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(Genèse 17.1-21.3 ; 22.2 ; 1896 av. J.-C.)
Fils d’Abraham et de Sara ; il fut pour son père le fils de la promesse et de la foi. Son nom indique le rire, et lui fut donné, soit parce que Sara avait souri d’incrédulité lorsque la naissance d’un fils lui avait été annoncée, soit à cause de la joie que lui causa la naissance de ce fils si longtemps désiré (18.13 ; 21.6 ; voir 17.17). Il fut circoncis au huitième jour, et passa ses premières années sous le toit paternel. Au dire des Hébreux, son éducation aurait été commencée par les patriarches Sem et Héber, dont il fut contemporain, du premier pendant cinquante ans (1896-1840), du second pendant soixante-dix-neuf ans (1896-1817), du moins d’après la chronologie reçue. Sa naissance augmenta les dissensions qui existaient entre les deux épouses, et Ismaël dut s’éloigner avec Agar sa mère. Quelques années après, lorsqu’Isaac eut atteint, à ce que l’on croit, sa vingt-deuxième ou vingt-cinquième année, il accompagna son père sur le mont Morija. Familier avec l’idée des sacrifices, il vit sans étonnement le bois et le feu destinés au bûcher, mais il ignorait quelle devait être la victime ; il l’apprit et se résigna sans murmurer, parce que la même foi qui consolait son père, le fortifiait lui-même et le soumettait captif à la volonté de Dieu. Vrai type de notre Sauveur immolé par son père, « il a été mené à la boucherie comme un agneau et comme une brebis muette devant celui qui la tond, et il n’a point ouvert sa bouche ». Mais Isaac devait survivre à l’épreuve, et le sanglant sacrifice ne s’accomplit point ; un bélier remplaça sur l’autel le fils d’Abraham, et des bénédictions temporelles nombreuses furent la récompense de la foi. Isaac vécut nomade comme son père ; il parcourut les plaines et les vallées de Canaan et de la Philistie, où Dieu le bénit abondamment, surtout dans la culture de la terre (26.12). À l’âge de quarante ans il épousa sa parente Rebecca, que Éliézer avait été chercher pour lui en Chaldée. Au bout de vingt ans de mariage, elle lui donna deux enfants, Ésaü et Jacob, qui naquirent quinze ans seulement avant la mort d’Abraham, et qui se partagèrent diversement l’affection de leurs parents, le tranquille Jacob étant le bien-aimé de sa mère, Ésaü, le fougueux chasseur, faisant les délices de son père, parce que celui-ci aimait fort la venaison. Bientôt une famine força Isaac de quitter les lieux où il habitait ; il projeta d’abord de se rendre en Égypte, mais Dieu l’en détourna. L’on peut remarquer que c’est à peu près à cette époque qu’eut lieu l’invasion de l’Égypte par les rois pasteurs. Isaac se rendit à Guérar, où régnait Abimélec (26.1), et tomba par la même tentation dans le même mensonge qu’Abraham avait déjà fait à un autre roi du même nom. Pour sauver sa vie, il risqua de compromettre l’honneur de son épouse ; mais Dieu veillait sur la mère de Jacob, et Isaac, convaincu de mensonge, avoua ses craintes et son incrédulité. Dieu continua de le bénir dans ses champs, et il recueillit dans une seule année le centuple de ce qu’il avait semé. Cependant les Philistins, voyant la multitude des serviteurs et des troupeaux d’Isaac, devinrent jaloux de cette fortune toujours croissante ; ils comblèrent les citernes qu’avait creusées Abraham, et Abimélec lui-même, entraîné par son peuple, conseilla ou ordonna à Isaac de se retirer. Isaac obéit et se rendit d’abord dans la vallée de Guérar, non loin des plaines de ce nom ; il nettoya et rouvrit les puits que ses ennemis avaient comblés, et leur conserva les noms qu’Abraham leur avait donnés ; il en creusa de nouveaux et trouva des eaux vives pour ses troupeaux. Mais ces puits furent une source intarissable de querelles, et, après bien des contestations, Isaac prit le parti de s’éloigner encore davantage et se rendit dans les plaines de Beër-Shéba. Là Dieu lui apparut, la nuit même de son arrivée, et lui confirma les promesses qu’il avait faites à son père ; un autel fut élevé, le nom de l’Éternel fut invoqué et les bénédictions abondèrent. Abimélec s’empressa de revenir auprès d’Isaac, avec son plus intime conseiller et son général d’armée, et comme Isaac se montrait surpris de les voir le rechercher, Abimélec lui répondit : « Nous avons vu clairement que l’Éternel est avec toi, et nous avons dit : Qu’il y ait maintenant un serment solennel entre nous, et traitons alliance avec toi ». Isaac reçut avec joie cette proposition, il offrit un festin à ses nouveaux alliés, et le lendemain ils se séparèrent en paix.
Isaac étant devenu vieux (Genèse 27.1), et ses yeux s’étant fermés tellement qu’il ne pouvait plus voir, il sentit qu’il devait s’attendre à une mort prochaine, et ne voulut pas différer davantage de donner sa bénédiction à l’aîné de ses fils. Ignorant la cession du droit d’aînesse faite par Ésaü à Jacob, ignorant aussi, et peut-être par un manque de foi, que Dieu avait aimé Jacob et haï Ésaü, il allait bénir l’enfant qu’il préférait, et voulut d’abord se procurer encore une fois cette sensuelle jouissance qui influençait peut-être chez lui l’affection paternelle ; il fit venir Ésaü et lui commanda d’aller à la chasse chercher quelque pièce de gibier. « Apprête-moi des viandes d’appétit, comme je les aime, et apporte-les-moi afin que j’en mange ». Mais Dieu avait réservé à Jacob les droits de primogéniture. Jacob se les était acquis en abusant de la fatigue et de l’impétuosité de son frère ; ces droits étaient à lui, mais au lieu de s’en remettre à celui qui est fidèle, au lieu de laisser Dieu agir, il voulut intervenir, et sa mère, plus rusée encore, hâta, par un mensonge sans excuse, l’exécution du plan divin. Jacob, âgé de soixante-dix-sept ans, se moqua d’un vieux père aveugle et lui soutira par son déguisement la grande bénédiction qu’Isaac voulait donner à Ésaü. Isaac, trop confiant, soupçonna une ruse, et se laissa néanmoins convaincre ; il entendait la voix de Jacob et touchait la barbe du velu chasseur ; mais les plats étaient là, et pendant que Ésaü courait après le gibier, son frère cadet, dont le nom en hébreu signifie supplantent, recevait les bénédictions paternelles. Grande fut la douleur du père en découvrant qu’il avait été trompé, mais il ne pouvait retirer sa bénédiction : « J’ai béni ton frère, dit-il, et aussi il sera béni ». « Et ne m’as-tu point réservé de bénédiction ? s’écria Ésaü, plein de désespoir et d’amertume ; n’as-tu qu’une bénédiction, mon père ? Bénis-moi aussi, bénis-moi, mon père ! » Dieu permit qu’Isaac pût encore donner à son fils bien-aimé quelques promesses de consolation : « Ton habitation sera en la graisse de la terre, lui dit-il, et en la rosée des cieux d’en haut ; tu vivras par ton épée, et tu seras asservi à ton frère ; mais il arrivera qu’étant devenu maître, tu briseras son joug de dessus ton cou ».
Isaac comprit cependant qu’il n’avait été que l’instrument de la volonté du Dieu des cieux ; il se soumit à cette dispensation providentielle, et conserva toute son amitié à Jacob. La colère d’Ésaü était à craindre pour le frère supplanteur, et Isaac, soit pour ce motif, soit pour éviter que Jacob épousât des païennes et amenât dans la maison des germes de querelles, comme avait fait Ésaü (26.35), engagea le fils béni à se rendre en Mésopotamie auprès des parents de Rebecca. Cette absence dura plus de vingt ans ; mais Isaac eut encore avant de mourir la joie de revoir ce fils qui était devenu pour lui un successeur théocratique, et le chef de sa postérité ; il mourut entre ses bras à l’âge de cent quatre-vingts ans, et fut recueilli avec ses peuples. Ésaü et Jacob l’ensevelirent dans la grotte de Macpéla (35.27-28 ; 49.31).
Abraham, Isaac et Jacob sont trois figures d’élection qui sont fréquemment rappelées ensemble dans l’Écriture ; celle d’Abraham est la plus belle, celle de Jacob ne peut être comprise que par la foi, par le sens chrétien ; celle d’Isaac est davantage passive. Ce qu’il y a de grand en lui, c’est sa naissance miraculeuse, c’est aussi l’ordre donné à Abraham de le sacrifier sur Morija ; c’est enfin, si l’on ose le dire, sa bénédiction surprise et déplacée. Dans ces trois faits il est passif, dans tout le reste de sa vie il paraît nul. Dieu veut que les colonnes de son édifice visible n’aient pas d’autre gloire, pas d’autre action que la sienne ; et comme la force des fidèles est de se tenir tranquilles pendant que l’Éternel combat pour eux, leur gloire est aussi de disparaître derrière l’image de celui dont ils ne doivent que refléter les vertus et la splendeur. La passivité d’Isaac fut de celles que chacun doit envier ; partout ce patriarche se montre humble, simple, tranquille et calme ; jamais il ne résiste, il se laisse immoler par son père, marier par Éliézer, chasser par Abimélec, vexer par des bergers, tromper par sa femme, tromper par son fils, inquiéter par ses belles-filles ; une seule fois il pèche par timidité ; partout ailleurs il se fait admirer par sa douceur et sa résignation, partout il accepte l’Éternel comme Providence, et reconnaît la sagesse de celui qui mène les hommes et les choses. Il a une vie de famille toute particulière, aimant sa Rebecca malgré ses torts, et n’ayant qu’elle pour épouse ; il vit avec elle et avec ses deux fils, sans paraître rechercher beaucoup des relations extérieures ; ses goûts sont dans la maison, casaniers et parfois un peu sensuels, comme ceux des hommes doux et sans ambition. Sa piété paraît avoir été plus juive que chrétienne, il a moins de confiance et plus de crainte qu’Abraham, et Jacob jure par la frayeur d’Isaac (31.42), qui est le commencement de la sagesse. Il est le symbole de la douceur et de l’amour.
Son nom se retrouve fréquemment dans les livres saints (1 Chroniques 1.28 ; Matthieu 1.2 ; Luc 3.34 ; Romains 9.7 ; Galates 4.28 ; Hébreux 11.18-20 ; et ailleurs).