A B
C D
E F
G H
I J
K L
M N
O P
Q R
S T
U V
W X
Y Z
Nom sémitique de l’oasis caldéenne d’environ 100 km sur 20 située au-dessous de la Mésopotamie, entre le Tigre et l’Euphrate, à l’est du désert arabique, et bordée au sud-est par le golfe Persique (voir Caldée).
Les orientalistes qui veulent faire déborder le Sinéar à l’est du Tigre et comprendre dans son oasis les populations élamites ne paraissent pas accorder assez d’importance au fait que les Sumériens (voir Sumer) et les Élamites (Anzanites) n’ont de commun ni la race, ni la langue, ni l’écriture. Les Élamites constituaient au contraire par delà le Tigre une menace constante pour les Sumériens.
L’oasis du Sinéar et l’oasis du delta du Nil — peut-être aussi l’oasis de Coelé-Syrie occupée par les Amoréens — paraissent avoir été les centres fortunés d’où rayonna la civilisation primitive. Limités par les déserts, ils furent, à travers l’histoire antique, l’objet de convoitise des populations qui les envahirent périodiquement toutes les fois qu’une pression s’exerça du nord ou de l’est sur les peuples habitant aux environs de la mer Noire, de la mer Caspienne ou des plateaux de l’Iran.
Il est probable que les Sumériens établis dans le Sinéar (signifiant : la Caldée primitive) et qui civilisèrent la Mésopotamie, étaient venus eux-mêmes du nord-est, car ils ont avec le type caucasien des affinités indéniables. Woolley estime qu’il faut voir dans l’indication dé Genèse 11.3 : « Le peuple vint de l’est et arriva dans la plaine du Sinéar et demeura là », une allusion directe aux Sumériens. La chose est fort possible. Mais prétendre, comme certains assyriologues, que le mot Sumer n’est qu’une forme nouvelle du mot Sinéar, c’est décidément s’aventurer.
Le Sinéar fut occupé par les Sumériens dès la fin du IVe millénaire avant Jésus-Christ. Au début du IIIe millénaire, nous voyons un roi du Sinéar, le Sumérien Lougal-zaggisi, étendre son empire du golfe Persique à la Méditerranée en remontant l’Euphrate et en redescendant vers les côtes de la Syrie. Il ouvrait un chemin que les conquérants sémites, babyloniens et assyriens reprirent souvent après lui et par lequel ils atteignirent la Palestine et l’Égypte.
Au temps de la littérature biblique, les Sémites occupaient toute la scène le long du Tigre et de l’Euphrate, et le nom de Sinéar désignait, outre l’ancienne Caldée, une bonne partie de la Mésopotamie. C’est ainsi que Genèse 10.10 établit Nemrod à Babylone « dans le pays de Sinéar », et que la tour de Babel se trouve élevée dans la plaine de Sinéar (Genèse 11). Amraphel — que l’on identifie de plus en plus aujourd’hui avec Hammourapi, le célèbre fondateur d’empire babylonien — est présenté comme roi de Sinéar (Genèse 14.1). La dernière dynastie sumérienne ayant disparu vers 1910 avant Jésus-Christ, Sinéar est désormais l’équivalent de Babylonie. C’est à ce titre qu’on le retrouve dans Josué 7.21, où il est question d’un riche manteau de Sinéar (cf. Ézéchiel 27.24 ; voir Vêtement, III, 3), puis dans Ésaïe 11.11 ; Zacharie 5.11 et Daniel 1.2.
Alexandre Westphal