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1°. Fils de Siméon et d’une Cananéenne (Nombres 26.13< ; 1 Chroniques 4.24 ; Genèse 46.10 ; Exode 6.15). La mention spéciale qui est faite de sa mère est un blâme contre ces unions mixtes avec des femmes païennes.
2°. Premier roi des Hébreux, était fils de Kis, de la tribu de Benjamin, et régna quarante ans (1 Samuel 9ss ; 1 Chroniques 8.33 ; 9.39). Distingué par sa beauté et par la grandeur de sa taille, il avait ce qu’il fallait pour plaire au peuple sur lequel il devait régner ; il fut choisi par Samuel, oint d’huile, puis solennellement présenté aux Israélites à Mitspa, après que le sort, dirigé de Dieu, eut ratifié le choix que le dernier des juges avait fait du premier des rois ; Saül dut octroyer préalablement une espèce de charte constitutionnelle à son peuple, qui le salua par des acclamations de joie que le mécontentement de quelques-uns ne réussit pas à troubler ; Saül fit le sourd aux murmures des mécontents, et resta d’abord modestement dans la vie privée, pour laisser aux animosités le temps de se calmer, et pour ne pas alimenter par sa présence et l’exercice de ses droits, l’aigreur qu’avait produite chez quelques-uns sa subite élévation.
Sa première expédition fut dirigée contre les Ammonites ; elle réussit, et ce succès ramena les mécontents (1 Samuel 11). Dès lors Saül dut mettre tous ses soins à protéger le pays contre les attaques incessantes des Philistins (13.1) ; mais le peu d’esprit militaire des Israélites, et le manque d’armes (13.6-19), auraient suffi à paralyser ses efforts, si Jonathan son fils, par un acte héroïque, n’eût mis en fuite l’armée des Philistins qui ne tarda pas à être complètement défaite (1 Samuel 14). Les Philistins revinrent cependant à la charge, ainsi que d’autres peuples du voisinage, les Moabites, les Édomites, les Syriens de Tsoba, etc. Saül triomphait parce que Dieu était avec lui, mais il perdit ce secours par sa faute dans une guerre d’extermination dirigée contre les Amalékites, il désobéit aux expresses injonctions de Samuel, il épargna le roi et les bêtes grasses (15), et le prophète irrité prononça sa déchéance, et nomma pour lui succéder un jeune homme de la tribu de Juda, David, qui fut placé à la cour, jouit, de la faveur particulière du roi pendant quelque temps, mais finit par être l’objet de sa jalousie et de sa haine.
Les exploits du jeune guerrier, que Saül exposait aux plus grands dangers, et qui se tirait avec honneur des plus mauvais pas, méritèrent à David la faveur populaire, et cette faveur causa sa disgrâce (16). Accablé d’une noire mélancolie, Saül essayait de se distraire en écoutant de la musique, ou en poursuivant ce David qu’il croyait son ennemi (17-20), mais rien ne pouvait rendre la paix à son cœur ulcéré ; deux fois ses jours furent épargnés par David, et il s’attendrit un moment à la vue de tant de générosité, mais ses remords sans repentance ne suffirent pas à retenir ses poursuites, et Saül fut malheureux jusqu’à la fin sous le poids de la colère divine. Il finit par perdre les traces du prétendant réfugié à Gath (27), et les Philistins s’étant de nouveau levés contre Israël, Saül marcha à leur rencontre, consulta une devineresse la veille de la bataille, reçut d’elle un déplorable oracle que le lendemain devait voir s’accomplir ; la bataille fut perdue, ses fils furent tués, et lui-même fatigué de la vie se jeta sur son épée, et termina par le suicide une vie commencée sous de meilleurs auspices, un règne que l’obéissance à Dieu eût rendu à la fois glorieux et tranquille (28-31).
C’est une étrange histoire que celle de Saül ; l’homme et le roi sont étranges, et l’on ne saurait dire lequel l’est le plus. Le début de la royauté devait la compromettre dans l’esprit du peuple dont elle fit le malheur ; Dieu donnait à Israël un roi dans sa colère. Et cependant Samuel avait pris toutes les précautions destinées à prévenir ou à diminuer les maux qu’Israël amassait sur sa tête ; non seulement il avait cherché à détourner le peuple du caprice qui le portait à demander un roi, mais une fois la chose décidée, il avait posé des limites à la puissance et aux prétentions du monarque ; il l’avait choisi membre d’une tribu qui, par sa petitesse, n’avait pas de rivales ; il l’avait choisi beau de visage et de haute stature, afin que, sans éveiller les jalousies, il sût captiver l’attention et les regards bienveillants de ses futurs sujets ; il l’avait choisi vaillant et courageux afin que, bon capitaine, il offrît au peuple la seule qualité dont le besoin se fît sentir, la garantie nécessaire au maintien de l’intégrité du territoire ; il l’avait choisi après que Saül, ayant prophétisé, eut donné à tout Israël le spectacle d’un jeune homme qui se laisse diriger par les conseils de la sagesse divine ; il lui avait imposé enfin une constitution qui devait mettre le peuple à l’abri des empiétements du pouvoir royal.
Tout cela ne servit de rien ; Saül ayant atteint à une hauteur qu’il ne rêvait peut-être pas lorsqu’il cherchait les ânesses de son père, fut saisi de ce vertige qui tourne les têtes trop faibles à une certaine élévation ; il oublia qu’il était le serviteur de Dieu, pour se rappeler seulement qu’il était le roi du pays, et sans s’en rendre compte, mais entraîné par le manque de foi, il secoua le joug de l’Éternel et voulut régner par lui-même. Au sacrifice de Guilgal, sa déchéance fut annoncée, elle fut arrêtée et décidée après que, par ses ménagements envers Agag, il eut prouvé que la parole de l’Éternel ne lui était pas sacrée. Ce ne sont pas les détails, ce n’est pas même l’ensemble des faits que le prophète lui reproche ; c’est le manque de foi, le manque de respect pour un ordre divin, le manque de confiance en celui qui peut d’un mot remplacer les troupes qui désertent, la désobéissance à celui qui aime mieux obéissance que sacrifice.
La dynastie de Saül est déshéritée du trône parce que Saül a oublié qu’il n’était pour ainsi dire roi qu’en second. Et si l’on regrette que l’aimable et généreux Jonathan porte la peine des fautes de son père, il faut se rappeler que cette solidarité du péché était générale à cette époque et dans ces pays, qu’elle a été longtemps sanctionnée de Dieu d’une manière générale, et que dans l’espèce le péché de Saül entraînait nécessairement cet ordre de châtiment ; c’est moins l’homme que le roi qui a péché, et la peine que Dieu inflige, comme les peuples, aux rois coupables, c’est la déchéance de leur dynastie. Saül aurait eu les qualités d’un bon capitaine, il a de la grandeur, il ne manque pas de générosité, il est courageux, prompt, mais il n’a pas les qualités d’un roi, bien moins encore celles d’un roi d’Israël.
Quelques détails de sa vie nécessitent des observations spéciales.
1°. Les circonstances de son élection sont d’une simplicité tout à fait antique et patriarcale, bien en rapport avec la vie presque idyllique de ces temps reculés. Le but de son voyage, sa visite à Samuel, les signes qu’il reçoit, sa rentrée dans la vie privée, tout porte le cachet de l’époque, et pour se moquer de ces détails, il faut, comme dit Winer, ne pas connaître l’antiquité et ne pas savoir s’y reporter en esprit. L’élection de Saül est racontée de deux manières ; Gramberg y a naturellement vu la preuve de deux documents compilés par l’auteur ; il eût été facile cependant de se rendre compte de cette double élection sans recourir à une hypothèse aussi dénuée de vraisemblance. La première fois Samuel oint Saül et lui déclare, mais en secret, les desseins de Dieu à son égard ; évidemment cela ne pouvait pas suffire ; le choix devait être rendu public, et Samuel, pour écarter toute idée de préoccupation personnelle, en appelle publiquement à la voie du sort, persuadé que le résultat était entre les mains de l’Éternel ; le sort se prononce en faveur de Saül. Ce n’est pas une seconde relation, c’est un second fait.
2°. L’âge de Saül n’est indiqué nulle part, non plus que la durée de son règne. Josèphe le fait régner quarante ans, d’après une fausse traduction (2 Samuel 2.10) ; cependant le chiffre en lui-même n’a rien d’invraisemblable. Quant à son âge, on peut remarquer seulement que, dès les premières années de son règne, il avait déjà un fils en état de porter les armes et même de commander (1 Samuel 13.2), de sorte qu’on ne pouvait pas lui donner, à l’époque de son avènement, moins de trente ou trente-cinq ans. Le passage 1 Samuel 13.1, omis dans les Septante, doit se traduire littéralement : « Saül était âgé de… ans lorsqu’il devint roi ; et il régna… deux ans sur Israël ». Certains suppléent les chiffres, en ajoutant à la place des points suspensifs : « Saül était âgé de [trente] ans lorsqu’il devint roi ; et il régna [quarante] deux ans sur Israël ». Sur le premier chiffre (trente), il faut voir plus haut (1 Samuel 13.2) où il apparaît qu’il avait un fils en état de porter les armes ; sur le second chiffre (quarante) il faut se rapporter au Nouveau Testament (Actes 13.21) où l’apôtre Paul, en présentant l’évangile de la grâce de Dieu aux Juifs à Antioche de Pisidie, leur dit que le règne de Saül avait duré 40 ans.
Quoi qu’il en soit, si l’on admet la traduction de nos versions, il faut en changer la ponctuation, autrement le verset n’aurait aucun sens ; la première partie du verset se reporterait à ce qui précède, la seconde à ce qui suit immédiatement.
3°. Saül a prophétisé à plusieurs reprises, non seulement à son avènement, mais encore après sa déchéance (10.11 ; 11.6 ; 19.24). Il a été nàbi (voir Prophètes), et quoi que l’on veuille entendre par ce genre de prophétie, on est contraint d’avouer que c’était plus que le langage ordinaire des hommes pieux d’Israël. L’étonnement public, lorsqu’on apprend que Saül est aussi au nombre des prophètes, prouve surabondamment que ce n’était pas une chose commune, et si l’on ne veut pas admettre cette inspiration accompagnée de visions qui caractérisait les prophètes d’un ordre supérieur (hhosé), on doit admettre au moins que Saül était animé de l’esprit de Dieu, plongé dans une extase surnaturelle, ravi hors de lui-même, dans un état d’exaltation involontaire, dans laquelle il parlait et enseignait, louait et bénissait Dieu, avec une force et une effusion intérieure que l’Esprit d’en haut pouvait seul produire.
Son esprit, son cœur, sa conscience étaient réveillés ; Saül n’était plus Saül, il était un autre homme, l’intermédiaire de la pensée divine qui se révélait à lui, et qu’il ne pouvait méconnaître. Alors il s’oubliait lui-même, et son ravissement était tel qu’il fut une fois, une nuit et un jour entier, couché sur la terre et dépouillé de ses vêtements. Mais on se demande comment un homme, animé de pareilles dispositions, a pu être en même temps un homme sans foi et rejeté de Dieu. La réponse est aisée : sa piété s’évanouissait avec les circonstances extraordinaires qui en avait provoqué les mystérieux élans (Osée 6.4) ; au lieu de retenir dans son cœur les enseignements qu’une faveur singulière de Dieu lui envoyait par intervalles, il laissait s’éteindre le lumignon qui fume, il contristait, il repoussait le Saint-Esprit ; et notre Seigneur, en parlant de ceux qui ont prophétisé en son nom, quoiqu’il ne les ait jamais connus (Matthieu 7.22), nous montre la possibilité de cette existence du caractère prophétique chez des hommes voués à la réprobation.
C’est une grâce extérieure que Dieu leur accorde, ils la repoussent en faisant usage de leur liberté morale ; ils se montrent des exemples vivants et terribles de ce mystérieux antagonisme entre la volonté de Dieu et celle de l’homme, dans lequel la volonté de l’homme peut encore triompher à force d’endurcissement. Saül rejeté, et cependant prophétisant en la présence de Samuel, c’est le remords se réveillant dans le cœur à la vue d’un homme qui lui rappelle de beaux jours et de grandes grâces ; mais les passions, l’envie, la haine sont plus fortes, et elles étouffent les semences du bien.
4°. La mélancolie de Saül est la suite naturelle de son rejet. Il y avait là en effet de quoi troubler le cœur et l’esprit d’un homme. C’est la tristesse du remords. Il n’est pas nécessaire d’y voir autre chose. Abandonné de Dieu, abandonné de Samuel, contraint de s’avouer que c’est par sa faute, il sent trembler dans ses mains le sceptre qui déjà n’est plus à lui ; l’image de David le poursuit partout comme une ombre ; il veut la frapper et la faire disparaître ; l’amitié de Jonathan pour son rival lui paraît une révolte dénaturée, l’enthousiasme du peuple pour le jeune guerrier lui paraît une rébellion, les succès d’autrui lui semblent une injure, l’asile donné par un sacrificateur au capitaine qui se dit envoyé de sa part, lui apparaît comme une conjuration ; il voit un complot dans l’absence de David, une ruse de guerre dans sa fuite, peut-être même une insulte dans sa pitié. Son esprit est perdu, son jugement est égaré, sa vue se trouble, les faits les plus simples sont grossis et dénaturés, les objets ne lui apparaissent plus sous leur aspect ordinaire ; alors on le voit tour à tour se faire le bourreau de son fils que le peuple lui arrache, l’assassin de son gendre que sa fille lui dérobe, le meurtrier des sacrificateurs de Nob que Doëg lui livre et met à mort, le meurtrier des Gabaonites que Dieu venge plus tard, l’insensé conjureur d’une pythonisse, et enfin le suicidé de Guilboa. Rien dans sa conduite ne trahit une folie proprement dite, mais depuis sa désobéissance, tout en lui porte le caractère d’une mélancolie noire ; il est sombre comme Charles IX après la Saint-Barthélemy ; c’est un phénomène physiologique fréquemment observé, et les moyens employés pour calmer le malheureux sont plutôt destinés à le distraire qu’à l’exorciser ; l’emploi de la musique dans des cas de ce genre est général, et ses heureux succès ont été constatés toutes les fois qu’il en a été fait usage. Le terme de mauvais esprit envoyé par l’Éternel (1 Samuel 19.9), ne contredit en rien cette explication, car nous ne nions nullement que cette maladie noire ne fût l’œuvre d’un mauvais esprit, et qu’elle ne le soit en général, comme nous admettons que les bonnes dispositions du cœur sont l’œuvre du bon esprit de Dieu.
5°. Voir à l’article Samuel ce que nous avons dit sur les mobiles de la conduite du prophète à l’égard du roi déchu.
6°. Quant à la consultation de la pythonisse de Endor, voir Pythonisse.
7°. La mort de Saül est racontée de deux manières différentes (1 Samuel 31 ; 2 Samuel 1). Dans le premier passage, Saül se tue, dans le second, il est tué par un jeune Amalécite ; Gramberg y trouve une nouvelle preuve à l’appui de son hypothèse des deux documents. Le récit prouve que le jeune Amalécite a fait un conte dont il espérait une autre récompense que celle qu’il a reçue, de sorte qu’un second document n’a rien à faire ici ; dans le cas où cette explication ne suffirait pas entièrement, rien de plus simple que d’admettre avec Josèphe une fusion des deux récits ; Saül a essayé de se tuer, et comme il n’avait plus la force d’achever son crime, il a prié le jeune Amalécite qui passait de mettre un terme à ses souffrances.
8°. L’extermination des Gabaonites n’est connue que par l’allusion renfermée (2 Samuel 21.1). Les uns supposent que Saül fit égorger avec les prêtres de Nob les Gabaonites employés au service du temple ; d’autres pensent que les Gabaonites, n’ayant rien à perdre et tout à gagner à une révolution, prirent le parti de David contre Saül, ce dont celui-ci se serait vengé par leur complète extermination. L’on ne peut rien affirmer à cet égard si ce n’est que Saül a commis le crime, et que ses enfants l’ont expié.
9°. Le nom de Saül est rappelé plusieurs fois dans les livres historiques et dans les Psaumes de David ; voir en particulier (2 Samuel 1.17 ; 2.4 ; 5.2 ; 7.13 ; 12.7 ; 16.8 ; 22.1 ; 1 Chroniques 26.28 ; Psaumes 18, 32, 54, 57, 59). Sa résidence est quelquefois désignée par son nom (1 Sam. 15.34 ; Ésaïe 10.29). Le seul passage du Nouveau Testament qui en fasse mention est Actes 13.21.