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Ville de Mésopotamie, bâtie environ trois cents ans avant Jésus-Christ par le grand Séleucus, roi de Syrie, dans cette partie de la Mésopotamie que l’on appelait Osrhoëne [Edesse, que les talmudistes font aussi ancienne que Ninive et dont ils attribuent la fondation à Nemrod, a été appelée Antioche, en l’honneur d’Antiochus ; pour la distinguer de la capitale de la Syrie, on fui avait donne le surnom de la fontaine de Callirhoé. Nos chroniqueurs l’appellent Rhoa : c’est la corruption du mot grec rhoé qui signifie fontaine. Edesse se nomme aujourd’hui Orfa. La commune opinion des érudits lui donne pour fondateur Séleucus le Grand, environ trois cents ans avant Jésus-Christ. Orfa est située dans une grande vallée, entre deux collines rocheuses et pelées, tout à fait détachées de la chaîne du Taurus. La ville a quatre milles de circuit ; des murs flanqués de tours rondes ou carrées l’environnent. Des fossés profonds ajoutaient à la défense de la place (lorsque les Croisés s’y présentèrent). Une citadelle s’élevait sur la pointe méridionale de la colline qui domine Orfa du côté de l’ouest. Le voyageur retrouve encore les murailles, les tours et les fossés. Le château est en ruines, et dans son enceinte apparaissent des masures et une mosquée abandonnée. Cette citadelle était jadis comme une seconde ville, avec les bazars, des églises et des palais (Michaud, Histoire des Croisades, tome 1 pages 196.)]
Elle est devenue célèbre dans l’Église par la Lettre que Jésus-Christ écrivit au roi Abgare (Eusèbe), ou Agabare, ou Abagare, qui régnait a Edesse. On peut voir l’article d’Abgare, ou Abagare. Le comte Darius, dans saint Augustin, dit que Jésus-Christ avait promis à Abgare, que la ville d’Edesse serait imprenable ; et Evagre remarque que, quoique cela ne fût pas dans la Lettre du Sauveur, c’était néanmoins la croyance commune des fidèles, laquelle se fortifia beaucoup, lorsque Cosrhoës, roi de Perse, y ayant mis le siège, fut obligé de le lever. Saint Thadée, un des Septante disciples, et différent de l’apôtre de même nom, fut envoyé par saint Thomas pour instruire les peuples d’Edesse, les convertit au Christianisme, avec leur roi Abgare, qui avait commencé à croire en Jésus-Christ sur la seule réputation de sa doctrine et de ses miracles [Edesse a était la capitale de l’Arménie au temps de Jésus-Christ. Thaddée jeta dans cette ville les premières semences du Christianisme. L’apôtre Barthélemy, que les peuples de l’Inde, de l’Arabie et de la Perse, vénèrent comme leur illustre missionnaire, porta aussi ses pas à Edesse, et, de là il traversa avec Thaddée, l’Arménie, la Cappadoce et l’Albanie. Les germes précieux de la foi furent donc déposés en Arménie dès le commencement de la mission des apôtres ; mais ils ne prirent leur accroissement et ne fructifièrent que lorsque saint Grégoire vint les féconder de ses sueurs et de son sang] [Chronologie des rois d’Edesse, tirée de l’Art de vérifier les dates avant Jésus-Christ. Edesse, ville autrefois fameuse par un temple consacré à la déesse syrienne, passait pour une des plus riches villes de la terre, et surnommée, à cause de ce temple, Hiéropolis, ou ville sainte ; était située dans la Mésopotamie, sur les bords du Scirtus, entre le mont Massius et l’Euphrate. Jusqu’aux troubles domestiques qui agitèrent et affaiblirent la Syrie, cette ville n’avait été que la principale d’une province qui appartenait aux Séleucides ; mais durant ces troubles, un particulier se rendit maître d’Edesse et de son territoire fertile, et en forma un royaume qui passa à sa postérité.
a. Augare, ou Abgare, est le nom de ce particulier qui se fit appeler roi d’Edesse. Nous ne savons point précisément sous quel roi de Syrie arriva cette révolution. L’histoire nous apprend seulement que le fondateur de ce nouveau royaume défit souvent les Syriens, et laissa, à sa mort, sa petite principauté dans un état florissant.
b. Ariamme, ou Abgarell, était fils d’Augare, et prit comme son père le nom d’Abgare, qui fut commun à tous les fois d’Edesse. Ce prince se rendit maître de toute la Province d’Osroêne, et ayant fait alliance avec Pompée contre Tigrane le Grand, roi d’Arménie, il fournit à son armée tous les vivres dont elle avait besoin (an 64 avant Jésus-Christ). Dans la guerre des Romains contre les Parthes, il feignit d’être pour Crassus, mais entretint avec l’ennemi une correspondance secrète, qui fut la principale cause de la défaite des Romains à Carres (An 53).
c. Nebanias succéda à son père Abgare II et eut pour fils et successeur Abgare III qui suit.
D. Abgare III est célèbre dans l’histoire ecclésiastique, par la prétendue lettre qu’il écrivit à notre Sauveur et par la réponse qu’il en reçut. Casaubon, Gretser, Tillemont, Du Pin et le P. Alexandre, ont discuté l’authenticité de ces lettres.
E. Depuis Jésus-Christ Abgare IV fils du précédent, vivait du temps de l’empereur Claude et donna des troupes à C. Cassius, qui avait ordre de placer Méherdate sur le trône de Parthie (an 50 dep. Jésus-Christ). Quand Méherdate arriva à Edesse, Abgare, gagné par les Parthes, l’y retint jusqu’à ce que les ennemis eussent rassemblé leurs forces, et dans la chaleur du combat ayant abandonné les Romains, il fut cause de la défaite de leur armée.
F. Abgare V contemporain de l’empereur Trajan, lui envoya, durant la guerre qu’il eut à soutenir contre les Parthes (an 115 dep. Jésus-Christ), deux cent cinquante chevaux de prix, grande quantité d’armes de toute espèce, et soixante mille javelines. L’empereur n’accepta que trois cuirasses, et déclara le roi d’Edesse ami et allié du peuple romain.
g. Arbande, fils d’Abgare V et son successeur, fut extrêmement considéré par Trajan.
h. Abgare VI successeur d’Arbande son père, est représenté par, Épiphane comme un prince vertueux.
i. An 197 dep. Jésus-Christ Abgare VII régnait à Edesse du temps de l’empereur Sévère, qu’il secourut dans les guerres d’Orient. Il l’accompagna ensuite à Rome, où il fut reçu et entretenu avec la dernière magnificence. Quelques années après, il fut soupçonné, par Caracalla d’entretenir des correspondances avec les ennemis des Romains. Le roi d’Edesse vint à Rome pour se justifier (an 212). L’empereur n’ayant pas trouvé ses raisons valables, s’assura de sa personne, et réduisit son royaume en province romaine.
Edesse, ainsi nommée par les Grecs, est l’ancienne Ur des Chaldéens, patrie d’Abraham, et la moderne Orfa. Voyez Ur. Je vais Citer des voyageurs qui l’ont vue et en ont parlé. Le célèbre J.S. Buckingham, après avoir passé l’Euphrate à Bir, atteignit Orfa, qui en est éloignée de douze myriamètres, environ. Cette ville est pleine de souvenirs de tous les âges. Là, dit la tradition, fut le berceau d’Abraham ; là, dans les jours qui précédèrent ceux du patriarche, le culte des poissons était en honneur. Était-ce Vénus sous la forme d’un habitant des eaux qui recevait ses adorations ? Etaient-elles adressées aux carpes du lac qui avoisine Orfa, à raison de la source sacrée qui alimente ce petit lac ? c’est ce qu’il n’est pas facile d’expliquer, même à l’aide de tous les documents et de tous les passages réunis par le voyageur anglais. Pline nous apprend qu’Orfa porta aussi le nom de Callirhoé, nom qu’elle tirait de celui de la source dont nous venons de parler.
Orfa est bâtie au pied d’une hauteur, dit Aucher-Eloi. Toute cette montagne calcaire est creusée par la main de l’homme pour y faire des habitations ou peut-être des tombeaux. Il y a de tous côtés de belles citernes, et la route elle-même a été taillée dans le rocher. Orfa était l’Edessa des Grecs, l’Ur des Chaldéens, d’où Abraham vint demeurer dans l’Haran ; Nemrod passe pour en avoir été le fondateur. Avant la conquête qu’en firent les Romains, c’était la capitale de l’Osroëne. Depuis la conquête d’Alexandre ; la population fut mélangée avec des Arméniens, des Syriens, des Arabes… Orfa est située à l’entrée des gorges de la montagne, et peut être regardée comme la clef de la Syrie et de la Mésopotamie ; elle est ceinte de murailles en mauvais état, et pourvue d’une citadelle qui ne vaut guère mieux. Quoi qu’il en soit, c’est une place importante… La plaine d’Orfa est très-fertile et assez bien cultivée dans les parties basses… Orfa, compris les militaires, peut avoir 20 ou 25 mille habitants, dont 2000 chrétiens, 500 juifs, le reste musulmans.
M. Poujoulat, qui visitait Orfa vers la même époque, dit que « la population de cette ville s’élève à plus de cent mille habitants, environ quarante mille Arméniens et le reste musulmans. » Suivant M. Michaud, « Orfa renferme une population de quinze mille habitants, tous musulmans, excepté un millier d’Arméniens et une centaine de jacobites. Au milieu de la cité est une ancienne église avec un clocher, contemporaine des croisades et qui depuis longtemps est convertie en mosquée. Les musulmans ont quinze sanctuaires, les chrétiens en ont deux. »
Le nom arabe d’Edesse est Ourrha ou Rouha, suivant M. Eug. Boré. Ce nom Rouha me parait être le même que le Rhoé ou Rhoa du Callirhoé des Grecs. Ourrha rappelle Ur, qui se retrouve dans Orfa. M. Boré admet avec M. Buckingham qu’Edesse fut bâtie sur les ruines d’Ur, cite la Genèse (Genèse 11.28), et renvoie là-dessus à Bochart.
La Mésopotamie, que les Hébreux appellent Aram-Naharaïm, et où est Edesse, fait encore, à proprement parler, partie de la Syrie, et lui fut longtemps réunie politiquement, dit ailleurs M. Boré. Ce savant dit encore : « Le Christianisme, malgré les schismes et les hérésies, s’est conservé dans la Syrie, qui fut son berceau. En effet, suivant la tradition, l’Évangile, apporté aux rois d’Edesse par les apôtres, soumit à ses lois un nombre considérable de disciples ; et la Syrie se trouva avoir donné naissance à la première Église publiquement constituée. La foi nouvelle… produisit… l’école d’Edesse, que l’on peut appeler le séminaire de la Perse chrétienne. »
Sous les Sarrasins, Edesse avait pour gouverneur un prince grec qui leur payait tribut ; échappée à l’invasion des Turcs, elle fut le refuge de tous les chrétiens du voisinage. Elle se rendit à Baudoin, frère de Godefroy de Bouillon, en 1097, et devint une principauté franque, qui, s’étendant sur les deux rives de l’Euphrate et sur le revers du mont Taurus, comptait plusieurs villes florissantes. Vers 1144, Edesse fut prise par les musulmans conduits par Zenghi, qui fut assassiné par ses esclaves peu de temps après. Bientôt la ville fut reprise par les chrétiens, et bientôt elle retomba au pouvoir des musulmans, à qui elle demeura. Voyez Michaud, Histoire des Croisades, tome 1, 197 et suivants, et tome 2.78-109 et suivants, et 202.
Les chroniques, dit M. Poujoulat, nous parlent d’une cité de Samosate qui dépendait de Roha, et que le prince musulman Balduk occupait injustement ; Baudoin avait cherché à s’en rendre maître, mais désespérant de s’emparer de la forteresse, il était parvenu à la racheter avec de l’or et des présents. Je trouve ce château de Samosate sur la rive gauche de l’Euphrate, au nord-est d’Orfa, à l’extrémité d’un angle formé par le fleuve ; il se nomme aujourd’hui Semisat ; le château est ruiné ; à côté du château se voit une petite cité. Les chroniques parlent d’une autre ville nommée Sororgia, qui fut prise par Baudoin ; cette ville, située à quelques heures au sud d’Edesse, existe encore sous le nom de Seroug].