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Il est souvent parlé de clef dans l’Écriture, tant dans le sens littéral et naturel, que dans le sens figuré et moral. Les clefs des anciens, en général, étaient fort différentes des nôtres, parce que leurs portes et leurs coffres ne se fermaient ordinairement qu’avec des liens, et que la clef ne servait qu’a délier ces liens et à les lier d’une manière artificieuse. Les clefs, encore aujourd’hui dans l’Orient, sont assez peu semblables aux nôtres. Chardin dit que la serrure des Orientaux est comme une petite herse, qui entre à demi dans une gâche de bois ; et la clef est un manche de bois au bout duquel sont des pointes, qu’on pousse par dessus dans la gâche, et qui lèvent cette petite herse. Voyez aussi Dandini, Voyage du mont Liban, chapitre 14 et notre Dissertation sur les demeures des anciens Hébreux, à la tête du Commentaire sur le livre des Juges.
Clef, dans le sens moral, a plusieurs significations ; par exemple (Isaïe 22.22) : Je donnerai à mon serviteur Eliacim la clef de la maison de David ; il la portera sur son épaule, il ouvrira, et nul ne fermera ; il fermera, et nul n’ouvrira. Il sera grand-maître et premier officier de la maison de son prince ; il ouvrira et fermera avec une entière autorité, sans qu’aucun puisse ni ouvrir ce qu’il aura fermé, ni fermer ce qu’il aura ouvert. C’est ainsi que Jésus-Christ donne à saint Pierre (Matthieu 16.19) la première autorité dans son Église ; il lui donne la clef du royaume des cieux, le pouvoir de lier et de délier, c’est-à-dire d’ouvrir et de fermer ; car souvent cela ne consistait qu’à lier et à délier, comme nous l’avons dit. Isaïe remarque qu’Elïacim portera sa clef sur son épaule, comme une marque de distinction. Ces clefs étaient de bois, et assez longues et grosses, comme elles sont encore à présent dans l’Orient. Callimaque dit que Cérès porte une clef sur son épaule.
Jésus-Christ (Luc 11.52) reproche aux scribes et aux pharisiens d’avoir pris la clef de la science, de n’entrer pas dans le royaume de Dieu et d’empêcher les autres d’y entrer ; c’est-à-dire de lire et d’étudier les Écritures, sans en profiter pour eux-mêmes et sans découvrir aux autres la vérité, qu’ils tenaient en quelque sorte captive dans l’injustice (Romains 1.18).
Enfin dans l’Apocalypse (Apocalypse 1.18) Jésus-Christ dit qu’il a la clef de la mort et de l’enfer, c’est-à-dire, qu’il est maître de conduire au tombeau ou d’en tirer qui il lui plaît, de donner la vie ou la mort. Et ailleurs (Apocalypse 3.7), saint Jean lui applique ce que Isaïe a dit d’Eliacim, qu’il a la clef de la maison de David, qu’il ferme, et que nul ne peut ouvrir ; qu’il ouvre, et que, nul ne peut fermer : ce qui est très-certain, et à la rigueur, en parlant de Jésus-Christ, qui est le maître de la vie et de la mort, de la perte ou du salut éternel. Les rabbins disent que Dieu s’est réservé quatre sortes de clefs, qu’il n’a confiées à personne, pas même aux anges : la clef de la pluie, la clef du tombeau, la clef de la fécondité et la clef de la stérilité.