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Personnage assez mystérieux, rencontré à Samarie par le diacre Philippe. Le récit du livre des Actes (Actes 8.9 ; Actes 8.24) explique très bien pourquoi le nom de simonie a été donné au trafic des choses saintes. Le magicien Simon nous y apparaît sous deux aspects dont on peut se demander s’ils sont conciliables. Il est à la fois un magicien qui, par les prodiges qu’il accomplit, frappe les imaginations, et une sorte de gnostique qui spécule sur la puissance de Dieu. Il est probable que Simon ne comprenait pas ce qu’était en lui-même le don du Saint-Esprit et qu’il offrait de l’argent à Philippe pour obtenir de faire des miracles comme ceux auxquels il avait assisté.
Les renseignements relatifs à ce personnage chez les écrivains chrétiens deviennent si vite fabuleux que des doutes ont pu s’élever sur la réalité de son existence. Que la légende se soit emparée de ce nom et ait groupé autour de lui beaucoup de récits fantaisistes, ce n’est pas douteux, mais on ne peut admettre que ce qui est dit de Simon soit uniquement légendaire. Toute l’école de Baur a voulu voir en lui une sorte de caricature de saint Paul. Mais comment l’auteur des Actes, si favorable à Pau !, aurait-il admis une donnée dont le sens hostile ne pouvait lui échapper ? Cette question posée par Renan nous paraît décisive.
On a voulu quelquefois l’identifier avec Simon de Gitton, autre personnage à demi légendaire sur lequel on ne sait à peu près rien. D’après la tradition, celui-ci est célèbre par ses luttes contre saint Pierre. Les Acta Pauli et Pétri disent que leur premier conflit eut lieu à Antioche où Simon fut confondu, puis la tradition conduit Simon de Gitton jusqu’à Rome, à la suite de Pierre qu’il attaque devant Néron, de l’esprit duquel il s’est emparé. Il annonça qu’il s’élèverait dans les airs ; il le fit en effet, nous dit-on ; mais on ajoute que saint Pierre parvint à rompre le charme, que Simon tomba lourdement et vint se briser aux pieds de Néron.
Prolongeant la ligne qui semble indiquée par le verset du livre des Actes où il est parlé de la puissance de Dieu, celle qu’on appelle la grande (verset 10), les apologètes de la foi chrétienne ont fait de Simon le fondateur et le chef d’une secte gnostique qui est mentionnée dans le livre des Philosophoumena. Les Simonites sont combattus chez les Pères des premiers siècles. Le système qu’on attribue à Simon et qui se rapproche de ce que l’on sait de ceux de Basilide et de Valentin est un amalgame assez incohérent de notions stoïciennes, valentiniennes et ophites. L’auteur inconnu qui en a rédigé les linéaments a d’abord été un philosophe imbu de stoïcisme : il identifie Dieu avec le feu. Dans la littérature gnostique, plus la figure de Simon prend de précision et plus elle s’éloigne de la réalité pour tomber dans le pur romanesque.
Il faut laisser à cette figure tout son mystère. C’est tout simplement celle d’un thaumaturge qui a essayé de présenter une doctrine constituant à la fois une parodie de l’Évangile et une croyance en antagonisme avec lui. Il semble bien que Simon ait été le premier des hérésiarques, en tout cas le premier que l’Église chrétienne traita comme tel (voir Loi dans l’Ancien Testament, fin de l’article). Son nom, haï presque à l’égal de celui de Judas, fut pris peu à peu comme synonyme d’anti-apôtre. Il devint la dernière injure et comme un mot proverbial pour désigner un imposteur de profession, un adversaire de la vérité, qu’on voulait indiquer avec mystère.
R. A.