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[Voyez Loi, paragraphe 22]. Tous les hommes sont créés libres et égaux, et l’esclavage n’est entré dans le monde que par le péché. [Voyez mon Histoire de l’Ancien Testament, tome 1, pages 27, col. 1 et suivantes, et ci-après Gabaon]. Noé, pour punir Cham, son fils, qui avait insulté à sa nudité, donna sa malédiction à Chanaan, fils de Cham, et l’assujettit à l’esclavage (Genèse 9.25). Abraham, ayant été choisi de Dieu pour devenir le père de la race des fidèles, reçut la marque de la circoncision, comme un caractère qui le faisait connaître pour serviteur du Seigneur (Genèse 17.10). Ses descendants se sont toujours piqués de liberté (Jean 8.33) : Nemini servivimus umquam, disaient les Juifs à Jésus-Christ ; et saint Paul relève la liberté des vrais enfants d’Abraham, comme vrai-nient libres, nés de la mère libre, par opposition à la race d’Ismaël, née de la mère servante (Galates 4.31). Cela regarde la liberté et la servitude morale ; mais les rabbins soutiennent qu’ils n’ont jamais été assujettis à personne par une servitude qu’ils nomment intrinsèque et qui change l’état de la personne. S’ils ont été assujettis à l’esclavage, cela n’a pas détruit l’état de liberté dans lequel, ils sont nés.
Cela n’empêche pas que les Hébreux n’aient souvent été assujettis à divers princes, par exemple aux Égyptiens, aux Philistins, aux Chaldéens, aux Grecs et aux Romains. [Voyez Liberté]. Plusieurs, pressés par la nécessité, étaient obligés de vendre leur liberté ; et d’autres étant pris à la guerre, demeuraient esclaves de leurs vainqueurs. Moïse lui-même marque deux ou trois sortes d’esclaves parmi les Hébreux : ils avaient des esclaves orangers, acquis par la voie de la guerre ou par leur argent, ou nés dans leurs maisons.
Les maîtres avaient sur eux une autorité entière et souveraine ils pouvaient les vendre, les échanger, les punir, les juger, les faire mourir même sans forme de procès (Exode 21.20-21). Si un maître frappe son esclave ou sa servante avec une verge, et qu’ils meurent entre ses mains, il sera coupable de crime ; mais s’ils survivent un ou deux jours, il ne sera pas puni comme homicide, parce que son esclave est le prix de son argent.
Cela doit s’entendre, disent les rabbins (les esclaves hébreux, mais non pas des esclaves étrangers, qu’un maître pouvait avoir et envers lesquels il exerçait impunément telle rigueur qu’il jugeait à propos ; car à cet égard la loi de Moïse n’avait rien ordonné. Ils suivaient les règles communes des-autres nations, chez qui tous les maîtres avaient tout pouvoir sur leurs esclaves. Les personnes sages néanmoins ont toujours fort désapprouvé la liberté que certains maîtres se donnaient de faire ainsi mourir leurs esclaves. Caton le Censeur ne faisait jamais mourir aucun de ses esclaves, qu’il n’eût été condamné et trouvé digne de mort par ses autres esclaves. Job témoigne qu’il n’a jamais refusé d’entrer en jugement avec ses esclaves (Job 31.13-15), lorsqu’ils ont eu quelque difficulté avec lui. Les Athéniens punissaient de mort ceux qui avaient tué un esclave, comme celui qui avait tué un homme libre.
Le texte samaritain de cet endroit est tout différent de l’hébreu ; il lit : Celui qui aura frappé son serviteur ou sa servante avec une verge, s’ils meurent entre ses mains, il ne sera pas recherché, il ne mourra point ; et s’il survit deux ou trois jours, il ne sera pas puni, parce que c’est le prix de son argent ; comme si tout ceci ne regardait qu’un esclave, chananéen ou gentil, que les lois civiles permettaient de mettre à mort impunément.
Le Paraphraste chaldéen, quelques rabbins et quelques commentateurs croient de même que ceci ne regarde pas les esclaves hébreux ; car, disent-ils, on ne peut pas dire que l’esclave israélite soit le prix de l’argent de son maître. Il n’était en servitude que pour peu d’années, et le dommage que son maître se faisait en le mettant à mort, et se privant ainsi du service qu’il en pouvait espérer, ne l’aurait pas assez puni ; au lieu que la perte d’un esclave étranger portait un préjudice considérable à un maître intéressé ; et il était en quelque sorte bien puni de sa cruauté, par la mort d’un homme qui était à lui pour toujours, et qui pouvait lui laisser des enfants de même condition que lui.
Voici les règles que Moïse prescrit pour les esclaves hébreux (Lévitique 25.39-40) : Si la pauvreté réduit votre frère à se vendre à vous, vous ne l’opprimerez point en le traitant comme un esclave, mais vous le traiterez comme un ouvrier à gage. Il travaillera chez vous jusqu’en l’année du jubilé, et alors il sortira avec sa femme et ses enfants, et il retournera à la famille et à l’héritage de ses pères ; car ils sont mes esclaves, dit le Seigneur, c’est moi qui les ai tirés de l’Égypte ; ils ne seront point vendus à des étrangers comme les autres esclaves. Ayez des esclaves des nations qui sont autour de vous… Voilà ceux que vous prendrez pour esclaves. Ce n’était donc pas l’intention du Seigneur, que les Israélites fussent réduits en servitude perpétuelle par leurs frères, ni qu’ils fussent vendus à des étrangers, pour demeurer esclaves toute leur vie : que si un Hébreu s’était vendu à un étranger derneurantdans le pays, cet Hébreu pouvait se racheter par son épargne, s’il en avait le moyen ; sinon un de ses plus proches parents le pourra racheter, en rendant au maître la somme qu’il en a donnée, déduction faite des services qu’il lui a rendus, et en comptant ce qui lui reste de temps à servir jusqu’au Jubilé ; car alors il avait droit de sortir de servitude sans rançon.
Dans un autre endroit (Exode 21.1-2) Moïse fait ces ordonnances au sujet des esclaves hébreux : Lorsque vous achèterez un esclave hébreu, il vous servira pendant six ans, et la septième année il sera mis en liberté, sans vous rien donner. Les rabbins veulent que l’esclave ait été obligé de servir pendant les sept années pleines ; mais la plupart des commentateurs croient qu’il sortait libre en l’année sabbatique, quand même il n’aurait encore servi que deux ou trois ans. Moïse ajoute : Il aura en sortant le même habit qu’il avait en entrant, et sa femme sortira avec lui. L’Hébreu porte : S’il vient avec son corps, il sortira avec son corps ; s’il vient marié, sa femme sortira avec lui. Les rabbins disent que le maître était obligé de nourrir la femme et les enfants de l’esclave, quoiqu’il n’y eût que la mari qui fût esclave.
Mais si le maître lui a donné une femme dont il ait eu des enfants, la femme et les enfants demeureront au maître, mais l’esclave sortira avec ses habits ou avec son corps. On peut donner plusieurs sens à cette loi. Un maître pouvait faire épouser à un esclave hébreu une femme esclave d’une autre nation, et comme cette femme n’était pas israélite, elle ne pouvait pas jouir du privilège de l’année sabbatique ; mais son mari hébreu la quittait et rentrait en liberté dans cette année. On demande si le mariage était dissous par cette séparation ? Les sentiments des interprètes sont partagés sur cette question. Ce qui nous paraît le plus certain, c’est que, comme il n’y avait point proprement de mariage entre les esclaves qui s’étaient ainsi pris sans choix et sans liberté, aussi il n’y avait point de dissolution de mariage dans leur séparation. On peut voir les commentateurs sur cet endroit (Exode 21.5-6). Que si un esclave dit : J’aime mon maître, ma femme et mes enfants, je ne veux point sortir pour jouir de la liberté, son maître l’amènera devant les dieux (devant les juges), et ensuite le faisant approcher de la porte du logis de son maître (Deutéronome 15.17), il lui percera l’oreille avec une alène, et il demeurera en servitude pour toujours ; c’est-à-dire, selon les commentateurs, jusqu’à l’année du jubilé : car alors tous les esclaves sans exception rentraient en liberté. Les rabbins ajoutent qu’ils étaient aussi affranchis à la mort de leurs maîtres, et qu’ils ne passaient point à ses héritiers. Si quelqu’un vend sa fille pour être servante (Exode 21.7) ou esclave, elle ne sortira pas de servitude, comme les autres servantes ont accoutumé de sortir ; c’est-à-dire, les lois que l’on vient de voir ne la regardent point. Il y a une autre jurisprudence pour les filles, que pour les hommes ou les garçons hébreux. Un père ne pouvait vendre sa fille pour esclave qu’elle ne fût en âge de puberté, disent les rabbins, et qu’il ne tût lui-même réduit à la dernière indigence. De plus, quand un maître achetait une fille israélite, c’était toujours dans la présomption qu’il la prendrait pour femme, ou qu’il la ferait épouser à son fils d’où vient que Moïse ajoute : Que si elle ne plaît pas à son maître, et qu’il ne veuille pas l’épouser, il la mettra en liberté ; ou, selon l’hébreu, il la fera racheter, et il ne lui sera pas permis de la vendre à un peuple étranger, en lui faisant injustice, et en contrevenant à sa parole ; à la promesse, au moins implicite, qu’il lui avait faite de la prendre pour femme.
Que s’il la fait épouser à son fils (Exode 21.9-10), il la traitera comme on traite les filles libres : il aura soin que son fils la traite comme son épouse ; qu’il ne la méprise point et ne la maltraite point ; et s’il en fait épouser une autre à son fils, il lui donnera sa dot, ses vêtements et ce qui lui est dû pour sa virginité : ou, selon l’Hébreu, s’il en fait épouser une autre à son fils, il ne diminuera point les vétements, la nourriture et la demeure de la première ; c’est-à-dire, selon plusieurs commentateurs, si le maître qui a acheté cette fille, et qui l’a fait épouser à son fils, fait épouser une seconde femme à son fils, il aura soin que son fils traite cette première femme comme son épouse ; qu’il lui donne la nourriture, le vêtement, et qu’il lui rende les devoirs du mariage comme à sa véritable épouse ; sinon, il sera libre à cette femme de sortir de chez lui sans rien payer.
Autrement, si le père de famille qui a acheté la fille israélite ne l’épouse pas, et ne la fait pas épouser à son fils, ou s’il veut la renvoyer après l’avoir gardée quelque temps, il sera obligé de la marier à un autre, ou de la vendre à un autre maitre hébreu, aux mêmes conditions qu’il l’avait prise lui-même, en lui donnant la dot, les habits et le prix de sa virginité, conformétnent à l’usage, ou selon qu’il sera réglé par les juges.
Un Hébreu pouvait tomber dans l’esclavage de plusieurs manières.
1° Dans une extrême pauvreté ils pouvaient vendre leur liberté (Lévitique 25.29).
2° Un père pouvait vendre ses enfants pour esclaves (Lévitique 21.7).
3° Les débiteurs insolvables étaient livrés pour esclaves à leurs créanciers (2 Rois 4.1).
4° Les voleurs qui ne pouvaient restituer leur vol, ou la valeur, étaient vendus au profit de celui à qui ils avaient fait le vol (Exode 22.3).
5° Ils pouvaient être pris en guerre ou par les voleurs.
6° Ils pouvaient être volés, par le crime qu’on nomme plagium, et ensuite vendus pour esclaves, comme Joseph fut vendu par ses frères.
7° Enfin, un esclave hébreu racheté d’un gentil par un de ses frères, pouvait être vendu par celui-ci à un autre Israélite.
L’Écriture exprime par le mot d’esclavage, l’assujettissement d’un peuple à un autre ; par exemple (Genèse 27.37), Isaac dit à Ésaü : J’ai établi Jacob votre maître, et j’ai assujetti tous ses frères à sa servitude. Et ailleurs les Égyptiens disent à Joseph (Genèse 47.19) : Achetez-nous pour demeurer en servitude perpétuelle envers le roi. Et Samuel annonçant aux Hébreux les droits du roi (1 Samuel 8.16-17) : Il prendra vos esclaves et vos servantes, et vous lui serez assujettis comme esclaves. Et David dit à Goliath (1 Samuel 17.8-9) : S’il peut combattre contre moi, et qu’il me tue, nous serons vos esclaves ; et si au contraire j’emporte la victoire, et que je le fasse mourir, vous serez nos esclaves, et vous nous demeurerez assujettis [Dom Calmet confond sous le mot d’esclaves tous ceux qui sont au service d’autrui pour diverses raisons, et les captifs ou prisonniers de guerre. La question est de savoir si la législation mosaïque consacrait l’esclavage, dans le sens où l’on prend ordinairement ce mot. Je ne le crois pas. Dieu délivrant Israël, ce peuple qu’il appelle son Fils aîné, de la Maison de servitude, lui aurait-il fait retrouver la servitude dans la terre de la liberté ? On l’a dit, on le répète, on donne des raisons, on cite des textes, on produit des faits. Je n’accepte aucune de ces raisons ; quant aux textes, je pense qu’on interprète les uns à tort dans ce sens, et que les autres ne regardent point les Hébreux ; et quant aux faits, ils ne s’appliquent point à la question].