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Moïse (Lévitique 11.30) met entre les animaux impurs, dont il défend de manger, deux sortes de lézards, stellio et lacerta. On connaît plusieurs sortes de lézards. Il y en a dans l’Arabie d’une coudée de long ; mais on dit que dans les Indes on en voit de vingt-quatre pieds de longueur. On mange des lézards dans l’Amérique, où ils sont fort bons. Un lézard peut rassasier quatre hommes. Il y a beaucoup d’apparence que l’on en mangeait aussi quelquefois dans l’Arabie et dans la Judée, puisque Moïse les met au rang des animaux immondes.
Nous trouvons plusieurs sortes de lézards dans l’Écriture, du moins nous trouvons jusqu’à trois ou quatre termes pour l’exprimer ; letaa, chotneth, tinschemeth, et schetnamith. Les trois premiers mots se trouvent dans l’endroit cité de Moïse. Les deux premiers sont traduits par, stellio et lacerta. Le troisième est traduit par, une taupe ; mais Bochart soutient que c’est un caméléon. Le quatrième est décrit dans les Proverbes (Proverbes 30.28), et il y est traduit par stellio, un lézard. Le même auteur, à qui nous déférons beaucoup dans ces matières, appuie la version de la Vulgate et des Septante contre ceux qui traduisent un singe, une sangsue, ou une araignée. On le peut voir de Animal sacris, prima parle, lib. 4.C. 4.5, et 7.
Le stellio de la Vulgate est rendu par lézard dans la traduction de Sacy, adoptée par dom Calmet, Vence et M. Glaire. Dans la Bible de Vence, 5° édition (Paris, 1829) nous lisons sur le mot dont il s’agit la note suivante : « Plusieurs nouveaux interprètes pensent que le terme de l’original se doit entendre de l’araignée. » Toutefois le texte latin y est rendu de cette manière : « Le lézard, qui se soutient sur ses mains… » La Bible de M. Glaire (Paris, 1835) reproduit la même note ; mais la traduction est paraphrasée en ces termes : « Le lézard, ou plutô l’araignée, qui se soutient sur ses mains… » Nous devons ajouter que M. Glaire paraît avoir abandonné cette interprétation et adopté celle de Bochart, qui trouve que le semamith n’est autre que le stellio ou lézard dont la peau est couverte de taches semblables à des étoiles. Voyez l’Introduction aux livres de l’Ancien et du Nouveau Testament, tome 2 pages 99.
Le révérend David Scot a fait sur le Semamith de Salomon, On the Semamith of Salomon, une notice qu’il communiqua à la Société d’histoire naturelle Wernérienne le 7 avril 1827. Nous allons la reproduire ici tout entière. Laissons donc parler l’auteur.
« Nous lisons, dans le 25e verset du 30e chapitre des Proverbes de Salomon, qu’il y a quatre êtres de peu d’importance sur la terre, mais qui sont doués d’une grande sagesse ; et, dans le 28e verset du même chapitre, nous lisons que le dernier de ces quatre êtres s’appelle Semamith, qui se tient suspendu par les paae-s, et habite les palais des rois.
Comme aucun autre sens de ce mot Semamitha ne se rencontre dans la Bible hébraïque ; les docteurs juifs en ont donné plusieurs interprétations absurdes. Nous ne nous arrêterons qu’à deux, qui nous paraissent les moins déraisonnables, en outre de l’interprétation la plus générale.
La première fait de Semamith une hirondelle, mais sans que nous puissions y trouver d’autre raison que la similitude du son de Senunith, nom chaldéen de cet oiseau. On peut quelquefois trouver la signification d’un mot par un autre qui a le même son, mais souvent cette ressemblance pourrait conduire à de graves erreurs.
Il est certain que l’hirondelle bâtit son nid dans les encoignures des fenêtres et parfois dans les cheminéesde nos maisons, et qu’elles font de même en Palestine ; mais il n’en résulterait pas l’assurance qu’elles se tiennent suspendues par les pattes, et qu’elles habitent les palais des rois, car il serait tout à fait absurde de parler de cette manière d’aucun animal ailé.
L’autre interprétation tendrait à traduire Semamith par singe, qui est un animal très-rusé, dont les princes s’amusent de temps en temps, et qui a aussi deux pattes, avec lesquelles il peut saisir les objets, ce qui, dans un style relâché, peut s’appeler des mains.
Peut-être le singe ne peut être regardé comme trop gros pour être appelé une chose de peu d’importance sur la terre ; on convient généralement qu’il peut exciter l’attention, si ce n’est même l’admiration, par ses tours ; mais il n’habite point les palais, à moins d’y être contraint ; il faut qu’ils soient déserts, pour qu’il les choisisse et y fasse son séjour.
Pour éviter ces inconvenances, on a songé à l’araignée, et assurément cet insecte peut citer une foule de noms en sa faveur. Sa cause a été soutenue avec une étonnante uniformité par Levi, Elias et Kiruchi, parmi les Juifs ; par Santes, Arias, Mercer, Munster, Castalio, Junius et Tremellus parmi les chrétiens ; et enfin par les traducteurs anglais, italiens et genevois.
Il est indubitable que l’araignée se trouve aussi bien dans les palais des rois que dans les maisons des pauvres. Il y a beaucoup d’espèces d’araignées, et l’une d’elles habite spécialement les maisons.
Pourtant, cette espèce d’araignée se trouve plus, souvent dans les chaumières que dans les palais, parce que l’on souffre moins ces insectes dans ces édifices, où l’on tient davantage à la propreté. Les araignées sont plus disposées à fixer leur séjour dans des lieux abandonnés, où l’on serre de gros meubles inutiles ou mis en oubli.
Semamith n’est pas le nom ordinaire de l’araignée en hébreu. Elle s’appelle Ocubish, qui s’est changé en Ocubim dans la Chaldée, et en Unkabus dans l’Arabie., mots qui tous signifient une araignée.
Il y a dans la Bible hébraïque deux passages où il est fait mention de l’araignée sous le nom d’Ocubish. L’un de ces passages est dans le livre de Job (Job 8.14) : « L’espérance de l’hypocrite sera détruite, et son crédit sera le trou ou la toile d’une araignée, » L’autre est dans lsaie (Isaïe 59.5) : « Ils font éclore des œufs du basilic, et tissent la toile des araignées. » Tout le monde voit qu’il est question dans ces passages, des travaux de l’araignée.
Nous admettons que cet insecte ou tout autre être puisse avoir deux noms, pourvu que l’un rappelle quelque idée que l’autre ne donne pas ; et nous n’aurions aucune objection à faire contre le nom Semamith, comme le nom de l’araignée, pas plus qu’à celui de Ocubish, si les détails qui accompagnent l’emploi du premier correspondaient aussi bien avec les habitudes de l’insecte qu’elles y correspondent quand on se sert du dernier.
Par ce défaut de rapport, plusieurs interprètes, tant anciens que modernes, se sont persuadé que l’animal désigné sous le nom de Semamith appartenait au lézard, et non à l’insecte.
Les Septante, qui sont les plus anciens traducteurs, et dont l’autorité est si respectable, ont traduit Semamith par le mot Calabotes, que le lexicographe Hésychius déclare titre un certain poisson ou un lézard.
Comme les lézards n’ont pas la forme des poissons, et que quelques-uns d’entre eux vivent aussi bien dans l’eau que sur terre, on peut excuser cet interprète, qui prétendait que par Semamith Salomon entendait un poisson, ne fallût pas un grand effort de raisonnement pour découvrir que les poissons n’habitent pas les palais des rois, quoiqu’ils puissent habiter leurs étangs.
Le Calabotes des Septante est traduit par les interprètes de la Vulgate par le mot stellio ; et beaucoup de lézards peuvent être appelés stelliones, à raison de la variété des couleurs de leur peau, qui sont principalement brillantes, dans les pays chauds.
« Cette traduction de Semamith par les Septante et par les interprètes de la Vulgate est appuyée par les traducteurs du syriaque, du chaldéen et du samaritain. Le terme que chacun d’eux emploie signifie stellio, ou lézard tacheté.
Bochart, dans son Hierozotcon, dit qu’il y a deux espèces de stellio, l’une venimeuse, et l’autre qui ne l’est pas ; mais il a des doutes sur ce qu’on entend par Semamith. Si c’est le stellio réputé venimeux, Sem avec un samech, qui peut se changer en sin, suivant quelques-uns, signifiera poison, et, par conséquent, le Semamith sera le lézard venimeux. Il y a cependant d’autres personnes qui prononcent Schemamith, et le font venir d’un verbe qui signifie étonner ou stupéfier, et ils pensent que le lézard a reçu ce nom, parce qu’il étonne ou stupéfie le scorpion, dont on prétend qu’il est l’ennemi le plus terrible et le plus déterminé. Aussi Galien, De Theriaca Pisonem, affirme que le stellio étonne et détruit les scorpions, dès l’instant que son regard les frappe ; et AÉlien et Isidore, etc., sont d’accord avec Galien pour donner au stellio ce pouvoir sur le scorpion.
Mais ce qui vient encore plus à l’appui de notre prétention à prouver que le Semamith est le stellio, est cette maxime du Thalmud. Traité sur le sabbat chapitre 8 « Le Semamith » remplit de terreur le scorpion », maxime qui ne pourrait s’appliquer à aucune araignée, quelque effroyable qu’elle fût. Nulle araignée ne peut attraper sa proie qu’en l’enveloppant dans sa toile : le scorpion doit avoir à se débattre contre un ennemi plus fort et plus cruel, puisque son seul regard le prive presque tout à fait du sentiment et de la vie.
Si le Semamith est le lézard réputé venimeux, Bochart nous apprend que les Arabes ont un lézard auquel ils donnent le nom de Samabras, qui signifie lézard tacheté, ou lézard qui a des tachetures comme un lépreux, et auquel le Semamith, s’il est le lézard venimeux, peut se rapporter.
Si cependant le Semamith est le stellio inoffensif, Bochart pense que ce peut être le Wezgu, qui est moins gros que le Samabras, et convient tellement à la description que donne Salomon du Semamith, que c’est un petit être sur la terre.
Mais si le Semamith est le Samabras ou le Wezgu, comme Bochart a cherché à l’établir, les lézards sont plus abondants dans les pays chauds et secs ; et, comme l’Arabie ne le cède à aucun pays sous ces deux rapports, elle peut s’appeler la terre des lézards. On en voit partout où l’on dresse une tente, partout où l’on bâtit une maison. Les Arabes, qui en sont continuellement infestés, ont des noms pour chaque espèce ; et nous sommes persuadés que, dans aucune langue, la nomenclature de cette race d’animaux n’est plus complète qu’en arabe.
À tort ou à raison, les lézards sont détestés par les Arabes, comme ils l’étaient par les Grecs et les Romains ; Jahius, fils de Chomer, affirmait que l’individu qui aurait tué cent stelliones lui serait plus cher que celui qui aurait racheté cent esclaves, et Antoine Libérales prétendait qu’ils étaient abhorrés des dieux et des hommes, et que quiconque en tuait quelques-uns rendait un service très-agréable à Cérès.
Tous les lézards, à quelque espèce qu’ils puissent appartenir, stelliones, geckos, iguanas, ont quatre pattes ; celles de derrière, mais surtout celles de devant, ressemblent beaucoup aux bras et aux mains de l’homme. Quiconque a vu quelque lézard a été sur-le-champ frappé de cette ressemblance ; et, par cette raison, tous les lézards, et il y en a immensément, ont été avec raison et convenablement appelés lacertoe, c’est-à-dire, créatures avec des bras ou des mains.
En supposant que le Semamith de Salomon soit un lézard, on a plus de raison de dire qu’il se tient suspendu par les bras ou par les mains, en courant çà et là pour attraper des mouches, qui sont sa nourriture ordinaire ; éviter la poursuite de ses ennemis, lorsqu’il glisse le long des endroits où ils ne peuvent atteindre, ou pour assurer sa retraite, si elle est au-dessous ; sous ces rapports, il était naturel qu’il admirât leur dextérité, et qu’il déclarât qu’elle signalait une grande sagesse, quoiqu’ils fussent peu de chose sur la terre.
Ce que dit Bruce démontre que les lézards de toutes espèces sont très-nombreux dans la Syrie : « Je puis dire positivement, sans exagération, que j’en vis un jour au-delà de plusieurs mille dans la grande cour du temple du Soleil, à Balbec. La terre, les murailles et les pierres, en étaient couvertes, et la variété des couleurs qu’ils présentaient faisaient un effet extraordinaire, étant éclairées par le soleil pendant qu’ils jouissaient de sa chaleur, ou qu’ils dormaient. »
Là où il existe tant de lézards, il doit y en avoir de beaucoup d’espèces ; et, après avoir tout fait pour les préciser, il reste encore une grande confusion, deux ou plus d’espèces étant décrites comme une seule, tandis qu’on donne le même nom à deux ou plusieurs espèces.
En avouant les obligations que nousavons à Bochart pour les principaux matériaux de cet essai, nous regrettons de n’avoir pu parcourir Scheuchzer, qui a traité en grand l’histoire naturelle de la Bible ; et nous n’avons ni lu ni appris le nom de celui qui a essayé de signaler l’espèce de lézard qui correspond au Semamith de Salomon.
Le stellio du Levant de Cuvier peut être cité ; §es synonymes sont le stellio lacerta de Linnée, le koscordylos des Grecs modernes, qui n’est pas le hardun des Arabes, qui, si nous ne nous trompons pascorrespond mieux à ce qu’on appelle crocodile de terre. C’est ce stellio du Levant que les Mahométans tuent souvent, parce qu’ils supposent qu’il se moque d’eux en baissant la tête pendant qu’ils disent leurs prières.
Ou le Semarnith de Salomon peut être le Gecko des murons de Cuvier, dont les synonymes sont le Gecko d’Hasselquista de Schneider. Il est très-commun dans les maisons de ce pays, sur les bords de la Méditerranée à l’est et au sud. Au Caire, on l’appelle Abou burg, ou le père de la lèpre, parce qu’on suppose qu’il communique la lèpre à ceux qui mangent ce qu’il a touché avec ses pattes. Quand il se promène sur la main de quelqu’un, il survient une inflammation à la peau ; ce qui vient plutôt, dit Cuvier, de ses griffes aiguës, que de la matière délétère qu’il y communique.
Nous ignorons si le Lacerta ocellata, comme quelques-uns l’appellent, diffère des lézards dont on vient de faire mention ; il a envi ron une palme de long ; il a les pieds courts, et en général cinq articulations aux doigts. Il est d’un gris verdâtre, avec des tachetures ou des rondeurs brunes. Il est originaire d’Égypte, et nous présumons qu’il l’est également de la Palestine ; il fréquente les maisons.
Enfin les autorités et les probabilités sont à l’appui de l’idée que le Semamith de Salomon est le lézard des maisons et non l’araignée, quoique pour le moment nous ne puissions dire quelle espèce de lézard est celle que l’on doit désigner parmi toutes les autres (Edinburgh new Philosophical Journal ; octobre à décembre 1827, p.30) »