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Il y a en hébreu quatre ou cinq expressions différentes qui sont toutes rendues par lin ou fin lin dans nos traductions ; disons d’abord quelques mots de chacune d’elles.
1°. Bad, les sacrificateurs ont des caleçons de lin (Exode 28.42 ; 39.28 ; Lévitique 6.10) ; au pluriel, un ange est vêtu de lin (Ézéchiel 9.2-3 ; Daniel 10.5) ; la plupart des commentateurs maintiennent cette signification, et Winer pense qu’il s’agit du lin le plus fin, ce qui semble assez probable puisque l’Écriture en fait le vêtement des anges et celui des sacrificateurs ; Harris au contraire voit le très fin lin dans le shesh. Le bad était encore l’étoffe de l’éphod dont David était vêtu lors du solennel transport de l’arche (2 Samuel 6.14 ; 1 Chroniques 15.27), tandis que le manteau dont il était ceint était de bouz, apparemment moins fin. (Winer se trompe en affirmant que dans 1 Chroniques 15.27, le bouz a été substitué au bad de 2 Samueluel 6.14 ; dans ce dernier passage, il n’est question que de l’éphod, et dans les deux l’étoffe indiquée est la même, du fin lin, du bad et non du coton ou bouz).
2°. Bouz, le byssus des Grecs et des Latins ; c’est l’étoffe du manteau de David (1 Chroniques 15.27) ; elle se travaillait dans des fabriques juives en Palestine (1 Chroniques 4.21) ; c’est le fin lin de 2 Chroniques 2.14, du voile du temple (3.14), et des lévites-chantres (5.12). Le même mot se retrouve en Esther 1.6 ; 8.15 ; Ézéchiel 27.16 ; cf. Apocalypse 19.8-14 ; Luc 16.19. Il appartient dans tous les cas à l’hébreu postérieur et a une origine étrangère. Luther l’a traduit soie, de même que shesh. Winer, Gesenius, Parkhurst, Harris (dans son Appendice), et d’autres le rendent par coton, et le font synonyme de l’expression shesh plus ancienne ; quelques-uns entendent par bouz exclusivement le coton de l’arbuste, et par shesh celui de l’arbre, ce dernier étant plus commun en Égypte, et l’autre en Syrie (cf. Ézéchiel 27.7-16) ; mais il ne faut pas trop presser ces finesses d’histoire naturelle (voir Coton).
3°. Shesh, étoffe dont fut revêtu Joseph lorsqu’il fut établi gouverneur en Égypte (Genèse 41.42). Le pavillon et ses courtines étaient également de shesh retors (Exode 26.1 ; 27.9-18), ainsi que les deux pièces de vêtements indiquées (28.39), et la robe dont s’habille la vaillante femme (Proverbes 31.22 ; Ézéchiel 16.10-13 ; Ézéchiel 27.7 ; cf. Luc 16.19). C’était une étoffe précieuse dont les riches seuls pouvaient faire usage. Elle est suffisamment déterminée par ce qui a été dit plus haut ; ajoutons seulement que le nom de shesh s’appliquait probablement aussi par extension à d’autres étoffes, et notamment au fin lin égyptien, qui pour la douceur et la délicatesse pouvait bien souvent se comparer au coton (Exode 39.2, cf. 28.42 ; Lévitique 16.4 ; dans l’original). Il faut remarquer d’ailleurs, que dans plusieurs dialectes de l’Orient un même mot sert souvent encore pour désigner le lin et le coton. Quant à la traduction soie, elle doit être repoussée par le fait que ce tissu qui de nos jours est abondant et presque commun, était alors si rare et si précieux qu’il se vendait son pesant d’or, et que l’empereur Aurélien dut en refuser une robe à l’impératrice, qui la lui demandait avec instances ; on ne peut donc croire que treize siècles avant lui, aux jours de Salomon, les soieries aient pu être comprises au nombre des objets dont s’occupait l’industrie féminine des Hébreux.
4°. Pishlhah ou pishthéh (de pashath, carder), est l’expression propre qui est le plus ordinairement employée dans l’Ancien Testament pour désigner le lin (Exode 9.31 ; Lévitique 13.47-48, 52, 59 ; Deutéronome 22.11 ; Josué 2.6 ; Juges 15.14 ; Proverbes 31.13 ; Ésaïe 19.9 ; 42.3 ; 43.17, trad. Lumignon ; Jérémie 13.1 ; Ézéchiel 40.3 ; 44.17-18 ; Osée 2.5-9) – et dans le Nouveau Testament (Matthieu 12.20 ; Apocalypse 15.6). Cette plante bien connue était cultivée avec beaucoup de succès en Égypte, notamment dans le Delta et aux environs de Pelusium, de même qu’en Palestine ; sa tige y atteint encore une hauteur de 1 m et de l’épaisseur du roseau, les Hébreux s’en faisaient des vêtements, des cordes, et même des mèches ou lumignons, et chacun de ces objets fabriqués pouvait prendre le nom de la substance dont il était fait. Les riches se servaient de bad ou fin lin, dont la plus grande partie venait d’Égypte, tandis que les pauvres se contentaient souvent de lin grossier et non roui. L’étoupe (neoleih) est mentionnée (Juges 16.9 ; Ésaïe 1.31), à moins qu’il ne s’agisse dans ces passages de cette espèce de chaume qui tombe à terre quand on teille le lin, et qui n’est bon qu’à être brûlé. D’après Forster, (De bysso) et Michaélis, le pishthah aurait aussi en hébreu, comme il l’a en copte, la signification accessoire de coton, et ils s’appuient sur ce qu’il est dit (Josué 2.6), que Rahab cacha les espions Israélites sous des tiges qui, selon eux, ne peuvent avoir été que des tiges de coton et non des tiges de lin, mais la preuve manque à cette assertion.
Enfin il est parlé (Lévitique 19.19 ; Deutéronome 22.11), d’une étoffe nommée sha’atnez, nom étranger à la langue hébraïque, et que nos versions ont traduit par « de laine et de lin » ; il résulte, en tout cas, du contexte, que ces étoffés devaient être un composé, un mélange ; mais quelques auteurs pensent qu’il s’agit aussi bien d’une bigarrure de couleurs que d’un mélange de matières différentes, voir notre article Accouplements.