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Feu
Dictionnaire encyclopédique de la Bible de Augustin Calmet
Westphal Bost

Dieu a souvent apparu dans le feu, et environné de feu, comme lorsqu’il se fit voir dans le buisson ardent, et qu’il descendit sur le mont Sinaï, au milieu des flammes, des tonnerres et des éclairs. Le feu est un symbole de la divinité. Votre Dieu est un feu brûlant, dit Moïse (Deutéronome 4.24). Il se fait voir à ses prophètes Isaïe, Ézéchiel et à saint Jean, au milieu du feu. Le Psalmiste nous décrit le chariot de Dieu tout enflammé (Psaumes 18.9-10). Dieu nous menace de venir au milieu du feu, à son second avènement. Daniel (Daniel 7.10) dit qu’il sort de sa face un fleuve de feu brûlant et rapide. La colère de Dieu est comparée au feu, et les effets de sa colère, qui sont la guerre, la famine et les autres fléaux, sont désignés sous la même idée. Le feu est souvent mis pour la foudre, le tonnerre, le feu du ciel.

Les anges mêmes, comme ministres du seigneur, sont comparés à un feu ardent (Psaumes 104.4). Le Seigneur, ou son ange représentant sa majesté, conduit les Israélites dans leur voyage du désert, sous la forme d’une colonne de feu (Exode 12.21), qui les éclaire pendant la nuit ; le feu du ciel tomba souvent sur des victimes immolées au Seigneur, pour marque de son approbation et de sa présence. On croit que c’est ainsi que Dieu témoigna approuver les sacrifices d’Abel (Genèse 4.4). Lorsque Abraham fit alliance avec le Seigneur (Genèse 15.17), un feu pareil à celui d’une fournaise passa au milieu des victimes partagées, et les consuma. Le feu tomba sur les sacrifices que Moïse immola à la dédicace du tabernacle (Lévitique 9.24), et sur celui de Manoé père de Samson (Juges 13.19-20), et sur celui de Salomon, à la dédicace du temple (2 Chroniques 7.1), et sur celui d’Élie au mont Carmel (1 Rois 18.38), et enfin sur celui de Néhémie, au retour de la captivité (2 Machabées 1.19).

On conservait dans le temple, sur l’autel des holocaustes, un feu perpétuel (Lévitique 6.12), que les prêtres avaient soin d’entretenir, en y brûlant continuellement du bois. Lorsque Nabuchodonosor prit Jérusalem, le prophète Jérémie prit ce feu sacré et perpétuel (2 Machabées 1.19, 20), et accompagné de quelques autres prêtres, le cacha dans une citerne où il n’y avait point d’eau. Au retour de la captivité, Néhémie ayant envoyé les petits-fils des prêtres qui avaient caché ce feu, pour le chercher ; au lieu de feu, ils lui apportèrent de l’eau boueuse, et l’ayant répandue sur l’autel, il en sortit incontinent un feu très-clair, qui consuma les victimes qui y étaient.

Outre ce feu sacré qui s’entretenait sur le grand autel des holocaustes, il y avait dans le temple plusieurs cuisines (Ézéchiel 46.23-24), pour y cuire la viande destinée à la nourriture des prêtres, et celles des victimes pacifiques que le peuple offrait, et qu’il mangeait dans le parvis du temple en la présence du Seigneur. Pour suffire à l’entretien de tous ces feux, on apportait au temple une grande quantité de bois, et l’on avait institué à cet effet une espèce de fête, nommée Xylophoria, dans Josèphe.

Les anciens Chaldéens adoraient le feu, aussi bien que les anciens Perses et quelques autres peuples de l’Orient. Plusieurs ont cru qu’Abraham avait été jeté dans le feu, pour n’avoir pas voulu adorer cet élément. C’est ce que saint Jérôme a voulu insinuer, lorsqu’il a dit que Dieu avait tiré ce patriarche du feu des Chaldéens, au lieu de dire qu’il l’avait fait sortir de la ville d’Ur en Chaldée. Nabuchodonosor fit jeter dans une fournaise ardente les trois compagnons de Daniel, parce qu’ils refusaient d’adorer une statue qu’il avait érigée (Daniel 3.11-13) mais Dieu sut les garantir de l’effet du feu ; la flamme ne les endommagea pas.

Le feu de l’enfer

Est désigné d’une manière assez claire dans l’Ancien Testament. Moïse invectivant contre les Israélites rebelles au Seigneur, leur dit (Deutéronome 32.22) : Un feu s’est allumé dans ma fureur, et il brûlera jusqu’au fond de l’enfer : il dévorera la terre et toutes ses plantes, et consommera jusqu’aux fondements des montagnes. Voilà le feu de l’enfer, et le lieu du supplice des méchants placé au plus profond de la terre. Isaïe est encore plus exprès (Isaïe 33.14) : Qui de vous pourra habiter dans un feu dévorant ? Qui de vous demeurera dans ces ardeurs éternelles ? Et ailleurs : (Isaïe 64.24) Les cadavres de ces hommes qui m’ont manqué de fidélité, seront livrés à un ver qui ne mourra point, et à un feu qui ne s’éteindra point. Et l’Ecclésiastique : La vengeance que Dieu exercera contre l’impie, sera le ver et le feu. Voyez aussi (Job 20.26 ; 24.19).

Le Sauveur dans l’Évangile (Matthieu 9.24) s’est servi de la même similitude pour marquer le supplice des damnés. Il parle aussi souvent du feu éternel, qui est préparé au diable, à ses anges et aux réprouvés (Matthieu 25.41). Et saint Jude (Jude 7) dit que Sodome et Gomorrhe et les villes voisines, qui se sont portées à abuser d’une chair étrangère, sont proposées comme un exemple du feu éternel, par la peine qu’elles ont soufferte. Il est inutile d’entasser d’autres passages pour le Nouveau Testament, puisque tout le monde convient que le feu éternel qui doit consumer les méchants, y est très-clairement marqué. Saint Jean dans l’Apocalypse (Apocalypse 20.14-15), vit un étang de feu, où la bête et son faux prophète avaient été jetés, et qui étaient le partage des infidèles, des abominables, des homicides ; enfin ce feu est le symbole ordinaire de la vengeance de Dieu sur les méchants.

Mais savoir si cela doit s’entendre d’un feu élémentaire et matériel, ou d’un feu métaphorique ; d’un ver ordinaire vivant et sensible, ou d’un ver allégorique et figuré ; en un mot, si le feu d’enfer ne consiste que dans une douleur vive, cuisante, et le ver dans le remords et le désespoir des damnés, c’est sur quoi les docteurs et les Pères sont partagés. Origène en plus d’un endroit a enseigné que les flammes de l’enfer, aussi bien que le ver des damnés, n’étaient point réelles. Saint Ambroise enseigne la même chose. Ce feu, ajoute-t-il, n’est autre que la douleur des péchés ; ce ver n’est autre que le remords de la conscience. Saint Jérôme reconnaît que c’est le sentiment de plusieurs, que le feu qui brûle les damnés n’est que le déchirement et les peines de leur conscience. Saint Grégoire de Nysse est exprès pour ce sentiment, et saint Jean Damascène dit nettement que ce n’est point un feu matériel ; qu’il est fort différent de notre feu ordinaire, et que les hommes ne savent guère ce que c’est. Ce sentiment est encore aujourd’hui assez commun chez les Grecs ; et au concile de Florence, ils soutinrent que le feu du purgatoire n’était point un feu vrai et réel.

Mais dans l’Église latine le sentiment le plus commun et le plus suivi, est que les damnés sont tourmentés d’un feu réel, qui les brûle très-véritablement, et qu’ils sont rongés d’un ver matériel et sensible, qui ne meurt point. Saint Augustin ne se contente pas de proposer nûment là-dessus ce qu’il pense, il prévient l’objection qui nous vient naturellement dans l’esprit sur ce sujet. Car enfin comment une âme qui est une substance spirituelle, peut-elle donner prise à un feu élémentaire ou à un ver vivant et matériel ? Saint Augustin répond : Pourquoi ne le croirions-nous pas des âmes séparées du corps, puisque l’esprit de l’homme, qui n’est certainement pas corporel, éprouve actuellement la peine du feu ? Car enfin ce n’est pas le corps qui souffre la chaleur, ni le froid, ni la douleur ; c’est l’âme qui est attachée au corps. Et pourquoi les démons et les âmes des damnés ne seraient-elles pas inséparablement attachées au feu qui les brûle, et au ver qui les ronge, de même que notre âme est unie à notre corps ; avec cette différence toutefois, que nos âmes donnent la vie à notre corps, au lieu que les feux dont nous parlons ne causent que des tourments aux démons et aux damnés ?

Saint Cyprien nous représente l’enfer comme un gouffre fumant, qui renferme un feu actif et dévorant. Saint Chrysostome nous y décrit des fleuves de flammes et des flots de feu qui enveloppent et qui brûlent les damnés sans les consumer. Saint Jérôme reconnaît que dans l’enfer il y a deux supplices très-réels, d’un froid excessif et d’un feu brûlant : et l’auteur imprimé sous son nom, sur le livre de Job, dit que le feu de la géhenne n’est pas un feu ordinaire, qui ait besoin d’aliment pour s’entretenir, mais qu’il s’entretient de lui-même. Saint Grégoire le Grand dit la même chose d’une manière très-précise. Dans le quatrième livre de ses Dialogues il inculque la même doctrine, et raisonne a peu près comme saint Augustin, sur la manière dont le feu corporel agit sur l’âme dégagée de la matière. La plupart des scolastiques ont adopté ce dernier sentiment, qui est presque universel dans l’Église latine.

Le Fils de Dieu dit qu’il a apporté le feu sur la terre, et qu’il ne désire autre chose sinon qu’il soit allumé (Luc 12.49). Il est venu baptiser par le Saint-Esprit, et par le feu (Matthieu 3.11). Pour vérifier cette prédiction il a envoyé le Saint-Esprit sur ses disciples en forme de langues on d’étincelles de feu (Actes 2.3).

Le feu doit un jour consumer le monde, selon saint Pierre (2 Pierre 3.10-12). Et encore : Les cieux et la terre d’à présent sont réservés pour être brûlés par le feu. Saint Paul (2 Thessaloniciens 1.7-8) assure que Jésus-Christ viendra au milieu des flammes exercer sa vengeance contre ceux qui ne connaissent point Dieu. Et ailleurs (1 Corinthiens 3.13) : Le jour du Seigneur fera voir quel est l’ouvrage de chacun, parce qu’il sera dévoré par le feu, et le feu mettra à l’épreuve l’ouvrage de chacun. Le Psalmiste décrivant la venue du Seigneur dans son jugement, dit (Psaumes 97.3-5) : Le feu marchera devant lui, et il embrasera autour de lui tous ses ennemis. Les foudres ont paru sur la terre, la terre les a vus, et en a été troublée. Les montagnes se sont fondues comme la cire devant le Seigneur, etc.

Les profanes ont eu quelque connaissance de cette vérité ; soit qu’ils l’aient apprise par le commerce des Hébreux, ou par la lecture des livres saints, soit que ce soit là une de ces vérités qui se sont conservées par la tradition parmi toutes les nations, soit enfin que le raisonnement et la connaissance qu’ils ont eue des éléments et de l’état de la terre, leur ait fait comprendre qu’un jour le monde devait finir par le feu. Josèphe remarque comme une ancienne tradition, que dès avant le déluge les enfants de Seth ayant appris d’Adam que le monde devait périr premièrement par l’eau, et ensuite par le feu, voulurent conserver à la postérité les découvertes qu’ils avaient faites dans l’astronomie, les gravèrent sur deux colonnes, l’une de pierre pour résister à l’eau, et l’autre de brique pour résister au feu ; qu’ils placèrent ces deux colonnes dans la Syriade, et que de son temps on voyait encore la colonne de pierre.

Je n’examine point ici la vérité de cette tradition, mais il est bien certain que longtemps avant Josèphe, les philosophes grecs croyaient que le monde finirait par le feu. Héraclite tenait ce sentiment, et disait qu’après avoir passé par les flammes, il renaîtrait du milieu du feu. Les stoïciens soutinrent dans la suite cette opinion. Cicéron l’a bien marquée dans ses livres de la Nature des dieux qu’après cet embrasement, le monde, qu’ils tenaient pour un dieu et pour un animal vivant, se renouvellerait.

Ovide parle aussi de cette ancienne tradition, qui croyait que le monde serait un Jour consumé par les flammes. Lucain en parle de même ; il dit à César qu’il est inutile de s’affliger pour n’avoir pas brûlé les corps des soldats tués à la bataille de Pharsale ; que le temps viendra qu’ils seront consumés par le feu avec le reste du monde.

On peut voir notre dissertation sur la fin du monde, dans notre commentaire sur saint Paul.

Feu éternel adoré par les Perses. Voyez ci-après Zoroastre et Zabiens. Les mages disaient que ce feu leur était venu du ciel, et que c’était pour cela qu’ils le gardaient si religieusement. Les rois de Perse ne marchaient point sans qu’on portât devant eux une portion du feu sacré. On peut voir dans Quinte-Curce avec quelles cérémonies cela se pratiquait. Tout cela paraît être inventé des Hébreux,

Qui entretenaient sur l’autel des holocaustes un feu éternel, qui était venu du ciel sur les premières victimes qui avaient été immolées par Aaron et par ses fils sur l’autel du tabernacle (Lévitique 9.24). Il n’est pas certain que la loi qui commande de conserver un feu perpétuel sur l’autel, se soit observée dans le désert, où le peuple était obligé de camper souvent et d’être longtemps en marche.

Maimonide croit qu’on entretenait trois feux sur l’autel des holocaustes ; l’un sur lequel on brûlait l’holocauste de tous les jours, et les victimes qui s’immolaient. Le second fournissait des charbons pour brûler de l’encens dans le Saint sur l’autel d’or. Le troisième brûlait toujours, pour accomplir la loi qui veut qu’il y ait toujours du feu allumé sur l’autel du Seigneur. Quelques rabbins enseignent qu’il n’était pas besoin de mettre du bois sur le feu de l’autel, que si l’on y en mettait, c’était plutôt pour cacher le miracle, que par aucune nécessité.

Feu, supplice du feu. Voyez Supplices.

Feu (Temples du).

Les Hébreux prévaricateurs élevèrent des temples destinés au culte du feu. Voyez sur ce sujet une dissertation de l’abbé Arri, intitulée Essai philologique et historique sur les temples du feu mentionnés dans la Bible, et insérée dans les Annales de philos chrét., tome 14 page 27.

Fève  
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