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Il est assez souvent question de cette vertu éminemment sociable, par où l’on manifeste ses dispositions favorables au prochain (Genèse 21.23 ; 1 Rois 12.7 ; 2 Chroniques 24.22, Proverbes 15.26 2 Macchabées 9.26, Galates 5.22 etc.). Elle est quelques fois exprimée dans nos versions par des synonymes : bonté, bénignité, humanité, etc. ; c’est par exemple le deuxième caractère de la charité dans 1 Corinthiens 13.4 : « bienveillante » (Stapf., Bible du Centenaire), « pleine de bonté » (Version Synodale). Voir Bonté. La bienveillance est aussi attribuée à Dieu envers ses fidèles (2 Samuel 2.6 ; 1 Rois 3.6 ; Psaumes 5.13 ; Psaumes 106.4 ; Proverbes 14.9 etc.). Voir Grâce.
La bienveillance divine est présentée sous un aspect particulier quand elle est désignée par l’un ou l’autre des deux termes apparentés : le subst. eudokia, limité aux écrits juifs ou chrétiens, et le verbe eudokeïn, connu des auteurs profanes dans le sens de : juger bon. Pour rendre les nuances délicates de ce verbe, la Vulgate le traduit de treize manières différentes dans les vingt et un passages du Nouveau Testament où il paraît. La diversité se retrouve, quoique moins grande, dans les versions françaises ; leurs traductions peuvent être rattachées, en gros, soit à l’agrément de Dieu, soit à sa bienveillance. Les premières ont été indiquées à l’article Agréer. Les autres représentent généralement la volonté de Dieu, non seulement comme procédant de ses jugements justes (eu dokeïn), mais aussi comme manifestant les intentions favorables de sa grâce envers ses créatures qui en remplissent les conditions. Ainsi, ce qui « a plu » à Dieu, c’est la réconciliation du monde avec lui, par le Christ (Colossiens 1.19), sa révélation à Saul de Tarse (Galates 1.15 et suivant), le salut des croyants par la prédication de la croix (1 Corinthiens 1.21), le don du Royaume au petit troupeau (Luc 12.32) ; Dieu a « trouvé bon » (Version Synodale), ou « décidé dans sa bienveillance » (Bible du Centenaire), de révéler l’Évangile aux petits (Matthieu 11.26 parallèle Luc 10.21) ; le chant des anges de Noël célèbre sa « bienveillance envers les hommes » (Luc 2.14), et ce sens général demeure même avec la leçon des meilleurs manuscrits : « parmi les hommes qu’il agrée » (voir Gloria) ; « le bon plaisir de sa volonté », « le dessein de sa bienveillance », c’est de faire de nous ses enfants d’adoption, par Jésus-Christ, et de nous faire connaître les mystères de sa volonté (Éphésiens 1.5 ; Éphésiens 1.9), etc. Dans ces deux derniers textes, la Bible du Centenaire s’en tient au sens philosophique : « en sa libre volonté », sans conserver le point de vue affectif, celui de la faveur divine. De même dans Philippiens 2.13 : Dieu produit en vous volonté et action « pour l’accomplissement de ses desseins », et ici Version Synodale et Segond adoptent la formule « en vertu de (ou : selon) son bon plaisir », formule qui a le tort d’être en France irrémédiablement discréditée par l’usage qu’en firent longtemps les édits de la monarchie absolue : « Car tel est notre bon plaisir ». Sans doute, on pourrait relever chez les Hébreux et les Juifs la notion du bon plaisir absolu du Créateur envers sa créature (cf. le « bon plaisir du potier », maître de son argile : Siracide 33.13) ; mais l’eudokia du Dieu de Jésus-Christ n’est nullement fantaisie, arbitraire caprice, ni même programme simplement impassible : c’est la volonté du Père céleste qui par amour rend possible le salut de ses enfants, ce qui doit leur inspirer la crainte de l’humilité. Nous préférons donc ici la Version de Lausanne : « par sa bienveillance ». Une idée analogue se retrouve sans doute dans 2 Thessaloniciens 1.11 : « les miséricordieux desseins de sa bonté » ; mais on peut lire aussi « désir de bien faire » (note de la Version Synodale) ou « accomplissement joyeux du bien » (Bible du Centenaire), ce qui attribue l’eudokia non plus à Dieu mais à ses fidèles. L’apôtre Paul désigne ailleurs par le même mot son « souhait » de donner sa vie pour ceux qu’il aime (1 Thessaloniciens 2.8), son grand « désir » personnel qu’Israël soit sauvé (Romains 10.1), les « dispositions bienveillantes » de certains prédicateurs chrétiens (Philippiens 1.15), et celles des frères qui ont « bien voulu » faire une collecte en faveur des saints (Romains 15.26 et suivant).
Jean Laroche