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Synagogue
Dictionnaire encyclopédique de la Bible de Augustin Calmet
Westphal Bost

Ce terme grec signifie, ou une assemblée, ou le lieu de l’assemblée. Dans le premier sens, on l’entend d’ordinaire de l’Église des Juifs comparée ou opposée à celle des chrétiens. Ainsi l’on dit que la synagogue est esclave, qu’elle est réprouvée, qu’elle est la rivale de l’Église chrétienne. Saint Jean, dans l’Apocalypse (Apocalypse 2.9 ; 3.9), parlant des hérétiques qui corrompaient la saine doctrine de Jésus-Christ, les appelle la Synagogue de Satan.

Saint Jérôme, dans le texte latin de la Vulgate, donne le nom de princes de la synagogue ou de l’assemblée, Principes synagogœ, aux principaux des Juifs qui avaient rang dans les assemblées du peuple dans le désert. On trouve aussi : Synagoga deorum, synagoga potentium, synagoga peccatorum, synagoga populi, synagoga superborum, pour l’assemblée des juges, des grands, des pécheurs, des superbes et du peuple. Il est fait mention dans les Machabées (1 Machabées 2.42) de la synagogue des assidéens, qui était apparemment une sorte de secte ou d’ordre de Juifs qui faisaient une profession particulière de piété.

Synagogue signifie plus souvent le lieu où les Juifs s’assemblaient pour prier, pour lire et entendre la lecture des livres saints et les autres instructions. Il en est souvent parlé dans l’Évangile et dans les Actes, parce que Jésus-Christ et les apôtres allaient ordinairement prêcher dans les synagogues. L’origine de ces synagogues n’est pas bien connue, et plusieurs savants les ont crues assez nouvelles. Cependant on en voit des vestiges dès le temps d’Élisée. Les personnes de piété du temps de ce prophète s’assemblaient auprès de lui au jour du sabbat pour entendre la lecture de la loi (4 Reg 4.23). Judith passa la nuit en oraison dans le lieu de la prière à Béthulie (Judith 6.21). On place d’ordinaire son histoire sous le règne de Manassé. L’auteur du psaume 73 (Psaumes 73.8), décrivant les ravages que l’armée de Nabuchodonosor avait faits à Jérusalem, dit qu’il brûla les synagogues du Seigneur. Les Juifs captifs de delà l’Euphrate s’assemblaient auprès d’Ézéchiel (Ézéchiel 33.31) pour entendre la parole du Seigneur. Mardochée fit venir tous les Juifs de Suse dans le lieu de prières, pour recommander à Dieu l’entreprise d’Esther (Esther 4.16). L’auteur du troisième livre des Machabées, qui vivait sous Ptolémée Philopator, roi d’Égypte, assez longtemps avant la persécution d’Antiochus Épiphane, dit que les Juifs d’Égypte, délivrés du danger dont ils avaient été menacés, établirent près d’Alexandrie un lieu de prières. Voyez ci-devant Proseuque. Saint Jacques, dans les Actes (Actes 15.31), dit que Moïse avait établi dans les temps anciens des gens qui lisaient et enseignaient ses écrits dans les synagogues tous les jours de sabbat.

Depuis les Machabées, les synagogues devinrent si fréquentes dans Israël, qu’il y en avait presque dans tous les lieux du pays. On dit que dans la seule ville de Jérusalem il y en avait jusqu’à quatre cent soixante ou même quatre cent quatre-vingts. Chaque corps de métier y avait la sienne, et les étrangers mêmes y en bâtirent en particulier pour ceux de leur nation. De là viennent, dans les Actes des apôtres (Actes 6.9), les synagogues des Alexandrins, des Asiatiques, des Ciliciens, des Affranchis ; ceux de Cyrène, destinées pour ceux de ces villes ou de ces nations qui se trouvaient à Jérusalem. Nous parlerons ci-après à part de la synagogue des Affranchis, synagoga Libertinoram.

La synagogue était un édifice public situé au dedans ou au dehors de la ville, et ordinairement dans un lieu élevé. Les Juifs veulent qu’elles dominent tous les autres édifices ou maisons particulières, et ils ne manquent point à cela, à moins qu’ils n’en soient empêchés par une puissance supérieure. Pour l’ordinaire elles sont couvertes, à la différence des proseuques, qui sont ordinairement à la campagne et découvertes. Voyez l’article Proseuque. Au milieu de la synagogue est une tribune ou pupitre, sur lequel on lit le livre ou rouleau de la loi en cérémonie. C’est là où se place celui qui veut parler au peuple. Au fond de la synagogue, du côté de l’orient, et vis-à-vis de la porte, qui est toujours au couchant, autant que faire se peut, est l’armoire où se conserve le livre ou rouleau de la loi enveloppé de quelque linge précieux, et chargé d’ouvrages en broderie. Les femmes y sont séparées des hommes, et placées sur une tribune fermée de jalousies : en sorte qu’elles peuvent voir et écouter sans être vues.

Chaque synagogue a son chef, ou ses chefs et ses officiers, en plus grand ou en moindre nombre, selon la qualité des lieux. Il y a un homme nominé Chazan, qui ordonne et entonne les prières. Il y en a un autre qui en lient les clefs et qui en est comme le marguillier ; ils l’appellent sciamas, ou serviteur. Le prince de la synagogue, nommé archisynagogus dans l’Évangile (Matthieu 5.22-35), et l’ange de la synagogue, ou sage, en hébreu chacham, préside aux assemblées et aux jugements qui s’y rendent quelquefois contre ceux qui ont causé quelque scandale et violé la loi dans quelque point important. Ils imposent aux coupables trente-neuf coups de fouet. Les mêmes présidents invitent à parler dans la synagogue ceux qu’ils en croient capables, et défèrent cet honneur aux étrangers, s’il s’en trouve qui aient le talent de la parole. Ainsi notre Sauveur parla souvent dans ces assemblées (Luc 4.16 ; Matthieu 4.13 ; 9.35) ; et saint Paul, étant à Antioche de Pisidie (Actes 13.13-15), fut invité par les princes de la synagogue de leur dire quelque chose d’édification.

Le nom de synagoga, comme signifiant lieu d’assemblée, s’emploie aussi pour marquer les églises chrétiennes. Par exemple, saint Jacques (Jacques 2.2) : Si introierit in conventum vestrum (le Grec lit, in synagogam vestrani) vir aureum annulum habens : S’il entre dans votre assemblée un homme avec un anneau d’or, etc. Et saint Paul (Hébreux 10.25) : Non deserentes collectionem nostram (le Grec, synagogam nostram) : Ne vous séparez point de notre assemblée.

Synagogue des affranchis

synagoga Libertinorum, était, selon plusieurs interprètes, celle des Juifs (Actes 6.9) qui, ayant été menés captifs en Italie par Pompée et par Sosius, avaient ensuite recouvré leur liberté, et s’étaient retirés à Jérusalem, lorsque Tibère chassa les Juifs de toute l’Italie. D’autres veulent que saint Luc ait écrit Libystinorum, au lieu de Libercinorim et que Libystini soient les peuples de la Libye joignant l’Égypte. Libertini n’est pas un mot grec ; et Libystini reviendrait mieux à la suite du discours de saint Luc. Mais les manuscrits ne favorisent point cette conjecture. Voyez les commentateurs sur les Actes, 6.9.

Les auteurs juifs donnent cette règle générale pour la construction des synagogues ; partout où il y avait dix batelniin, on devait bâtir une synagogue. On dispute sur la signification de batelnim : Buxtorf a cru que c’étaient des personnes gagées pour assister réglément à l’office divin, afin qu’il y eût toujours assemblée au moins de dix personnes. Lightfoot s’est imaginé que c’étaient les ministres et les officiers de la synagogue ; mais le sentiment le plus probable est que c’étaient des personnes d’un âge mûr, libres et en état d’assister constamment au service tous les jours d’assemblée, qui sont au moins deux.jours sans le sabbat ; en sorte que ces jours-là il y eût toujours ce nombre d’assistants, sans quoi le service ne se pouvait pas faire. Les trois jours d’assemblée sont le lundi, le jeudi et le samedi, sans compter les jours de jeûne et de fête solennelle. Ces jours-là on se trouve trois fois à la synagogue, le matin, après midi et le soir, et on y fait la prière. Pour les autres jours, ils prient aussi trois fois en leur particulier. Voyez ci-devant l’article prières.

Grande synagogue. Les Hébreux donnent ce nom à une compagnie de cent vingt personnes, à la tête desquelles Esdras était au retour de la captivité de Babylone : cette compagnie était principalement établie pour deux choses : la première, pour travailler à rétablir, l’observation de la loi selon la pratique ancienne, et approuvée avant la captivité, et la seconde, à rassembler en un corps les livres sacrés, en composer ce qu’on appelle le Canon des Écritures sacrées, el en donner une édition exacte et correcte. Ils tiennent qu’après Esdras, Daniel et ses trois compagnons, Sidrac, Misac et Abdénago tenaient les premières places ; que Simon le Juste était à la queue de cette assemblée ; que tous ces membres étaient contemporains.

Cet arrangement ne peut se soutenir suivant la chronologie, puisque Simon le Juste a vécu si longtemps après Daniel et Esdras. Mais les chronologisles hébreux n’y regardent pas de si près. Ce qui paraît plus certain dans tout cela, c’est qu’Esdras ayant commencé la réforme dont nous venons de parler, elle fut continuée par les plus sages et les plus éclairés des Juifs, et fut enfin achevée, surtout quant au canon des Écritures, sous Simon le Juste, lequel fut établi grand prêtre des Juifs l’an du monde 3702, avant Jésus-Christ 298, avant l’ère vulgaire 302, et qui mourut l’an du monde 3711, avant Jésus-Christ 289, avant l’ère vulgaire 292.

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