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Guerre contre Juda
1 Il arriva au temps d’Achaz, fils de Joathan, fils d’Ozias, roi de Juda, que Rasin, roi de Syrie, et Phacée, fils de Romélie, roi d’Israël, montèrent contre Jérusalem pour l’assiéger ; et ils ne purent s’en emparer. [7.1 Voir 4 Rois, 16, 5. ― IIe groupe : Prophéties du temps d’Achaz ou la prophétie d’Emmanuel, du chapitre 7 au chapitre 12. ― La seconde période du ministère prophétique d’Isaïe comprend les oracles prononcés sous le règne d’Achaz. Achaz régna 16 ans (742-727). Trois circonstances de son histoire doivent être principalement notées pour l’intelligence des prophéties d’Isaïe à cette époque. ― 1° Achaz, au lieu de maintenir le culte de Dieu, comme Ozias et Joathan, favorisa ouvertement l’idolâtrie. ― 2° Phacée d’Israël et Rasin de Damais continuèrent contre lui les hostilités qu’ils avaient commencées contre Joathan, voir 4 Rois, 15, 37. Les détails de la guerre contre Achaz sont donnés dans 4 Rois, 16, 5-9 et 2 Paralipomènes, 28, 5-21. Plusieurs pensent que la guerre fut courte, mais cette opinion est peu vraisemblable. Les confédérés ne purent exécuter qu’en plusieurs campagnes tout ce qui est racontés dans les Rois et les Paralipomènes. Dans une première campagne, résumée par Isaïe, 7, 1, ils assiégèrent sans succès Jérusalem, voir 4 Rois, 16, 5. C’est alors qu’Isaïe fit la prophétie du chapitre 7, versets 1 à 9. ― 3° Comme Phacée et Rasin continuèrent, probablement chacun de leur côté, à ravager le royaume de Juda, Rasin poussant jusqu’à la mer Rouge, voir 4 Rois, 16, 6, et emportant un grand butin, voir 2 Paralipomènes, 28, 5 ; Phacée ravageant aussi Juda, faisant périr cent vingt mille hommes, emmenant deux cent mille captifs, voir 2 Paralipomènes, 28, vv. 5-6, 8, Achaz manqua de confiance en Dieu ; et ne se sentant pas de force à lutter contre ces deux ennemis que soutenaient encore les Iduméens et les Philistins, voir 4 Rois, 16, 6 ; 2 Paralipomènes, 28, 17-18, il appela à son aide Téglathphalasar, roi d’Assyrie. Isaïe fit les prophéties du chapitre 7, verset 10 au chapitre 12, à la suite de cet appel à l’étranger. ― C’est au moment où le bruit de la marche des Israélites et des Syriens vient d’arriver dans la capitale, et la remplit de terreur, qu’Isaïe commence les prophéties contenues dans les chapitres 7 à 12. Elles forment ce qu’on a appelé le livre d’Emmanuel, parce qu’Emmanuel ou le Messie en est le sujet principal. Elles ont cela de commun, qu’elles ont toutes été faites à l’occasion de la guerre de Phacée et de Rasin contre Juda.
Les prophéties du temps d’Achaz sont au nombre de quatre : 1° chapitre 7, versets 1 à 9 ; 2° chapitre 7, versets 10 à 25 ; 3° chapitre 8, versets 1 à 4 ; 4° du chapitre 8, verset 5 au chapitre 12. Le commencement de chacune d’elle est indiqué par une formule qui en marque la division, voir Isaïe, 7, 1 ; 7, 10 ; 8, 1 et 8, 5. La première prépare la prophétie d’Emmanuel ; la seconde annonce sa naissance miraculeuse ; la troisième donne un signe prochain de la délivrance de Juda, et la quatrième montre dans le triomphe du peuple de Dieu le symbole d’un triomphe plus grand encore au temps de Messie. ― I° Prophéties contre Samarie et contre Damais, chapitre 7, versets 1 à 9. ― Au moment où Rasin et Phacée vont faire le siège de Jérusalem, Isaïe console Achaz et son peuple, en prédisant que les attaques de leurs ennemis seront vaines, et que, dans 65 ans, Ephraïm cessera d’être un peuple. C’était probablement la première année du règne d’Achaz (742). Ses ennemis durent profiter du changement de trône pour combattre Juda.] 2 Et l’on vint dire à la maison de David : La Syrie a fait sa jonction avec (trouvé un appui dans) Ephraïm. Et le cœur d’Achaz et le cœur de son peuple furent agités, comme les arbres des forêts sont agités par le vent. 3 Alors le Seigneur dit à Isaïe : Va au-devant d’Achaz, toi et Jasub, ton fils qui t’est resté, vers l’extrémité de l’aqueduc de la piscine supérieure, sur le chemin (la voie) du champ du foulon ; [7.3 Jasub ; signifie en hébreu un reste reviendra ; nom mystérieux, et que Dieu, autant qu’on peut en juger, avait fait donner à cet enfant, comme preuve que Juda serait délivré de l’oppression de ce règne, et que les restes du peuple se convertiraient sous le règne d’Ezéchias. Comparer à Isaïe, 10, 21-22. ― La piscine supérieure ; elle était au pied des murs de Jérusalem, à l’orient. ― La situation de la piscine supérieure est controversée, mais on la place aujourd’hui le plus communément à l’ouest de la ville, et on l’identifie avec le Birket-Mamilla.] 4 et dis-lui : Aie (Ayez) soin de demeurer en paix (vous tenir en repos) ; ne crains (craignez) pas, et que ton (votre) cœur ne se trouble (tremble) pas devant ces deux bouts de tisons fumants, devant la colère (et la fureur) de Rasin, roi de Syrie, et du fils de Romélie ; 5 de ce que la Syrie, Ephraïm et le fils de Romélie ont conspiré ensemble contre toi (vous), en disant : 6 Montons contre Juda, faisons-lui la guerre, et rendons-nous-en les maîtres (faisons-le venir à nous), et établissons-y pour roi le fils de Tabéel. [7.6 Le fils de Tabéel. On lit dans une inscription du roi d’Assyrie Téglathphalasar le nom d’un personnage qui s’appelle Itibil ou Tibil et qui peut être le Tabéel d’Isaïe ; mais l’inscription est malheureusement si mutilée que nous ne savons pas ce qu’était ce personnage.] 7 Voici ce que dit le Seigneur Dieu : Cela ne subsistera pas, et (cela) ne sera (même) pas ; 8 mais Damas sera (est) la tête (capitale) de la Syrie, et Rasin la tête (le chef) de Damas ; et dans soixante-cinq ans Ephraïm cessera d’être un peuple ; [7.8 Ce verset 8, dans lequel est annoncée la ruine complète d’Ephraïm, c’est-à-dire du royaume des dix tribus, au bout de 65 ans, offre plusieurs difficultés. ― 1° On soutient qu’il est une interpolation ou bien qu’il est une prophétie faite après coup, comme s’il était plus difficile à Dieu de révéler une date en particulier que l’avenir en général ! On affirme, il est vrai, mais à tort, que les prédictions de l’Ancien Testament ne sont jamais aussi précises. Cet exemple n’est pas isolé, nous en rencontrons beaucoup d’autres. ― 2° On a prétendu aussi que ce chiffre de 65 est faux. Il n’en est rien. Il serait inexact, s’il s’agissait de la prise de Samarie par Salmanasar et Sargon, laquelle eut lieu, en effet peu d’années après, mais Isaïe ne parle pas de l’époque où Ephraïm cessa d’être un royaume, il parle du temps où il cessa d’être un peuple, ce qui, d’après des calculs fort probables, eut lieu du temps d’Assaraddon, la 6e année du règne de ce roi d’Assyrie, la 20e de celui de Manassé de Juda. Le monarque ninivite fit transporter en divers pays les derniers restes d’Israël, comme nous pouvons le conclure de 1 Esdras, 4, 2. Or, de la 1re année d’Achaz, date de la prophétie d’Isaïe, à la 20e année de Manassé, il y a juste 65 ans : 16 années d’Achaz + 29 d’Ezéchias + 20 de Manassé = 65.] 9 et Samarie sera la tête (est la capitale) d’Ephraïm, et le fils de Romélie la tête (le chef) de Samarie. Si vous ne croyez pas, vous ne subsisterez (persévérerez) pas. [7.9 Samarie. Voir 3 Rois, note 16.24.]
Annonce de la naissance d’Emmanuel
10 Le Seigneur continua de parler à Achaz et lui dit : [7.10-25 IIe prédiction de la naissance d’Emmanuel, chapitre 7, versets 10 à 25. ― Cette seconde prophétie date probablement de la même année que la précédente (742), et ne lui est postérieure que de peu de temps. Elle est une des plus importantes de l’Ancien Testament, parce qu’elle annonce la naissance miraculeuse du fils de la Vierge, Emmanuel, c’est-à-dire « Dieu avec nous ». Elle se divise en quatre parties : 1° chapitre 7, versets 10 à 13. Isaïe fait connaître les circonstances de la prophétie. Au moment, semble-t-il, où Achaz songe à appeler Téglathphalasar à son secours, le prophète, pour lui prouver que Juda peut se reposer sur Dieu de sa défense, dit au roi qu’il peut demander comme gage de cette protection un signe ou un miracle. Le prince le refuse. ― 2° Isaïe n’en donne pas moins de signe : la naissance du fils de la Vierge, versets 14 à 17. Ce signe est accompagné de l’assurance qu’en deux ou trois ans Juda sera délivré de la Syrie et d’Israël, mais il sera puni lui-même d’avoir appelé l’Assyrien. ― 3° Un événement prochain, l’invasion de la Palestine par les armées égyptienne et ninivite, conformera la vérité de l’oracle divin, versets 18 à 20. ― 4° Tableau de la désolation produite par cette invasion, versets 21 à 25.] [7.10 Parla encore ; littéralement ajouta à parler. Voir sur cet hébraïsme, le 2° à la fin des Observations préliminaires des Psaumes.] 11 Demande pour toi un signe (miracle) au Seigneur ton Dieu, soit au fond de la terre (enfer), soit au plus haut du ciel. 12 Et Achaz répondit : Je ne demanderai rien, et je ne tenterai pas le Seigneur. 13 Et Isaïe (le prophète) dit : Ecoutez donc, maison de David. Ne vous suffit-il pas de lasser la patience des hommes, que vous lassiez encore celle de mon Dieu ? 14 C’est pourquoi le Seigneur lui-même vous donnera un signe : Une vierge concevra, et elle enfantera un fils, auquel on donnera le nom d’Emmanuel. [7.14 La vierge. C’est ainsi que portent l’hébreu et les Septante. En vain les rationalistes allemands se sont-ils efforcés de prouver que l’article ici n’avait aucun sens déterminatif ; tous les exemples qu’ils allèguent sont faussement appliqués. Leurs efforts ne sont pas moins vains quand ils veulent établir que le terme hébreu traduit par vierge (virgo) ne signifie qu’une fille nubile. L’argument qu’ils tirent de l’arabe, en l’appliquant encore faussement, ne prouve rien. Tout conspire donc ici en faveur du sens de la Vierge, l’étymologie, le contexte et la tradition. Saint Matthieu (voir Matthieu, 1, 22-23) nous fait remarquer l’accomplissement de cette prophétie, en expliquant le nom d’Emmanuel. Comparer à Isaïe, 8, 8. ― La mère d’Emmanuel est la Très Sainte Vierge, et Emmanuel est Jésus-Christ, d’après l’attestation formelle de saint Matthieu (voir Matthieu, 1, 22-23). Voir aussi Luc, 1, 31, qui contient une allusion évidente à Isaïe, 7, 14. Le texte grec de saint Luc reproduit à peu près littéralement, sauf les modifications nécessaires, le texte grec de la traduction de ce verset d’Isaïe dans les Septante. Cette explication authentique de la prophétie d’Isaïe est décisive, aussi a-t-elle été soutenue par tous les Pères et les docteurs. ― 2° Emmanuel n’est pas un fils d’Achaz, comme on l’a faussement soutenu. Plusieurs critiques ont imaginé que l’enfant annoncé par le prophète était Ezéchias. Mais Ezéchias avait déjà neuf ans, au moins, à l’époque de cette prophétie, par conséquent Isaïe ne pouvait prédire sa naissance, comme l’a observé saint Jérôme. ― Le fils de la Vierge est appelé Emmanuel, c’est-à-dire « Dieu avec nous », nom significatif, comme tous les noms hébreux, et qui nous fait connaître la nature du Messie : c’est Dieu lui-même, venant vivre au milieu de nous. Ce nom est d’ailleurs plutôt un nom symbolique qu’un nom propre, comme les noms qui lui sont donnés, voir Isaïe, 9, 6.] 15 Il mangera du beurre et du miel, en sorte qu’il sache rejeter le mal et choisir le bien. [7.15 Du beurre et du miel. C’est la nourriture des habitants du désert, et c’était aussi chez les anciens, la nourriture ordinaire des enfants. ― Dans la suite du verset en sorte que, ne peut signifier qu’il se nourrira de lait et de miel, afin de savoir choisir entre le mal et le bien, ce qui n’aurait aucun sens, mais jusqu’à ce que il ait atteint l’âge de discrétion, c’est-à-dire qu’il soit sorti de l’enfance. C’est ainsi que l’ont compris la paraphrase chaldaïque les Septante et généralement les commentateurs.] 16 Car avant que l’enfant sache rejeter le mal et choisir le bien, le pays que tu détestes à cause de leurs deux rois sera abandonné (de ses deux rois). [7.16 L’explication de ce verset offre des difficultés et on l’a très diversement interprété. Tout le monde convient que le verset 15 s’applique à Emmanuel : il se nourrira de la même nourriture que ceux de son âge. Mais comment Emmanuel peut-il désigner le Messie, puisque, d’après le verset 16, avant que celui qui est promis comme signe soit sorti de l’enfance, c’est-à-dire avant deux ou trois ans, les royaumes de Syrie et d’Israël, ennemis de Juda, auront été dépeuplés par Téglathphalasar, roi d’Assyrie ? ― L’explication la plus simple consiste à supposer qu’Isaïe veut indiquer simplement une date et que le sens est : Avant que se soit écoulé le temps qu’il faudrait à Emmanuel, s’il naissait de nos jours, pour sortir de l’enfance, Israël et la Syrie seront désolés. ― Il est à remarquer que, contrairement aux usages des prophètes, après que la naissance d’Emmanuel, qui doit servir de signe, a été annoncée, Isaïe ne nous dit nulle part qu’Emmanuel soit né réellement de son temps. Pourquoi, si ce n’est parce qu’il ne devait naître réellement que plus de 700 ans après ? ― On peut se demander, il est vrai, pourquoi Dieu choisit une marque si éloignée de sa protection, au milieu des dangers présents, mais, 1° nous voyons, par toutes les prophéties, qu’il console souvent son peuple par les espérances messianiques qu’il fait briller à leurs yeux ; 2° c’est parce que l’accomplissement de ce prodige ne doit avoir lieu que plus tard qu’il donne un signe prochain dans la naissance du fils d’Isaïe, laquelle fait le sujet de la troisième prophétie.]
Jugement d’Israël
17 Le Seigneur fera venir sur toi, sur ton peuple et sur la maison de ton père, par le roi des Assyriens, des jours tels qu’il n’y en a pas eu depuis le temps où Ephraïm s’est séparé de Juda. 18 En ce jour-là, le Seigneur appellera d’un coup de sifflet la mouche qui est à l’extrémité des fleuves de l’Egypte, et l’abeille qui est au pays d’Assur ; [7.18 La mouche. Sur les mouches d’Egypte, voir Psaumes, note 104.31. Les Egyptiens sont comparés aux mouches, parce qu’elles infectent la vallée du Nil, et les Assyriens aux abeilles, qui sont nombreuses dans leur pays.] 19 et elles viendront, et elles se (re)poseront dans les torrents des vallées, et dans les creux des rochers, sur tous les arbrisseaux, et dans tous les trous. 20 En ce jour-là le Seigneur rasera, avec un rasoir pris à louage, avec ceux qui sont au-delà du fleuve, avec le roi des Assyriens, la tête, le poil des pieds, et toute la barbe. [7.20 Au-delà du fleuve de l’Euphrate. ― Le rasoir est le roi des Assyriens, qui rasera, c’est-à-dire ravagera tout le royaume de Juda ; raser toute la barbe à un homme était un cruel outrage.] 21 En ce jour-là, chacun nourrira une vache et deux brebis, [7.21 Vache ; littéralement vache de bœufs (vaccam boum) ; les Septante lisent : génisse de bœufs, et l’hébreu : génisse de bœuf.] 22 et le lait sera si abondant qu’on mangera du beurre ; car quiconque sera demeuré dans le pays se nourrira de beurre et de miel. 23 En ce jour-là, tout lieu où il y avait eu mille pieds de vigne, valant mille pièces d’argent, sera livré aux (ces pieds de vigne seront changés en) ronces et aux (en) épines. 24 On y entrera avec les flèches et l’arc, car les ronces et les épines couvriront tout le pays. [7.24 Avec les flèches, à cause des bêtes sauvages.] 25 Et toutes les montagnes qui étaient (seront bien) sarclées et cultivées n’inspireront plus de crainte par leurs ronces et leurs épines (ne les atteindra pas), mais elles serviront de pâturages aux bœufs, et les troupeaux (le menu bétail) les fouleront.