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Un des buts que se proposa le législateur des Hébreux était de poser des bornes à l’inégalité, car il craignait qu’il se formât en Israël des castes semblables à celles de l’Égypte. C’est pourquoi il détermina la manière d’acquérir, et les conditions des acquisitions pour les propriétés foncières. Nous copions ici M. Salvador : « Que voulait Moïse, dit-il ? des limites à l’inégalité ; que craignait-il ? la formation des castes semblables à celles de l’Égypte, qui commenceraient à acquérir d’une manière légale les propriétés des plus petits citoyens qui s’en empareraient ensuite, soit par force, soit par adresse, et se rendraient les maîtres de tout le pays. On prévoit dès lors ce qu’il fit ; il permit la circulation des terres, mais en la soumettant à des règles par lesquelles les agglomérations deviendraient impossibles ; et il reconnut que si le citoyen était libre de disposer durant toute sa vie, et même pour quelque temps après, du patrimoine que ses aïeux avaient reçu de la nation, il ne pouvait pas s’en défaire d’une manière absolue et empiéter sur les droits de ses descendants.
Lorsqu’un homme voulait aliéner sa propriété, le plus proche parent jouissait de la faculté de s’en charger préférablement à toute autre personne, aux mêmes conditions. Refusait-il ? on vendait à autrui, en se réservant le droit de rachat pendant une ou plusieurs années, ou bien en y renonçant pour tout le temps que l’effet de l’aliénation pouvait légalement durer (Lévitique 25.26-28) Dans tous les, cas, le contrat se passait en public et devant les magistrats. Le plus proche parent renonçait hautement à son droit, et l’acquéreur prenait à témoin les anciens et le peuple (Voyez Ruth 4.9-11).
Plus tard, on écrivit l’acte en double ; les témoins apposaient publiquement leur seing ; l’une des copies était roulée et cachetée, l’autre restait ouverte. Ainsi en usa Jérémie lorsqu’il acquit le champ de son cousin-germain, qui l’avait prié d’user du droit de proche parent. Voyez (Jérémie 32.9-14).
Mais, excepté pour les maisons sises dans les villes closes, toute vente était dissoute de droit en l’année jubilaire, ainsi nommée soit du mot iobel, qui indique la corne de bélier dont on se servait en façon de trompette, pour en faire la publication, soit du mot iabal, qui veut dire, il a apporté ; parce qu’elle apportait à chaque citoyen la joie de rentrer dans son héritage, et à chaque serviteur sa liberté. Dès que la cinquantième année sera arrivée, dit la loi, on publiera que tout homme reprenne sa possession et retourne dans sa famille… En conséquence, lorsque-vous ferez quelque vente ou quelque achat de biens-fonds, vous fixerez le prix en raison du nombre d’années qui se sont écoulées depuis la dernière année jubilaire (Lévitique 25.10-14). À des époques périodiques, l’équilibre sera donc rétabli parmi les citoyens : cet équilibre auquel le prophète Isaïe ajoutait une si grande importance, que, voyant éluder la loi, il s’écriait : Malheur à vous qui joignez maison à maison, et qui approchez un champ de l’autre, de manière à absorber tout le terrain et à vous rendre seuls possesseurs du pays ! Jéhovah dit : Vos maisons vastes seront désolées, vos palais resteront sans habitants (Isaïe 5.8-9).
Aux yeux du législateur, cette disposition jubilaire avait l’avantage de prévenir quelques-unes des conséquences du fait… d’après lequel les enfants ont toujours à souffrir, des désordres de leurs pères : une partie de la propriété leur revenait inévitablement. Les pauvres, loin d’avoir de la propension à troubler l’État, soutiendront une loi pleine de sollicitude pour eux, et qui doit les ramener au bout d’un certain nombre d’années au niveau de leurs frères. L’économie agricole sera forcée de se livrer à d’utiles calculs, pour établir dans les contrats des proportions variées, selon le nombre d’années qui restent à s’écouler jusqu’au jubilé. Enfin, soit qu’on garde sa propriété, soit qu’on la transmette à un autre, il n’y aura jamais, dans le pays d’Israël, des propriétaires oisifs, ni des terrains incultes, ni la misère héréditaire auprès de l’opulence, ni un vain luxe des domaines, ni le faux éclat de Babylone ; le plus riche et le plus pauvre, l’homme en réputation et l’homme obscur, le citadin et l’habitant des campagnes auront également à cœur de fertiliser leurs champs ; de ne pas laisser dépérir l’héritage de leurs pères. »