce qui concernait Jésus ; mais il ne connaissait que le baptême de Jean.
26 Il commença donc à agir avec assurance dans la synagogue. Lorsque Priscille et Aquila l’eurent entendu, ils le prirent chez eux, et lui exposèrent plus exactement la voie du Seigneur.
27 Comme il voulait ensuite aller en Achaïe, les frères qui l’y avaient exhorté écrivirent aux disciples de le recevoir. Lorsqu’il fut arrivé, il se rendit très utile aux croyants,
[18.27 Il servit beaucoup, etc., par la lumière et la grâce dont il était rempli.]
28 car il réfutait vigoureusement les Juifs en public, montrant par les Ecritures que Jésus était le Christ.

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