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Adrien
Dictionnaire encyclopédique de la Bible de Augustin Calmet

Le nom de l’empereur Adrien ne se lit pas dans la Bible, mais nous croyons qu’il est désigné dans l’Apocalypse (Apocalypse 8.10-11) en l’endroit où il est dit que le troisième ange, ayant sonné de la trompette, il tomba une étoile du ciel qui causa la mort à une infinité de personnes. Voici le texte : « Le troisième ange sonna de la trompette, et une grande étoile ardente comme un flambeau tomba du ciel sur la troisième partie des fleuves et sur les sources des eaux. Cette étoile s’appelait absynthe : et la troisième partie des eaux ayant été changée en absinthe, un grand nombre d’hommes mourut pour en avoir bu. » Cette étoile marque Barchochébas, fameux imposteur juif, qui porta son peuple à la révolte. L’empereur Adrien envoya contre eux Tinnius Rufus et Jules Sévère, qui leur firent une guerre sanglante. On peut voir ci-après l’article de Barchochébas.

L’empereur Adrien, qui n’aimait pas les Juifs, à cause qu’il avait été témoin des troubles qu’ils avaient causés sous Trajan, résolut pour les mortifier et pour les tenir en bride, d’envoyer une colonie à Jérusalem et d’y bâtir un temple à Jupiter. Jérusalem était alors assez peu considérable, et depuis sa ruine et sa destruction par Titus, elle n’avait pu se rétablir que très-imparfaitement.

Les Juifs ne pouvant souffrir que cette colonie d’étrangers vînt habiter dans leur ville et y apportât une religion étrangère, commencèrent à se mutiner, vers l’an 134. Barchochébas, qui parut vers le même temps, et qui entreprit de se faire reconnaître pour Messie, les anima et les encouragea dans leur révolte. La présence d’Adrien, qui était alors en Égypte et en Syrie, les tint quelque temps dans le respect. Mais comme ils étaient les ennemis des Romains, ils leur forgèrent de mauvaises armes, afin qu’ils ne pussent s’en servir contre eux ; ils élevèrent ensuite de petits forts avec des murailles dans les lieux qui leur parurent les plus avantageux, et tirent des canaux souterrains, pour se communiquer par ce moyen et se dérober à la poursuite de leurs ennemis ; vains efforts que les Romains méprisèrent au commencement.

Mais lorsqu’on vit que le nombre des mutins s’augmentait ; qu’ils se battaient en désespérés ; que tous les voleurs des provinces voisines se joignaient à eux dans l’espérance du butin, et que leur révolte influait sur les provinces voisines et même ébranlait tout l’univers, selon l’expression d’un historien, on fut obligé de changer de mesure. Tinnius Rufus, qui avait été quelque temps auparavant lieutenant de l’empereur dans la Syrie, l’était alors dans la Judée ; il attaqua les Juifs et en fit mourir un grand nombre ; mais il perdit aussi beaucoup de monde de son côté. L’empereur Adrien lui envoya du renfort, ce qui n’empêcha pas qu’il ne fût battu en plusieurs rencontres. Enfin Adrien fit venir d’Angleterre Jules Sévère, l’un des plus grands capitaines de son siècle, pour leur tenir tête. Sévère n’osa livrer la bataille aux Juifs trop nombreux. Il les attaqua par pelotons, leur coupa les vivres et alla enfin mettre le siège devant Bitther ou Béthoron qui leur servait de retraite.

La ville se défendit avec beaucoup d’opiniâtreté. Barchochébas, qui s’y était enfermé, encourageait les Juifs par de vaines promesses de secours. La ville fut prise (le 10 août de l’an 18 d’Adrien, de Jésus-Christ 133), et les Romains y firent un carnage horrible.

Les Juifs disent qu’il y périt plus de monde qu’il n’en était sorti d’Égypte ; et ils ont inséré dans leur liturgie une hymne pour le 18 du mois Ab (qui répond aux mois de juillet et d’août), dans laquelle ils appellent Adrien un second Nabuchodonosor, et prient Dieu de se souvenir de ce prince cruel qui a détruit quatre cent quatre-vingts synagogues ; on compta cinq cent quatre-vingt mille Juifs tués, tant dans les batailles que dans les rencontres. Les Juifs disent qu’on vit sur une seule pierre à Bitter les crânes de trois cents enfants, et que les ruisseaux de sang étaient si gros, qu’ils entraînaient des pierres de quatre livres jusque dans la mer, qui en est éloignée de quatre milles ; enfin, les habitants de ces lieux ne fumèrent point pendant sept ans leurs terres, suffisamment engraissées par les cadavres.

Le nombre des soldats romains et des troupes auxiliaires qui périrent dans le cours de cette guerre, qui dura trois ans et demi, selon les rabbins et saint Jérôme, ou seulement deux ans selon d’antres, fut très-grand ; et Dion remarque que l’empereur Adrien écrivant au sénat le succès de cette guerre, n’osa mettre à la tête de ses lettres cette formule ordinaire : « Si vous et vos enfants êtes en bonne santé, je m’en réjouis ; moi et l’armée sommes en bon état », à cause des grandes pertes qu’il avait faites dans cette guerre.

Après cela Adrien fit achever de bâtir la ville de Jérusalem, dont il changea le nom en celui d’Ælia qui était celui de sa famille ; il en chassa les Juifs, leur défendit sévèrement d’y entrer, en fit mener un très-grand nombre de ceux qui avaient été faits prisonniers durant la guerre, à la foire qui se tenait près le Térébinthe, où l’on croyait qu’Abraham avait reçu les trois anges. On les y vendit au prix des chevaux, et ce qui n’y put être vendu, fut transporté à une autre foire qui se tenait à Gaza. Le reste fut mené en Égypte. Saint Jérôme appliquait à ce malheur des Juifs ces paroles de Zacharie : (Zacharie 9.7) Je paîtrai un troupeau destiné à la mort. Et les docteurs hébreux expliquaient de la même guerre ces mots de Jérémie (Jérémie 31.15) : Un cri a été oui en Ramah, Rachel pleurant ses enfants, etc. Les Juifs achetaient à prix d’argent la liberté, non d’entrer à Jérusalem, mais seulement de la voir de loin, et de venir pleurer sa chute et sa désolation.

On assure que dans cette occasion Tinnius Rufus, ou, comme l’appellent les rabbins, Turannus ou Turnus Rufus, fit passer la charrue sur le lieu où avait autrefois été le temple de Jérusalem. On montre encore aujourd’hui quelques médailles d’Adrien frappées à cette occasion, sur le revers desquelles la Judée est représentée comme une femme, tenant auprès d’elle deux enfants nus, et qui sacrifie sur un autel ; apparemment pour marquer que l’empereur avait soumis la Judée et l’avait contrainte à sacrifier aux faux dieux. Dans une autre médaille on voit la Judée à genoux, qui donne la main à l’empereur, et trois enfants qui demandent grâce. Depuis ce temps, comme on ne souffrait plus de Juifs dans Jérusalem, on commença à y voir des évêques tirés de la circoncision ou des gentils convertis au christianisme.

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