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Cneius Pompeius, surnommé le Grand, un des plus fameux capitaines qu’ait eus la république romaine. Son nom ne se trouve point dans les livres saints : mais Josèphe en parle souvent ; et nous ne pouvons nous dispenser de dire un mot de ce qu’il fit envers les Juifs. Après avoir fini la guerre contre Tigrane, l’an du monde 3938, et celle contre divers autres peuples, en 3939, il envoya en Judée Scaurus, qui étant arrivé à Damas, et ayant appris les troubles qui étaient en Judée entre les deux frères Hircan et Aristobule, s’y rendit en diligence, se nattant de tirer de grands avantages de leurs divisions. À peine était-il entré dans cette province, qu’il reçut des ambassades de la part d’Hircan et d’Aristobule, qui lui demandaient l’un et l’autre son amitié et sa protection. Mais Aristobule lui ayant fait toucher trois cents talents, il se déclara pour lui, et envoya dire à Hircan et à Arétas, qui tenaient Aristobule assiégé dans Jérusalem, que s’ils ne quittaient cette entreprise, il les traiterait en ennemis des Romains. De cette sorte Aristobule fut délivré de ce danger. Quelque temps après, Pompée lui-même étant venu à Damas, Hircan et Antipater le vinrent trouver, se plaignirent de le conduite de Scaurus, qui s’était laissé gagner par l’argent d’Aristobule, et le prièrent de rétablir Hircan sur le trône de Judée, qui lui était dû par sa naissance. Au commencement de l’année suivante, Pompée ayant encore ouï les plaintes réciproques d’Hircan et d’Aristobule, et des Juifs qui se plaignaient de l’un et de l’autre, il les renvoya en paix, disant qu’il irait incessamment en Judée, et qu’il accommoderait leurs différends. Mais Aristobule s’étant retiré, au lieu d’attendre la décision de Pompée, se fortifia, et se mit en état de lui résister, s’il entreprenait de vouloir le détrôner.
Pompée, après avoir terminé la guerre contre Mithridate, marcha en Judée ; et Hircan et Aristobule l’étant venus trouver, plaidèrent leur cause, et soutinrent leurs prétentions réciproques en sa présence. Enfin Pompée ayant ordonné à Aristobule de lui remettre ses forteresses, il obéit, mais à regret ; et en même temps il s’en alla à Jérusalem pour s’y préparer à tout événement. Pompée, ne voulant pas lui laisser le temps de se fortifier, le suivit de près ; et comme il approchait de la ville, Aristobule, qui craignait de s’engager dans une guerre contre les Romains, vint au-devant de lui, lui promit de lui remettre la ville avec une grande somme d’argent, et le supplia de n’en pas venir à une guerre ouverte avec lui. Pompée lui accorda le pardon du passé, et envoya Gabinius pour toucher l’argent, et pour se rendre maître de la ville ; mais les soldats d’Aristobule lui fermèrent les portes ; en sorte qu’il fut contraint de s’en revenir sans avoir rien fait.
Pompée, irrité de ce procédé, arrêta Aristobule, et le retint dans les liens, puis marcha contre Jérusalem. Il fit d’abord aux assiégés des propositions de paix ; mais voyant qu’ils les rejetaient, il commença à former le siégé de la ville. Il se campa au septentrion du temple, qui était l’endroit le plus faible de la ville. Les soldats romains accoutumés au travail, élevèrent des terrasses pour y placer leurs machines, et pour bâtir les murs ; mais les Juifs se défendaient avec tant de courage, et faisaient des sorties si fréquentes contre les ennemis, que si le jour du sabbat n’eût interrompu leur résistance, les Romains n’auraient jamais pu achever leurs terrasses. Les Romains donc s’étant aperçus que ce jour-là ils n’attaquaient point, mais se contentaient de se défendre, ne faisaient contre eux aucune attaque, se contentant seulement de pousser leurs travaux.
Lorsqu’ils furent achevés, on commença à battre les tours et les murs du temple, avec des machines qu’on apporta de Tyr. Une chose que Pompée ne put s’empêcher d’admirer fut que durant tout le siège les Juifs, comme s’ils eussent joui d’une profonde paix, continuèrent à offrir à Dieu leurs sacrifices accoutumés du soir et du matin, sans que la vue du danger pût les leur faire interrompre. Le troisième mois du siège, la brèche ayant été faite, les Romains se jetèrent en foule dans le temple, où ils firent un horrible carnage des prêtres et de tous ceux qui s’y étaient réfugiés. Cornelius Faustus, fils de Sylla, fut le premier qui entra par la brèche. Ce fut la première année de la cent soixante-dix-neuvième olympiade, le jour du jeûne qui se célèbre parmi les Juifs, en mémoire du volume de Jérémie, qui fut brûlé par le roi Joakim, le vingt-huitième jour de ce troisième mois de l’année civile, qui se nomme casleu, et qui répond partie au mois de novembre, et partie à celui de décembre, en l’an du monde 3944, avant Jésus-Christ 59, avant l’ère vulgaire 63.
Pompée étant entré dans le temple y vit des choses qu’il n’est pas permis de voir, et que les prêtres seuls ont droit de regarder. Il trouva dans l’intérieur du temple la table d’or, le chandelier, avec les vases et les encensoirs, avec une grande quantité d’aromates ; et outre cela, environ deux mille talents d’argent dans les trésors du temple ; mais il ne toucha à rien de tout cela ; et après avoir donné ordre que l’on nettoyât le temple des corps morts qui y étaient en grand nombre, le lendemain il y fit offrir des sacrifices à Dieu. Après cela il rendit la souveraine sacrificature à Hircan, et le gouvernement de sa nation ; mais il lui défendit de porter le diadème, et de prendre le titre de roi. Pour ce qui est d’Aristobule, il le garda dans les liens, et le mena à Rome avec deux de ses filles, et autant de fils qu’il avait. On peut voir, sur cette guerre, Josèphe, Antiquités judaïques livre 24 et Ussérius sur l’an du monde 3941, où il rapporte non-seulement ce que Josèphe a dit de cette guerre, mais aussi ce qu’on en trouve dans les auteurs profanes. Le reste de la vie de Pompée ne regarde pas notre dessein. Ce grand homme ayant été vaincu à Pharsale par Jules César vint en Égypte, où il fut indignement mis à mort par les ministres du jeune Ptolémée, dernier roi d’Égypte, l’an du monde 3956, avant Jésus-Christ 44, avant l’ère vulgaire 48.