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Le sacrifice est une offrande qu’on fait à Dieu sur les autels par la main d’un légitime ministre, pour reconnaître sa puissance et lui rendre hommage. Le sacrifice diffère de la simple oblation, en ce que dans le sacrifice il faut qu’il y ait changement réel, ou destruction dans la chose offerte, au lieu que l’oblation n’est qu’une simple offrande du don. Les sacrifices sont aussi anciens que le monde. Comme les homnmes ont toujours été dans l’obligation de reconnaître le souverain domaine de Dieu sur leur personne et sur ce, qui leur appartenait, et qu’il s’est toujours trouvé des personnes qui se sont fidèlement acquittées de ce devoir ; on peut dire qu’il y a toujours eu des sacrifices dans le monde. [Voyez-alliance].
Adam et ses fils, Noé et ses descendants, Abraham et les siens, Job et Melchisédech avant la loi ont offert à Dieu des vrais’ sacrifices. La loi n’a fait que régler la qualité, le nombre, les circonstances des sacrifices. Auparavant tout cela était arbitraire. On offrait les fruits de la terre, la graisse ou le lait des animaux, les toisons des brebis, ou le sang et la chair des victimes. Chacun suivait sa dévotion, son zèle, son goût, sa reconnaissance ; mais la loi fixa aux Juifs ce qu’ils devaient offrir, et en quelle quantité. Avant la loi chacun était prêtre et ministre de ses propres sacrifices, du moins il lui était libre de choisir pour présenter ses victimes quel prêtre il jugeait à propos ; ordinairement on déférait cet honneur aux plus anciens, aux chefs de famille, aux princes, aux plus gens de bien. Depuis Moïse cela fut réservé à la seule famille d’Aaron.
On dispute si au commencement il y avait d’autres sacrifices que les holocaustes. Il n’en paraît point d’autres dans l’Écriture. Les talmudistes assurent qu’Abel n’offrit que des holocaustes, toute la chair de l’hostie par le feu, parce qu’il ne lui était pas permis d’en manger. Grotius ne croit pas que ce patriarche offrit des sacrifices sanglants. Le texte de Moïse (Genèse 4.4) porte qu’il offrait des premiers-nés de son troupeau et de leurs graisses. Mais l’Hébreu se peut traduire par, des prémices et du lait. On assure que les anciens n’offraient à Dieu que des fruits de la terre, des herbes, des fleurs, du miel, du tait, du froment, des laines.
On assure que les anciens ne mettaient pas le feu à leurs sacrifices ; mais qu’ils l’attiraient par leurs prières ; et la plupart des Pères que c’est ainsi que Dieu fit connaître qu’il avait pour agréables les sacrifices d’Abel. Il les consuma, dit-on, par un feu envoyé du ciel, faveur qu’il ne fit pas à ceux de Caïn. Il embrasa de même les sacrifices qui lui furent offerts le jour de la consécration d’Aaron, et ceux qu’offrit Gédéon, et ceux que Salomon lui offrir au jour de la dédicace du temple, et ceux qui furent offerts par Élie sur le mont Carmel, et ceux qne les Machabées offrirent au renouvellement du temple profané par Antiochus Épiphane.
Les Hébreux n’avaient proprement que trois sortes de sacrifices ; savoir, l’holocauste, le sacrifice pour le péché, ou le sacrifice d’expiation, et le sacrifice pacifique, ou d’actions de grâces. Il y avait outre cela différentes sortes d’offrandes, de grains, de farine, de gâteaux, de vin, de fruits ; et une manière de sacrifice, qui ne se rapporte à aucun de ceux que nous venons de nommer,. qui est celui où l’on mettait en liberté l’un des deux passereaux que l’on offrait pour la purification du lépreux (Lévitique 14.4-7 ; 51-53), et le bouc émissaire que l’on menait dans un lieu éloigné et escarpe, où on le laissait en liberté (Loe 16.10-26). Ces animaux, ainsi laissés à eux-mêmes, étaient considérés comme des victimes d’expiation, qui étaient chargées des péchés de ceux qui les avaient offertes.
L’Holocauste était offert et brûlé tout entier sur l’autel des holocaustes, sans qu’il en revînt aucune chose à celui qui donnait la victime, ni au prêtre qui l’immolait et qui l’offrait. Seulement le prêtre profitait de la peau ; car on dépouillait ces hosties, on lavait leurs pieds et leurs intestins, pour être offerts au Seigneur. Voyez ci-devant Holocaustes, et Lévitique, chapitre 1.
L’hostie pour le Péché, ou pour l’expiation, ou la purification d’un homme qui était tombé dans quelque faute contre la loi, n’était pas entièrement consumée sur le feu de l’autel. Il n’en revenait rien à celui qui l’avait donnée ; mais le prêtre qui l’immolait en avait sa part ; et voici les particularités qu’il y a à observer sur cela (Lévitique 5 ; Lévitique 5) :
1° Si c’était le grand prêtre qui eût péché par ignorance, il offrait un veau sans défaut. Il l’amenait à la porte du tabernacle, mettait la main sur la tête de cette hostie, confessait son péché, en demandait pardon, immolait et égorgeait le veau, en portait le sang dans le tabernacle, faisait avec son doigt sept aspersions du côté du voile qui séparaît le saint du sanctuaire, mettait un peu de ce sang sur l’autel du parfum, puis répandait tout le reste au pied de l’autel des holocaustes. Après cela il ôtait les graisses qui couvrent les reins, le foie et les intestins ; il mettait le tout sur le feu de l’autel des holocaustes ; et pour la peau, les pieds, les intestins et la chair de la victime, il les faisait brûler hors du camp dans un lieu pur, à l’endroit où l’on mettait les cendres qu’on avait ôtées de l’autel des holocaustes.
2° Si c’est tout le peuple qui ait péché, il offrira de même un veau. Les anciens l’amèneront à l’autel du tabernacle, mettront leurs mains sur sa tête, confesseront leur faute ; après quoi un prêtre égorgera la victime, portera le sang dans le saint, en fera sept aspersions du côté du voile, en mettra sur les cornes de l’autel des parfums, répandra le reste au pied de l’autel des holocaustes, fera brûler les graisses sur le même autel, et le reste du corps, les pieds, la peau et les intestins, hors du camp, il a été dit de l’hostie pour le pécé du grand prêtre.
3° Si c’est le prince du peuple qui ait péché, il offrira un bouc, l’amènera à l’entrée du tabernacle, mettra ses mains sur sa tête, confessera son péché ; le prêtre l’immolera, mettra du sang de la victime sur les cornes de l’autel des holocaustes, répandra le reste du sang au pied du même autel, brûlera les graisses sur le feu de l’autel, et le reste de l’hostie sera pour lui ; il sera obligé de la manger dans le tabernacle, sans oser en porter au dehors.
4° Si c’est un simple particulier (Lévitique 4) qui soit tombé dans le péché, il offrira une brebis ou une chèvre sans défaut, la présentera au prêtre à l’entrée du tabernacle, mettra ses mains sur la tête de son hostie ; le prêtre l’immolera, en mettra du sang sur les cornes de l’autel des holocaustes, répandra le reste au pied du même autel, sur lequel il brûlera les graisses ; et tout le reste sera pour lui.
Que s’il n’a pas de quoi pour offrir une brebis ou une chèvre, il offrira deux tourterelles, ou deux petits de colombe ; l’un pour le péché, et l’autre en holocauste. Celui qui sera offert en holocauste sera consumé entièrement sur le feu de l’autel. Celui qui sera immolé pour le péché, sera présenté au prêtre, qui lui arrachera la tête, selon quelques-uns, ou la lui tournera simplement avec violence du côté des ailes, sans l’arracher, fera l’aspersion du sang de cet oiseau aux côtés de l’autel, répandra le reste du sang au pied du même autel, et la chair sera à lui.
Enfin, si la personne était tellement pauvre, qu’elle ne pût offrir ni une chèvre, ni deux tourterelles, elle pouvait offrir la dixième partie d’un éphi de farine, c’est-à-dire, un peu plus d’un demi-setier de farine sans huile et sans encens ; elle la présentait au prêtre, qui en prenait une poignée, la jetait sur le feu, et le reste était à lui. Il y a encore sur cela quelques autres details que l’on peut voir dans le Lévitique (Lévitique 5.15-16 ; 6.1-2, 3, qui regardent les fautes dans lesquelles il y a, outre le péché et l’hostie d’expiation, une espèce d’amende ou d’obligation de restituer au Seigneur, ou aux particuliers, selon la nature de la faute ; car au reste c’étaient toujours les mêmes cérémonies.
Quant à l’hostie pour le péché, lorsqu’on offrait un bélier, on faisait brûler sa queue, qui était fort grasse, avec le reste des graisses (Lévitique 7.2-3) : mais si c’était un bouc, on ne faisait brûler que les graisses.
Le Sacrifice pacifique s’offrait pour remercier Dieu de ses bienfaits, ou pour lui demander des grâces, ou pour satisfaire à sa propre dévotion, ou enfin simplement pour honorer Dieu. Les Israélites l’offraient quand ils voulaient ; il n’y avait aucune loi qui les y obligeât. Il leur était libre de présenter quels animaux ils voulaient, pourvu qu’ils fussent de la nature de ceux dont il est permis de faire des sacrifices. On n’observait dans ces sacrifices ni l’âge, ni le sexe de la victime, comme il se pratiquait dans les holocaustes et les sacrifices pour le péché ; la loi demandait simplement que les victimes fussent sans défauts (Lévitique 3). Celui qui la présentait, venait à la porte du tabernacle, mettait la main sur la tête de la victime, et il l’égorgeait ; le prêtre en répandait le sang autour de l’autel des holocaustes, brûlait sur le feu de l’autel la graisse qui est dans le bas-ventre, celle qui couvre les reins, le foie et les intestins. Et si c’était un agneau ou un bélier, il y joignait la queue de cet animal, qui est fort grasse en ce pays-là.
Avant que d’arranger ces choses sur le feu de l’autel, le prêtre les mettait sur les mains de celui qui fournissait la victime (Lévitique 7.30-31), puis les lui faisait élever en haut, et agiter vers les quatre parties du monde : le prêtre lui soutenant et lui dirigeant les mains. La poitrine et l’épaule droite de l’hostie appartenaient au prêtre qui était de service ; et il paraît que l’une et l’autre étaient aussi mises sur les mains de celui qui les offrait, quoique Moïse n’exprime que la poitrine de l’animal. Après cela, tout le reste de cette hostie appartenait à celui qui l’avait présentée au prêtre, et il en pouvait manger avec ses amis et sa famille, comme d’une autre viande.
Les Sacrifices, ou les offrandes de farine ou de liqueurs, qui se faisaient pour le péché, étaient en faveur des plus pauvres, qui ne pouvaient pas donner des hosties de bœufs, de chèvres ou de brebis. Ils se contentaient d’offrir de la farine arrosée d’huile, avec de l’encens par-dessus (Lévitique 6.14-15) ; et le prêtre ayant pris une poignée de cette farine et tout l’encens, les répandait sur le feu de l’autel, et tout le reste de la farine était à lui ; il devait la manger sans levain dans le tabernacle, et nul autre que les prêtres n’avaient droit d’en goûter. Quant aux autres offrandes, où l’on donnait des fruits, du vin, de la farine, des gâteaux, ou autre chose, le prêtre en jetait toujours une partie sur l’autel, et tout le reste était à lui et aux autres, prêtres. Ces offrandes étaient toujours accompagnées de sel et de vin, mais sans levain (Lévitique 2.1, 2.3), etc.
Les Sacrifices ou l’on mettait un oiseau ou un bouc en liberté n’étaient pas proprement des sacrifices, puisqu’on n’y répandait pas le sang, et que la victime demeurait en vie et dans son entier. Voici comme on mettait en liberté le passereau qu’on offrait pour la purification du lépreux (Lévitique 14.4-5), ou d’une maison entachée de lêpre. L’on présentait au prêtre deux passereaux ou deux oiseaux purs, avec un bouquet, composé de bois de cèdre et d’hyssope, et lié avec de l’écarlate. Le prêtre immolait l’un des oiseaux sur l’eau vive qui était dans un pot de terre neuf et pur, puis, liant le passereau vivant au bouquet de cèdre et d’hyssope, la queue tournée vers le manche, il le plongeait dans l’eau teinte du sang du premier passereau, en arrosait le lépreux ou la maison, puis mettait en liberté le passereau vivant, et le laissait aller où il voulait.
L’autre sorte d’animal qu’on mettait en liberté était un bouc ; et voici dans quelle occasion cela se faisait (Lévitique 16.5). Au jour de l’expiation solennelle, la multitude des enfants d’Israël présentait au grand prêtre deux boucs pour le péché à l’entrée du tabernacle. Le grand prêtre jetait le sort pour voir lequel des deux serait immolé au Seigneur, et lequel serait mis en liberté, ou serait bouc émissaire, ou Azazel ; car c’est le nom que l’Hébreu lui donne. Celui qui était destiné par le sort à être immolé était mis à mort et offert pour les péchés du peuple. Celui, au contraire qui devait être mis en liberté était amené vivant devant le Seigneur : Le grand prêtre faisait sur lui certaines prières, mettait ses deux mains sur sa tête, confessait les péchés de tout Israël, en chargeait avec imprécations la tête de ce bouc, puis l’envoyait dans le désert par un homme destiné pour cela. Voyez les articles bouc émissaire et hazazel.
Les Sacrifices D’Oiseaux s’offraient en trois occasions :
1° Pour le péché, lorsque la personne n’était pas assez riche pour donner une hostie d’un animal à quatre pieds (Lévitique 5.7-8) ;
2° Pour la purification d’une femme après ses couches (Lévitique 12.6-7) ; lorsqu’elle pouvait offrir un agneau et un pigeonneau, elle donnait l’un et l’autre : l’agneau, pour être offert en holocauste, et le pigeonneau pour le péché ; que si elle n’avait pas le moyen d’offrir un agneau, elle donnait deux tourterelles, ou deux petits de colombe, pour être offerts, l’un en holocauste, et l’autre pour le péché ;
3° On offrait deux passereaux pour ceux qui étaient purifiés de leur lèpre (Lévitique 14.4-49-51), l’un pour l’holocauste, et l’autre pour être mis en liberté, ainsi que nous l’avons dit ci-devant.
Sacrifice de l’agneau pascal. Voyez pâque.
Sacrifice perpétuel, nommé par les Hébreux Themin. Le Seigneur avait ordonné qu’on offrît sur l’autel des holocaustes (Exode 29.38-40 Nombres 28.3), tous les jours, deux agneaux, l’un au matin et l’autre au soir. On les brûlait en holocaustes ; mais à petit feu, afin qu’ils durassent plus longtemps. Le mouton du matin s’offrait vers le lever du soleil, après qu’on avait fait brûler l’encens sur l’autel d’or, et avant tout autre sacrifice. Celui du soir s’offrait entre les deux vépres, c’est-à-dire sur le déclin du jour et avant la nuit. Avec chacune de ces hosties on offrait undemi-setier de vin, autant d’huile d’olive la plus pure, et un assaron ou environ trois pintes de fleur de farine.
Voilà quels étaient les sacrifices des Hébreux, sacrifices imparfaits et incapables par eux-mêmes de purifier les souillures de t’âme. Saint Paul-a compris les sacrifices et les autres cérémonies de la loi sous le nom d’infirma et egena elementa (Galates 4.9). Ils figuraient la grâce et la pureté, mais ils ne la donnaient pas, dit saint Augustin. Ils convainquaient le pécheur du besoin qu’il avait de se purifier et de satisfaire à Dieu ; mais ils ne lui donnaient point l’innocence. Enfin tous ces sacrifices n’étaient que des prophéties et des figures du vrai sacrifice qui s’offre dans l’Église chrétienne, et qui renferme éminemment toutes les vertus et les qualités des autres sacrifices, étant tout à la fois holocauste, hostie pour le péché et pour l’action de grâces, mais avec cette différence qu’il contient toute la réalité et l’efficace dont les anciens sacrifices n’avaient que l’ombre et l’apparence.
Le Sacrifice de L’Église Chrétienne est unique. Il consiste dans le corps et le sang de Jésus-Christ, offert et immolé par le ministère des prêtres sur l’autel sous les apparences du pain et du vin. C’est ce sacrifice qui était figuré par tous ceux des Juifs, et qui a fait l’objet de la confiance de tous les saints et de tous les prophètes de l’Ancien Testament, lesquels avaient en vue cette unique oblation dans tous les sacrifices sanglants qu’ils offraient au Seigneur. L’agneau pascal, les holocaustes de tous les jours, les offrandes de farine et de vin, et les autres oblations, de quelque nature qu’elles fussent, promettaient et représentaient la mort de Jésus-Christ, dont le sacrifice de l’autel est le renouvellement et la réelle repré sentation. C’est ce sacrifice qui a été prédit d’une manière si expresse par Malachie, en ces termes (Malachie 1.10-11) : Je ne recevrai plus de présents de votre main, dit le Seigneur ; car, depuis l’orient jusqu’à l’occident, mon nom est grand parmi les nations, et l’on me sacrifie en tout lieu, et l’on offre à mon nom une oblation toute pure. On voit dans cette prophétie deux points essentiels de notre religion admirablement établis : le premier, l’abolition des sacrifices et des cérémonies de l’ancienne loi ; et le second, un sacrifice nouveau offert au nom du Seigneur, en tout lieu et au milieu des nations. Voyez ci-devant l’article messe et Morts.
C’est ce sacrifice qui fait de notre part tout le mérite des autres sacrifices que nous pouvons offrir à Dieu (Psaumes 1.19). Les Juifs, sans ces dispositions, ne pouvaient offrir à Dieu aucune offrande qui lui fût agréable ; et le sacrifice même de nos autels, tout divin et tout excellent qu’il est en lui-même, devient inutile ou même dangereux à ceux qui l’offrent ou qui y participent avec des dispositions, contraires à celles-là, ou, du moins, qui ne les désirent et ne les recherchent point. Dieu s’explique sur cela assez souvent dans les prophètes (Psaumes 39.9-10) : Vous ne demandez ni sacrifice, ni oblation, ni hostie, nt holocauste ; vous ne désirez que l’obéissance et la promptitude à vous servir. Qu’ai-je à faire de la multitude de vos victimes ? dit le Seigneur ? Je suis rempli. Je ne veux ni vos holocaustes de béliers, ni la graisse de vos animaux gras, ni le sang de vos victimes… Ne m’offrez plus ni vos oblations, ni vos parfums ; j’ai horreur de vos fêtes et de vos jours de sabbat… Quand vous élèverez vos mains vers moi, je détournerai mes yeux, et je fermerai mes oreilles quand vous crierez. Vos mains sont teintes de sang. Nettoyez-vous, lavez-vous, ôtez de devant mes yeux l’iniquité de vos pensées, etc. Voyez (Jérémie 35.15 ; Amos 5.21-22 ; Osée 14.2-3, 4. ; Joël 2.12-13 Psaumes 49.9).
Sacrifices d’hosties humaines
L’idée naturelle que nous avons tous, que l’on doit offrir à Dieu tout ce qu’on a de plus cher et de plus excellent, a porté plusieurs peuples à immoler des victimes humaines. On n’est pas d’accord sur le premier auteur de cette coutume. Quelques-uns l’attribuent à Ilus, nommé autrement Saturne, qui l’introduisit, dit-on, parmi les Phéniciens ; il immola aux dieux son fils Jehid, qu’il avait eu de la nymphe Anobroth. Philon le Juif insinue que la coutume de faire de pareils sacrifices était connue dans la terre de Chanaan avant Abraham ; et quelques savants croient que l’exemple de ces peuples diminua beaucoup l’horreur qu’Abraham aurait dû avoir d’immoler son propre fils, lorsqu’il en reçut le commandement de la part de Dieu.
Mais il y a plus d’apparence qu’Abraham est le premier qui voulut immoler son fils ; et que c’est son exemple mal entendu qui a donne cours à cette coutume. Sanchoniaton, que l’on cite pour le sacrifice de Jehid immolé par Ilus, est un auteur sans autorité. Philon ne nie pas, à la vérité, que l’usage d’immoler des hommes ne fût peut-être reçu dans la Palestine avant Abraham ; mais il soutient que ce patriarche, dans le sacrifice qu’il fut prêt de faire de son fils, n’a pas voulu imiter ces peuples dont il détestait les mœurs et l’idolâtrie. Quel motif aurait pu le porter à cette action ? Est-ce la crainte, l’espérance, la vanité, l’ostentation, le désir d’acquérir des louanges ou des biens ? Isaac lui tenait lieu de tout ; mais l’ordre de Dieu bien marqué ne lui permit pas de délibérer sur une chose qui était si opposée à son inclinations, et si contraire à ses intérêts.
Quant aux sacrifices d’hosties humaines, usités dans la Palestine, dans l’Afrique, dans les Gaules et dans presq.ue toutes les parties du monde, on ne peut disconvenir qu’ils ne soient très-anciens, et qu’on n’immolât très-réellement des hommes aux faux dieux. Je sais que quelques savants ont cru qu’on se contentait parmi les chananéens et parmi les Moabites de faire passer les enfants sur les flammes, ou entre deux feux, ce qu’on appela lustrare per ignem, et je ne doute pas qu’en effet on en usât ainsi quelquefois ; mais pour l’ordinaire on les consumait véritablement dans les flammes, ce qu’il est aisé de prouver.
Moïse dans le Lévitique (Lévitique 18.21) défend de faire passer les enfants par le feu en l’honneur de Moloch. L’Hébreu : Vous ne donnerez point de vos enfants pour les faire passer à Moloch ; ce que quelques-uns entendent d’une simple lustration semblable à celle dont il est parlé dans les profanes.
D’ailleurs l’Écriture parle d’un fils du roi Achaz (2 Rois 16.3) qui avait été offert à Moloch, et qui ne laissa pas de régner après son père.
Mais on a tant d’autres preuves qu’on brûlait les enfants en l’honneur de ce faux dieu, qu’on n’en saurait raisonnablement douter. Voici comme l’Écriture parle de ce crime au Lévitique (Lévitique 20.1-3) : Si un Israélite, ou un étranger qui demeure parmi eux, donne de ses enfants à l’idole de Moloch, qu’il soit puni de mort, et que le peuple du pays le lapide. J’arrêterai mon visage dans ma colère contre cet homme, et je l’exterminerai du milieu de son peuple. Que si le peuple du pays laisse le crime impuni, j’arrêterai l’œil de ma colère sur cet homme et sur sa famille, et je le retrancherai du milieu de son peuple, lui et tous ceux qui auront consenti à la prostitution par laquelle il s’est abandonné au dieu Moloch. Moïse réitère encore ces défenses au Deutéronome (Deutéronome 18.10). Et il paraît par Amos (Amos 5.26) que malgré ces défenses le peuple ne laissait pas de porter même dans le voyage du désert une tente consacrée au dieu Moloch.
Le passage qui parle de la consécration que fit le roi Achaz d’un de ses fils au dies : Moloch ne dit autre chose, à la vérité, sinon qu’il le fit passer par le feu (2 Rois 16.3). Mais l’Écriture ajoute qu’il imita en cela les abominations des peuples de Chanaan que le Seigneur avait exterminés et chassés devant les enfants d’Israël. Or il est indubitable que leg chananéens faisaient mourir leurs enfants en l’honneur de leurs dieux (Psaumes 105.37). Jérémie (Jérémie 19.5) : Ils ont bâti des hauts lieux à Baal, pour briller leurs enfants en holocaustes à Baal. Voyez aussi le même prophète (Jérémie 32.35). Et il est indubitable que c’est principalement à cause de ces crimes que Dieu extermina les chananéens : Voyez (Deutéronome 18.10-12 Sagesse 22.5).
Les Phéniciens, qui sont des restes des chananéens, conservèrent dans lenr pays cette barbare coutume, qu’ils vouthient autoriser par l’exemple d’Ilus ou de Saturne, comme nous l’avons montré ; ils la portèrent dans leurs colonies en Afrique, où elle subsista fort longtemps. Gélon, roi de Sicile, ayant vaincu les Carthaginois, les obligea par le traité qu’il fit avec eux, de renoncer à la coutume où ils étaient d’immoler leurs enfants à Saturne. Justin assure que Darius leur fit commandement par une ambassade qu’il leur envoya, de ne plus sacrifier d’hosties humaines ; mais malgré tout cela ils continuèrent dans ces pratiques jusqu’au proconsulat de Tibère, qui fit pendre les prêtres de Saturne aux arbres qui étaient près de leurs temples. Diodore de Sicile nous donne ainsi la description de Saturne adoré par les Carthaginois ; c’était une figure de cuivre, dont les mains étaient renversées et penchées vers la terre, de manière que quand on mettait sur ses bras un enfant pour le lui consacrer, il en tombait bientôt et allait mourir dans un brasier qu’on entretenait dans une fosse aux pieds de cette divinité.
Il est inutile d’entasser ici grand nombre d’exemples de sacrifices de victimes humaines. Porphyre assure que le livre de Sanchoniaton en était rempli. Ces sacrifices étaient fréquents non-seulement dans la Phénicie et dans la Palestine, dans le pays d’Ammon et de Moab, dans l’Idumée (2 Rois 3.24), dans l’Arabie et dans l’Égypte, mais aussi dans les Gaules, chez les Scythes, les Thraces, dans les Îles de Rhodes, de Chio, de Cypre, et même parmi les Athéniens, et enfin dans l’Amérique.
Quant à ce qu’on dit qu’Achaz eut pour successeur le même fils qu’il avait fait passer par le feu en l’honneur de Moloch, on n’en peut donner aucune preuve. Il est vrai qu’il eut pour successeur Ézéchias ; mais il pouvait avoir plusieurs autres fils. Nous lui en connaissons encore un autre nommé Maasia qui fut mis à mort par les ordres du roi d’Israël (2 Chroniques 28.7).