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Aujourd’hui Djebel et-Toûr, 562 m d’altitude, à 9 km à l’est-sud-est de Nazareth.
La montagne du Thabor, complètement isolée, vue de l’Ouest, a la forme d’un hémisphère aplati sur ses bords (figure 185). En bordure nord-ouest de la plaine d’Esdrélon, sur laquelle mord à l’ouest le massif du « petit Hermon », ses pentes apparaissent encore abruptes. En effet, au pied de la « montagne », le village de Daboûrîyé (l’ancienne Dabrath de Josué 19.12) n’est qu’à 145 m au-dessus du niveau de la mer. Il en est sensiblement de même d’Iksâl (Kisloth-Thabor de Josué 19.12), 140 m d’altitude, à 4 km à l’Ouest.
Au moment de la répartition de la Palestine, il semble bien qu’une ville du nom de Thabor existait déjà sur le mont du même nom (Josué 19.22), à la frontière de la région dévolue à Issacar. Certains pensent qu’un sanctuaire y était déjà établi (Deutéronome 33.18 et suivant) et l’on pourrait, à ce propos, rappeler qu’au temps de Samuel on connaissait un « chêne de Thabor » (1 Samuel 10.3), sans doute arbre sacré, analogue au chêne vénéré à Sichem (Genèse 35.4).
Le magnifique observatoire que constitue le Thabor en faisait le lieu idéal pour une concentration des forces de Barak (Juges 4.6 ; Juges 4.12 ; Juges 4.14), se proposant d’attirer dans la plaine détrempée par les eaux du Kison les soldats de Sisera.
Le nom du Thabor reparaît une fois encore, au temps des Juges, à propos de Gédéon (Juges 8.18), et ce ne sont plus que d’assez rares mentions dans la littérature prophétique (Osée 1 ; Jérémie 46.18), poétique (Psaumes 89.13) ou historique (1 Chroniques 6.77). À l’époque séleucide, le mont s’appelait Itabyrion (Flavius Josèphe, Antiquités judaïques, V, 3.3 ; Guerre des Juifs, IV, 1.1) ou Atabyrion (Polybe, V, 70.6). Antiochus le Grand s’en empara (218 avant Jésus-Christ).
Au moment de l’insurrection juive, Josèphe fortifia l’emplacement, mais la garnison, attirée dans la plaine, fut anéantie par les Romains (68 après Jésus-Christ). Dès lors, l’histoire du Thabor est celle de la tradition chrétienne qui situa sur cette montagne la scène de la Transfiguration (Marc 9.2) et qui la commémora en élevant des églises. Les fouilles faites par les Franciscains ont retrouvé les ruines de sanctuaires attribués aux Byzantins, puis aux Bénédictins qui accompagnèrent les croisés (XIIe siècle), enfin aux Ermites de Saint-Augustin (XIIIe siècle). Le Thabor, ravagé par le sultan Bibars (1263), resta désert jusqu’au XVIIe siècle, où les Franciscains s’y réinstallèrent.
Aujourd’hui, une superbe basilique a été reconstruite sur les ruines du sanctuaire byzantin. Ajoutons que les orthodoxes grecs revendiquent eux aussi, dans leur propriété voisine, le lieu authentique de la Transfiguration. À notre avis, il n’appartient ni aux uns ni aux autres, et la montagne du miracle est bien plutôt à rechercher quelque part aux environs de Césarée de Philippe (Bâniyâs), sur les pentes de l’Hermon. Là seulement aussi Jésus était à l’écart (Marc 9.2). Le Thabor ne lui offrait pas cette solitude puisque la ville signalée sur ce sommet par Antiochus le Grand n’avait pas complètement disparu, même après les combats soutenus par Alexandre contre Gabinius.
On ne saurait trop insister sur le panorama merveilleux dont on jouit du haut du Thabor : au nord les monts de Haute Galilée, dominés par la croupe neigeuse de l’Hermon ; à l’est les monts de Galaad et la coupure du Jourdain ; au sud le massif du « petit Hermon » (Endor, Nain), les monts de Guilboa et les collines de Samarie ; à l’ouest la plaine d’Esdrélon et la chaîne du Carmel.
Toute l’histoire biblique revit dans ce tour d’horizon ; et il est difficile d’oublier qu’au pied du Thabor, le 15 avril 1799, Bonaparte accouru au secours de Kléber culbuta 25 000 mamelouks.
L’histoire n’est qu’un perpétuel recommencement : sur la montagne d’où Barak était descendu pour anéantir les soldats de Sisera, le maréchal Liman von Sanders avait installé, en 1917, un observatoire. La plaine d’Esdrélon, funeste à Sisera et aux mamelouks, ne le fut pas moins aux Turcs qui, encerclés au pied du Thabor, se rendirent, le 22 septembre, à l’armée anglo-française de Palestine.
A. P.