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An, année
Dictionnaire encyclopédique de la Bible de Augustin Calmet

An, Année

Rien n’est plus équivoque que ce terme dans les anciens. L’année a été et est encore aujourd’hui une source de disputes, soit qu’on considère sa durée, son commencement ou sa fin. Il y en a qui croient que depuis le commencement du monde jusqu’à la cent soixantième année d’Hénoch, on ne compta que par semaines, et que ce fut l’ange Uriel qui révéla à Énoch ce que c’était que le mois, l’année et la révolution des astres et le retour des saisons. Quelques peuples autrefois ont fait leur année d’un mois, d’autres de quatre, d’autres de six, d’autres de dix et d’autres de douze. Les uns ont partagé une de nos années en deux et ont fait un an de l’hiver et un autre de l’été. Le commencement de l’année a été fixé tantôt en automne, tantôt au printemps, et tantôt au milieu de l’hiver. Quelques peuples ont eu des mois lunaires, et d’autres des mois solaires. Les jours mêmes ont commencé diversement ; quelques peuples les commençaient au soir, d’autres au matin, d’autres à midi, et d’autres à minuit. Chez les uns, les heures étaient égales tant l’hiver que l’été ; ailleurs elles étaient inégales, on comptait douze heures le jour et autant la nuit. L’été, les heures du jour étaient plus grandes que celles de la nuit ; l’hiver, au contraire, les heures de la nuit étaient plus longues que celles du jour. Voyez ci-après l’article heure.

Les Égyptiens anciennement ne donnaient qu’un mois à leur année, puis deux, puis quatre mois, et enfin douze mois. On dit que ce fut le roi Pison qui lui donna une forme régulière de douze mois et cinq jours ; mais il faut que ce règlement soit fort ancien, puisque Moïse, qui avait été nourri et instruit en Égypte, n’a pas connu d’autre année que celle de douze mois. Les Égyptiens la commençaient à la canicule ou au commencement de l’automne ; car il paraît qu’ils ont varié en cela, aussi bien que sur le commencement de leurs mois, les ayant commencés tantôt au soir, tantôt au matin.

On ignore la forme de l’ancienne année chaldéenne, parce qu’on ne sait pas leur ancienne histoire. Ils se vantaient autrefois d’une antiquité excessive et prétendaient avoir des observations astronomiques de quatre cent soixante-douze mille ans, selon Diodore de Sicile, ou de quatre cent soixante-dix mille, selon Cicéron, ou seulement de sept cent vingt mille, selon Epigènes cité dans Pline. Calisthène, étant à Babylone, et curieux d’en savoir la vérité, manda à Aristote qu’il n’en avait pu trouver que depuis mille neuf cent trois ans : ce qui irait en remontant à-peu-près au temps de la construction de Babylone. On assure qu’ils commençaient leur jour au lever du soleil, qui était leur principale divinité.

Les Grecs, dans les commencements, n’avaient point d’années fixes. Plusieurs peuples de la Grèce faisaient leur année de quatre mois. Ceux d’Arcadie l’ont faite d’abord d’un seul mois, et puis de trois mois. Ceux de la Carie et de l’Acarnanie la firent quelquefois d’un mois, et quelquefois de six. Mais, dès le temps d’Homère, il parait qu’elle était fixée à douze mois. L’année ancienne, des Athéniens était fixée à trois cent soixante jours ; on la fit ensuite de trois cent soixante-cinq. Ils la commençaient à l’équinoxe du printemps ; leurs jours se comptaient d’un soir à l’autre, et l’année était partagée en quatre saisons, le printemps, l’été, l’automne et l’hiver. Du temps d’Homère, on ne connaissait point encore les heures, selon notre manière de parler : le nom d’heure, dans le poète, signifie les saisons. Ce furent Anaximène et Anaximandre qui reçurent des Babyloniens la coutume de compter par heures.

Chez les Latins, ou les peuples d’Italie, l’année ne fut pas plus fixée, dans les commencements, que chez les autres peuples dont nous venons de parler. L’année de Romulus était de dix mois, aussi bien que celle des Albains : elle était de trois cents jours, commençait en mars, et finissait en décembre. On dit que le roi Tarquin y ajouta les deux mois de janvier et de février. Pour le civil, on en fixa le commencement : en janvier, parce qu’alors le soleil se rapproche de nous ; mais, pour le sacré, on continua de le commencer en mars.

Les peuples de Lavinium faisaient leur année de treize mois, ou de trois cent soixante-quatorze jours ; ceux de l’Umbrie de quatorze mois. Les Albains donnaient trente-six jours au mois de mars, douze à celui de mai, vingt-huit à août, seize à septembre ; ceux de Tusculum donnaient à juillet trente-six jours, et trente-deux à octobre ; ceux d’Aricia lui en donnaient trente-neuf. Les Romains ni les autres peuples d’Italie ne comptaient pas par semaines, comme faisaient les Orientaux, mais ils avaient trois termes pour compter les jours de chaque mois ; les calendes étaient toujours le premier jour du mois. Dans les mois de mars, de mai, de juillet et d’octobre, les six premiers jours appartenaient aux nones ; les autres mois de l’année n’avaient que quatre, jours devant les nones. Depuis les nones jusqu’aux ides il y avait toujours huit jours ; ce qui restait après les ides était compté suivant sa distance des calendes suivantes. On peut voir sur tout cela notre dissertation sur la chronologie, à la tête du commentaire sur la Genèse.

Les Hébreux ont toujours compté par semaines, en mémoire de la création du monde, qui se fit en sept jours. Ils avaient des semaines de sept ans, dont l’année sabbatique était le terme ; des semaines de sept fois sept ans, qui étaient terminées par l’année du jubilé ; et enfin des semaines de sept jours.

Les jours se comptaient parmi eux d’un soir à l’autre, dans le sacré comme dans le civil (Lévitique 23.32). Moïse ne marque aucune distinction à cet égard entre les jours de fêtes et les autres jours. Les fêtes se commençaient inter duas vesperas, c’est-à-dire entre le déclin et le coucher du soleil. Depuis que les Juifs furent assujettis aux Grecs et ensuite aux Romains, ils furent obligés de se conformer à leurs usages, pour l’ordre civil, en commençant le jour à minuit ou au matin, et en partageant le jour en douze heures inégales, et la nuit de même. On en voit l’usage bien marqué dans saint Matthieu et dans saint Jean (Matthieu 20.3-4 ; Jean 11.9).

Les Hébreux ont toujours eu des années de douze mois ; mais, dans les commencements et du temps du Moïse, c’étaient des années solaires de douze mois, à trente jours chaque mois, en sorte néanmoins que le douzième mois avait trente-cinq jours. Ou voit par le calcul que Moïse nous donne des jours du déluge (Genèse 7), que l’année hébraïque était de trois cent soixante-cinq jours. On présume qu’ils avaient un mois intercalaire au bout de cent vingt ans, lorsque le commencement de leur année était dérangé de trente jours entiers. Mais on avoue qu’il n’est jamais parlé dans l’Écriture de treizième mois ni d’intercalation. Il est à croire que Moïse suivait l’ordre de l’année égyptienne, puisqu’il sortait de l’Égypte, qu’il y était né, qu’il y avait été instruit et élevé, et que le peuple d’Israël, dont il était chef, était accoutumé depuis longtemps à cette sorte d’année. Or, l’année égyptienne était solaire et de douze mois de trente jours chacun, depuis très-longtemps, comme nous l’avons montré dans la dissertation sur la chronologie, imprimée à la tête du Commentaire sur la Genèse.

Depuis Alexandre le Grand et le règne des Grecs dans l’Asie, les Juifs comptèrent par mois lunaires, principalement en ce qui regarde le sacré et l’ordre des fêtes. Saint Jean, dans l’Apocalypse (Apocalypse 11.2-3 ; 12.6-14 ; 13) ne donne que douze cent soixante jours a trois ans et demi, et par conséquent trente jours justes à chaque mois, et trois cent soixante jours justes à chaque année. Maimonides dit que les années des Juifs étaient solaires et les mois lunaires, et Géminius fait la même remarque sur les années des Grecs. Depuis la clôture du Talmud, ils ont usé d’années purement lunaires, ayant à l’alternative un mois plein de trente jours, puis un mois vide de vingt-neuf jours ; et, pour accommoder cette année lunaire au cours du soleil, ils intercalent au bout de trois ans un mois entier après Adar, et ils nomment ce mois intercalé Ve-Adar, ou le second Adar.

L’année civile des Hébreux a toujours commencé en automne, au mois qu’ils appellent aujourd’hui Tizri, qui répond à notre mois de septembre, et qui entre quelquefois dans octobre, selon les lunaisons. Mais leurs années saintes, qu’on suivait selon l’ordre des fêtes pour les assemblées et les autres, actes de religion, commençaient au printemps, au mois de Nisan, qui répond à mars et qui occupe quelquefois une partie d’avril, selon le cours de la lune.

Voici l’ordre et le nom des mois hébreux d’aujourd’hui :

1. Tizri, mois plein, avait trente jours et répondait à septembre.

2. Marsehevan, mois vide, n’avait que vingt-neuf jours et répondait à octobre.

3. Casleu, plein, avait trente jours et répondait à novembre.

4. Thébet, vide, n’avait que vingt-neuf jours et répondait à décembre.

5. Sébat, plein, avait trente jours et répondait à janvier.

6. Adar, vide, n’avait que vingt-neuf jours et répondait à février.

7. Nisan, plein, premier de l’année sacrée, avait trente jours et répondait à mars.

8. Jiar, vide, n’avait que vingt-neuf jours et répondait à avril.

9. Sivan, plein, avait trente jours et répondait à mai.

10. Thammuz, vide, n’avait que vingt-neuf jours et répondait à juin.

11. Ab, plein, avait trente jours et répondait à juillet.

12. Elul, vide n’avait que vingt-neuf jours et répondait à août. Voyez Ci-après l’article mois, et à la tête de ce dictionnaire le calendrier des Hébreux.

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