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pater. Ce nom, outre sa signification ordinaire de père immédiat, se prend aussi dans le style de l’Écriture pour l’aïeul ; le bisaïeul, ou même l’auteur et le premier père d’une famille, quelque éloigné qu’il soit de ceux qui parlent. Par exemple, les Juifs du temps de Notre-Seigneur, et ceux d’aujourd’hui, et ceux qui vivront jusqu’à la fin des siècles, se qualifieront fils d’Abraham, d’Isaac, de Jacob. Nabuchodonosor est nommé père de Balthazar, quoique Balthazar ne fût que son petit-fils. Jésus-Christ est nommé fils de David, quoique David fût éloigné de lui de tant de générations.
Père se prend aussi pour l’instituteur, le maître de ceux qui sont d’une certaine profession. Jabel (Genèse 4.20-22) fut le père de ceux qui vivaient à la campagne dans des tentes, et qui faisaient métier de conduire des troupeaux. Jubal fut père de ceux qui jouaient des instruments de musique, de la cithare et de l’orgue, ou de la flûte, etc. Ce fameux fondeur de Tyr, Hiram, est appelé le père du roi de Tyr (2 Chroniques 2.13 ; 4.16), et même de Salomon, parce qu’il était leur principal ouvrier, et le chef de leurs entreprises. Les principaux, les anciens des prophètes étaient considérés comme les maîtres et les pères des autres qui étaient leurs disciples ; d’où vient que les jeunes prophètes sont nommés fiai prophetarum, et_ que ceux-ci donnent aux anciens le nom de Père. Pater mi, pater mi, currus Israël, et auriga ejus, disait Élisée à Élie (2 Rois 2.12).
Père est un terme de respect que les inférieurs donnent souvent à leurs supérieurs, et les serviteurs à leurs maîtres : Mon père (2 Rois 5.13), disent les serviteurs de Naaman à leur rnaître : Si le prophète vous avait dit de faire quelque chose de difficile, vous l’auriez dû faire, etc. Le roi d’Israël donnait de même le nom de père au prophète Élisée (2 Rois 6.21) : Numquid percutiam eos, pater mi? Joas étant venu voir ce prophète qui était au lit de la mort, lui disait : Mon père, mon père, vous qui êtes le chariot d’Israël, et celui qui le conduisez (2 Rois 13.14). Réchab, instituteur des Réchabites, est nommé leur père (Jérémie 35.8).
On dit qu’un homme est le père des pauvres et des orphelins, lorsqu’il prend soin de leurs nécessités, qu’il est touché de leurs misères, qu’il pourvoit à leurs besoins : J’étais le père des pauvres, dit Job (Job 29.16). Dieu se déclare le père des pauvres et le juge des veuves (Psaumes 67.6).
On donne souvent à Dieu le nom de Père céleste, de Père simplement. En effet, il est vraiment et éminemment le père, le créateur, le conservateur, le protecteur de toutes les créatures, et principalement de celles qui l’invoquent, qui le connaissent, qui le servent. N’est-il pas votre père, dit Moïse (Deutéronome 32.6), qui vous possède, qui vous a fait, qui vous a créé ? Depuis la venue de Jésus-Christ nous avons acquis un nouveau droit de l’appeler notre père, à cause de l’adoption et de la filiation que le Sauveur nous a méritée, en se revêtant de notre humanité et en nous rachetant par sa mort (Romains 8.13-16) : Vous n’avez pas reçu l’esprit de servitude dans la crainte, comme les Juifs, mais vous avez reçu l’esprit d’adoption des enfants, qui vous fait crier :
Mon père, mon père ; car cet esprit rend témoignage à notre esprit que nous sommes les enfants de Dieu.
Job donne à Dieu le nom de Père de la pluie (Job 38.28) : Qui la produit, qui la fait tomber. Ailleurs il dit (Job 17.14) : J’ai dit à la pourriture : Vous dies mon père. Je reconnais que je suis sorti du sein de la corruption, et que je retournerai dans la pourriture du tombeau ; ou bien, dans l’état où je suis réduit, je regarde la pourriture et les vers comme mes parents et mes amis.
Joseph dit que Dieu l’a établi père de Pharaon (Genèse 45.8), qu’il lui a donné une très-grande autorité dans le royaume de ce prince, et que. Pharaon le regarde comme son père, tant il a de confiance en lui, et de considération pour sa personne ; qu’il lui a donné l’intendance de sa maison et de tous ses États.
Le diable est considéré comme le père des impies (Jean 8.44). Vous voulez imiter les désirs de votre père, dit Jésus-Christ aux Juifs ; il a été homicide dès le commencement, il n’est pas demeuré dans la vérité. Il est menteur et père du mensonge, il est menteur, trompeur, séducteur ; il a trompé Ève et Adam ; il a introduit le mensonge et le péché dans le monde. Il inspire son esprit et ses sentiments à ses sectateurs ; il tient école de mensonge et de tromperies ; il n’est occupé qu’à nous séduire et nous tenter.
Les prophètes reprochent aux Juifs impies de dire aux idoles : Vous êtes mon père (Jérémie 2.27). Ils le disaient réellement, quand ils ne l’auraient pas dit de bouche, puisqu’ils les adoraient comme leurs dieux.
Le père de Socho, le père de Thécué, le père de Bethléem, etc., signifie le père et chef de ceux qui habitent ces villes ; celui qui les a bâties, ou rebâties. Ces expressions sont très-communes dans le premier livre des Paralipomènes, de même que Machir, père de Galaad, père de Maresa, père de Cariathiarim, et père de la Vallée des Artisans, etc.
Se réunir à ses pères, s’endormir avec ses pères, aller à ses pères, sont des expressions communes pour signifier la mort. En ces passages les pères signifient ceux qui ont vécu avant nous, et que nous allons rejoindre dans une autre vie.
Jésus-Christ est nommé dans Isaïe (Isaïe 9.6) le Père du siècle futur, parce qu’il nous engendre en Dieu pour l’éternité ; il nous procure la vie éternelle par l’adoption des enfants de Dieu et par la communication de ses mérites, que nous nous appliquons par nos bonnes œuvres et par la foi animée de la charité. C’est à-peu-près dans le même sens que saint Paul (Hébreux 12.9) dit que Dieu est le Père des esprits ; nos pères ne sont que les pères de nos corps : mais Dieu est le père de nos esprits ; non-seulement il les crée, mais aussi il les justifie, les glorifie, et les rend bienheureux. Jésus-Christ dans l’Évangile (Matthieu 23.9) ne veut pas eue nous donnions aux hommes le nom de père, parce que nous n’avons qu’un seul Père, qui est dans le ciel. Ce n’est pas à dire que nous devions abandonner ou mépriser nos pères terrestres ; Dieu veut que nous les honorions et que nous leur donnions les secours nécessaires ; mais quand il est question des intérêts de Dieu, de la gloire de Dieu, de notre propre salut, si nos pores et mères y sont un obstacle, nous devons leur dire : Nous ne vous connaissons point ; nous devons dire à Dieu avec Isaïe (Isaïe 63.16) : Seigneur, vous êtes notre père, Abraham ne nous a pas connus, et Israël n’a pas su qui nous étions ; c’est vous qui étes notre Père et notre Rédempteur. Ou avec David (Psaumes 26.10) : Mon père et ma mère m’ont abandonné, mais le Seigneur m’a reçu sous sa protection. Ce que nos pères et nos mères ont fait pour nous, comparé à ce que nous devons à Dieu, est si peu de chose, que l’on peut dire que nos pères ne nous sont rien, et que Dieu est le seul qui mérite le nom de notre Père.
Saint Luc (Luc 1.17) parlant de saint Jean-Baptiste, dit qu’il est envoyé pour convertir les cœurs des pères vers leurs enfants, et pour appeler les incrédules à la prudence des justes. Qu’il réunira les sentiments des anciens et des nouveaux Israélites : les uns et les autres parleront le même langage, auront les mêmes sentiments. On ne verra plus les Juifs dégénérer de la justice de leurs ancêtres, ni démentir la sainteté de leur religion par leur mauvaise vie, ni persécuter les saints et les prophètes par leur opposition à leurs maximes et à leurs instructions. Les pères et les fils vivront désormais dans une parfaite intelligence.
Le premier père, le père des vivants, c’est Adam ; le père des croyants (Romains 4.11), c’est Abraham ; le père de la circoncision (Romains 4.22), ou des Juifs, c’est le même Abraham ; le même patriarche est nommé le père de plusieurs nations (Genèse 17.4 Romains 4.17), parce qu’en effet plusieurs peuples sont sortis de lui, les Juifs, les Ismaélites, les Iduméens et plusieurs autres.
Père (droit du père), ou puissance paternelle. La puissance paternelle, dit M. Th. Foisset, naissait du mariage. Devenus grands, les fils du patriarche quittaient parfois sa tente et formaient des établissements séparés. Parvenu à sa quarantième année, Ésaü s’unit à deux Chananéennes, contre le vœu d’Isaac et de Rébecca (Genèse 26.34-35 ; 32.3 ; 33.16), et fixe sa demeure en Idumée ; Juda se sépare également de ses frères, et il épouse à son tour une Chananéenne, sans qu’il soit fait mention du consentement de Jacob (Genèse 38.1). Mais tant que le père commun vivait, le lien de famille n’était pas dissous. Ésaü reparaît aux funérailles d’Isaac, comme Ismaël à celles d’Abraham, et nous retrouvons Juda au lit de mort de son père, sans parler du respect filial dont il fait preuve avant d’emmener Benjamin en Égypte. Le patriarche était le pontife et le juge suprême. Noé, au sortir de l’arche, sacrifie solennelle-tuent au Seigneur, et bientôt il condamne un petit-fils coupable (1). Partout où Abraham dresse sa tente, il élève un autel ; l’Écriture le loue hautement de ce qu’il a gardé les rites anciens et perpétué le culte traditionnel (Genèse 26.57). Jacob suit en tous lieux ces religieux exemples. Juda, au temps de sa séparation d’avec son père, exerçant à son tour les prérogatives du chef de famille, prononce la peine du feu contre sa belle-fille, convaincue d’avoir souillé son veuvage (Genèse 38.24).
La suprématie patriarcale, source de cette royauté de la tente, en réglait la transmission avec une souveraine autorité. Le patriarche désignait son successeur. C’était ordinairement l’aîné de ses fils ; mais quand il dérogeait à la prééminence attachée à la primogéniture, la volonté de l’auteur commun faisait lui. C’est ainsi que Jacob choisit les fils de Joseph, son onzième fils, les adopte du vivant de leur père, les bénit avant tous ses autres enfants d’une bénédiction spéciale et met le plus jeune au-dessus de l’allié (Genèse 48, 17-20). Dieu parlait par la bouche du chef de famille ; il était prophète et sa parole était sacrée (Genèse 20.7), irrévocable comme celle de l’Éternel. Qui ne sait l’histoire d’Isaac, ne pouvant rétracter la bénédiction qu’il avait donnée sans le vouloir à Jacob.
Sans limites dans l’ère patriarcale, la puissance paternelle connut dans l’ère mosaïque des bornes que ne lui assignait point à Rome la législation des Douze-Tables. Le père ne pouvait que déférer son fils coupable aux anciens de la cité, qui seuls prononçaient la sentence de mort (Deutéronome 21.18-21). La triste faculté de vendre ses enfants, dès longtemps passée dans les mœurs publiques, fut restreinte à un seul cas, celui où le père vendrait sa fille impubère à un Hébreu, pour le servir jusqu’à ce qu’elle fût en âge d’être fiancée au fils de l’acheteur, et si les fiançailles n’intervenaient pas, elle était libre (Exode 21.7-11). La puberté équivalait à la majorité des modernes : le jeune Tobie, sans attendre le consentement de son père, épouse la fille de son parent Raguel. À la différence du chef de famille romain, l’Hébreu ne pouvait dépouiller son fils du patrimoine. Moïse lui retira même la faculté de transporter au puîné le droit de primogéniture. Écoutons le Deutéronome : Celui qui a deux femmes et qui n’aime point la mère de l’alné de ses fils n’en est pas moins tenu de respecter le droit de cet aine à une double part de l’hérédité paternelle (Deutéronome 21.15.17). C’était parer à l’un des plus graves inconvénients de la polygamie. Voyez Loi, paragraphe 16.