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Ce terme est pris du grec, et signifie proprement un préservatif, tel que les païens le portaient, pour se préserver de certains maux ou de certains dangers. [Voyez Anneaux, Talisman]. Par exemple, ils portaient des pierres ou des pièces de métal gravées sous certains aspects des astres.
Tout l’Orient est encore aujourd’hui rempli de ces préservatifs ou phylactères, dont les hommes se servent non-seulement pour leurs personnes, mais aussi pour leurs animaux. Mais ces sortes de préservatifs ne sont point de notre sujet. Ce qui nous regarde, ce sont les phylactères dont parle Jésus-Christ dans l’Évangile (Matthieu 23.5) : Les Pharisiens, dit-il, étendent leurs phylactères, et agrandissent les bords de leurs habits. Ces phylactères étaient certaines petites boîtes ou certains rouleaux de parchemin, où étaient écrites quelques paroles de la Loi, et qu’ils portaient sur le front et sur le poignet du bras gauche. Voici sur quoi était fondée cette coutume. Dieu dit dans l’Exode (Exode 13.9) : Afin que mes préceptes soient comme un signe sur votre main, et comme un monument entre vos yeux. Et un peu plus loin (Exode 13.16) : Cela sera comme un signe sur votre main, et comme un bandeau sur votre front.
Les Juifs écrivaient sur leurs phylactères ces quatre passages de la Loi :
1° Consacrez-moi tous les premiers-nés des hommes et des animaux, qui sont les premiers fruits de leurs mères ; car ils sont tous à moi ; et ce qui suit jusqu’au v. 10 du chapitre 13 de l’Exode.
2° Depuis le v. 11 du premier chapitre : Et lorsque le Seigneur vous aura introduits dans le pays de Chanaan, etc. jusqu’au v. 16 du même chapitre.
3° Depuis le v. 4 du chapitre 6 du Deutéronome : Écoutez, Israël ; le Seigneur votre Dieu est le seul Dieu ; et ce qui suit jusqu’au v. 9 du même chapitre.
4° Enfin depuis le v. 13 du chapitre 11 du même livre : Si vous obéissez à tous les commandements que je vous fais, etc., jusqu’à la fin du verset 21 du même chapitre.
Voici ce que Léon de Modène nous apprend en particulier sur ces rouleaux. Ceux qui devaient être attachés au bras étaient deux rouleaux de parchemin écrits en lettres carrées, avec une encre faite exprès, et avec beaucoup de soin. On les roulait en pointe, et on les renfermait dans une espèce d’étui de veau noir. Puis on les mettait sur un morceau carré de la même peau, mais plus dure, d’où pendait une courroie de même matière, large d’un doigt, et longue d’une coudée et demie. On pose ces rouleaux au pliant du bras gauche ; et la courroie, après avoir fait un petit nœud en forme de Jod, se tourne autour du bras en ligne spirale, et va finir au bout du doigt du milieu. On l’appelle le teffila schel-iad, ou la téphila de la main.
Celle du front était composée de quatre morceaux de parchemin, sur chacun desquels était écrite une des sentences dont nous avons parlé. On attache ensemble ces quatre morceaux en carré, et on écrit sur eux la lettre Schin. Puis on met par-dessus un petit carré de peau de veau dure, d’où sortent deux courroies semblables aux premières. Ce carré se met sur le milieu du front, et les courroies, après avoir ceint la tête, font un nœud derrière en forme de la lettre Daleth ; puis viennent se rendre devant l’estomac. Ils nomment celui-ci teffila schel-rosch, la téphila de la tête. Les Juifs d’aujourd’hui se contentent de mettre ces phylactères à la prière du matin. Quelques-uns des plus dévots les mettent aussi à la prière du midi : mais il n’y a nulle obligation sur cela.
Quelques anciens croient que l’usage des tephilims, car c’est ainsi que les Juifs appellent ce que l’Évangile nomme phylactères, est aussi ancien que Moïse et plusieurs interprètes veulent que du temps de Notre-Seigneur cette coutume était générale, que Jésus-Christ lui-même en a porté, et qu’il ne reprend dans les pharisiens que l’affectation d’en avoir de plus grands que les autres. Mais j’ai peine à me persuader que jamais l’usage en ait été général. Saint Jérôme dit que, de son temps, les Juifs indiens, perses, babyloniens, portaient assez communément de ces bandeaux sur le front ; et que ceux d’entre eux qui les portaient passaient pour les plus dévots. Cela n’était donc pas universel, même pour les Juifs de delà l’Euphrate, et beaucoup moins pour ceux de deçà. Le même saint Jérôme croit que les Pharisiens écrivaient le Décalogue sur ces phylactères. Saint Chrysostome, écrivant sur le même passage, condamne l’abus des chrétiens, qui portaient des phylactères au cou, dans lesquels étaient écrits certains noms d’anges en hébreu, ou quelques parties des Évangiles. Saint Jérôme remarque le même abus ; et le pape Gélase a condamné ces sortes de phylactères superstitieux. On peut consulter sur ces tephilims Buxtorf, Synag. Jud., chapitre 4 pages 142, 143 et suivants