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Répudiation
Dictionnaire encyclopédique de la Bible de Augustin Calmet

Divorce. La loi de Moïse (Genèse 1.28-30 ; 6.7-20 ; 7.8-14) tolérait la polygamie et le divorce parmi les Hébreux. Nous en avons parlé ci-devant sur l’article de Divorce, et plus au long dans la Dissertation sur le même sujet, imprimée à la tête du commentaire sur le Deutéronome. Nous rapporterons simplement ici ce que dit Léon de Modène sur l’usage moderne des Juifs à cet égard. Une jeune fille au-dessous de dix ans, soit qu’elle ait son père ou non, si elle est devenue veuve après avoir épousé un mari du consentement de sa mère ou de ses frères, et que ce mari vienne à lui déplaire, peut se démarier jusqu’à ce qu’elle ait atteint l’âge de douze ans et un jour, qui est le temps où l’on a la qualité de femme. Il lui suffit de dire qu’elle ne veut point un tel pour son époux, dont elle prend deux témoins qui mettent par écrit ce refus ; et avec cet écrit elle peut se démarier et se remarier à qui il lui plaît. Celui qui a violé une fille ou qui l’a corrompue de quelque autre manière est obligé, selon la sentence des juges, de la prendre pour femme, sans pouvoir jamais la répudier, et de donner cinquante sicles au père de la fille (Deutéronome 22.28-29).

Moïse (Deutéronome 24.1) permet à un homme de répudier sa femme lorsqu’il trouve en elle quelque laideur ou quelque difformité : Si acceperit homo uxorem, et habuerit eam, et non invenerit gratiam ante oculos ejus, propter aliquam foeditatem, scribet libellum repudii et dabil in manu illius, et dimittet eam de domo sua, etc. On a fort raisonné sur ces termes, propter aliquam foeditatem. On peut voir sur cela les commentateurs. Mais voici l’usage des Juifs d’aujourd’hui, selon Léon de Modène : Quand une femme ne donnerait aucun sujet de plainte par sa conduite à son mari, il peut la répudier, pourvu qu’il en soit dégoûté. Toutefois, à moins que d’être jaloux ou d’avoir quelque méchanceté à reprocher à sa femme, on ne doit point faire divorce. Or, pour empêcher qu’on n’abuse de la liberté que donne la loi ; les rabbins ont inventé diverses formalités qui consument bien du temps : en sorte qu’il arrive assez souvent qu’avant qu’on puisse écrire la lettre de divorce, les parties se repentent, se réconcilient et vivent bien ensemble.

La forme de ces lettres de divorce, qu’ils nomment Ghet et qu’ils donnent à une femme, est faite par un écrivain en présence d’un ou plusieurs savants rabbins ; elle doit être écrite sur un vélin qui s’oit réglé et ne contienne ni plus ni moins que douze lignes, et cela en lettres carrées, avec une infinité de petites minuties que l’on doit observer, tant dans les caractères que dans la manière d’écrire, et dans les noms et surnoms du mari et de la femme. De plus, ni l’écrivain, ni les rabbins présents, ni les témoins ne doivent pas être parents ni de l’homme, ni de la femme ; ni entre eux. Voici la substance de cet écrit de divorce : Un tel jour de tel mois, de telle année, moi tel te répudie volontairemient, t’éloigne et te fais libre, toi telle, qui as été ci-devant ma femme, et te permets de te marier avec qui il te plaira. Signé tels et tels comme témoins.

La lettre étant écrite, le rabbin interroge avec subtilité le mari, pour savoir si c’est avec une pleine liberté qu’il s’est porté à répudier sa femme. On fait en sorte-qu’il y ait, s’il est possible, au moins dix personnes présentes à l’action, sans les deux témoins qui signent et deux autres témoins de la date. Après cela le rabbin interroge la femme, et le mari lui donne dans ses mains étendues, et mises l’une auprès de l’autre, le parchemin, en disant : Voilà ta répudiation ; je loigne de moi et te laisse en liberté d’épouser qui tu voudras. La femme le prend et le rend au rabbin, qui le lit encore une fois ; après quoi elle est libre. Il y a encore quantité d’autres petites circonstances que l’on passe ici pour abréger, et qui ne sont inventées que pour rendre cette action plus longue et plus difficile, et pour donner par là aux parties le loisir de se raccommoder. Le rabbin avertit la femme de ne se point marier de trois mois, de peur qu’elle ne soit grosse. À partir de là, l’homme et la femme se séparent et ne peuvent plus demeurer ensemble, et chacun d’eux peut se remarier à qui il juge à propos. Voilà ce que dit Léon de Modène.

Moïse, par les termes de la loi, ne permet qu’aux hommes de faire divorce du moins il ne dit rien qui montre qu’il ait prétendu étendre cette liberté aux femmes, et nous n’avons dans l’Ancien Testament aucun exemple d’un divorce bien marqué fait par une femme : Salomé, sœur du grand Hérode, est la première que nous connaissions qui ait fait divorce avec Costobare, son mari ; en quoi elle agit, dit Josèphe, contre les lois des Juifs, qui ne permettent pas aux femmes de quitter leurs maris, et qui défendent à celles qui les auraient quittés d’en épouser d’autres, sans avoir auparavant reçu du premier des lettres de divorce. Hérodias, dont nous parle l’Évangile (Matthieu 14.3 Marc 6.17), avait aussi quitté son mari, comme on l’infère du récit de Josèphe. Cet auteur dit que sa propre femme, qu’il avait épousée depuis son affranchissement, le quitta à Alexandrie peu après son mariage : Jésus-Christ insinue le même usage, lorsqu’il dit (Marc 10.12) : Si une femme quitte son mari et en épouse un autre, elle commet un, adultère. Les trois sœurs du jeune Agrippa, roi de la Trachonite et de la Batanée, usèrent toutes trois du droit de répudier leurs maris. Bérénice, l’aînée, qui avait épousé en premières noces Hérode, roi de Calcide, son oncle, épousa ensuite Polémon, roi de Pont, et le répudia quelque temps après. Mariamne, sœur de Bérénice, quitta Archélaüs, son premier mari, pour épouser Démétrius, alabarque ou chef des Juifs d’Alexandrie. Enfin Drusille, après avoir été mariée à Aziz, roi d’Emèse, le quitta quelque temps après polir épouser Félix, gouverneur de Judée.

Quant à la répudiation usitée parmi les chrétiens, et limitée par notre Sauveur au seul cas d’adultère, nous en avons parlé ci-devant sous l’article Divorce. On peut voir notre dissertation sur le même sujet, Selden, Uxor Hebraica, et les commentateurs sur saint Matthieu, 5.32.

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