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Réprouvé
Dictionnaire Biblique Westphal

(Du latin reprobare, la particule re indiquant une action régressive, un retrait, et le verbe probare signifiant approuver.) Le réprouvé est un rejeté, un condamné ; on peut le représenter d’après l’Ancien Testament comme un sujet qui n’a pas supporté l’épreuve du feu et oui au lieu de se présenter comme un métal purifié et affiné est devenu scorie sans valeur, digne seulement d’être mis au rebut (Jérémie 6.29 ; Jérémie 7.13 ; Jérémie 7.15 ; Lamentations 5.22 ; Ésaïe 1.22 ; Ésaïe 1.28 ; Ésaïe 1.31 ; Osée 9.7). Dans ces passages comme dans les suivants, c’est en un sens politico-religieux qu’il faut prendre l’expression et l’idée (1 Rois 9.7 ; 2 Rois 23.27 ; Psaumes 44.24), tandis qu’il faut l’entendre en un sens surtout moral dans Psaumes 51.13 ; Psaumes 74.1 ; Lamentations 3.31.

Dans le Nouveau Testament, le mot adokimos signifie littéralement : de mauvais aloi (monnaie), qui n’a pas supporté l’épreuve. Certains des passages où ce mot est employé qualifient une mentalité dépravée, celle de l’individu qui ne se laisse plus conduire par son sens moral, mais dont l’esprit obéit aux excitations des instincts (Romains 1.28, cf. Éphésiens 4.19). Dans 2 Timothée 3.8, il s’agit davantage d’une réprobation au point de vue de la foi qui n’est plus la saine doctrine dont l’auteur de la lettre a parlé plus haut (2 Timothée 1.13 et suivant), et la condamnation s’applique à ceux qui vivent comme l’apôtre l’indique dans 2 Timothée 4.3. C’est dans le premier sens indiqué ci-dessus qu’il faut entendre Tite 1.16, où l’auteur parle de ceux qui sont incapables de toute bonne œuvre.

Mais le terme a aussi le sens d’un rejet de la communion des saints, comme dans 1 Corinthiens 9.27, où l’apôtre exprime la crainte, s’il ne domine pas absolument ses passions, d’être lui-même rejeté, après avoir prêché aux autres ; c’est l’idée de l’anathème qu’il se dit prêt à accepter, dans Romains 9.3, et cette fois comme une espèce de rançon pour le salut de ses frères israélites ! Mais autant-ce souhait manifeste l’esprit de renoncement de l’apôtre, autant l’anathème qui frappe le renégat moral est un juste châtiment, comme une peine infamante (cf. Romains 8.13 et Galates 5.19 ; Galates 5.21). C’est le même sens qu’exprime la parabole du champ arrosé, béni ou maudit suivant ce qu’il produit (Hébreux 6.7 et suivant). Les mots : maudit, malédiction, expriment de même la privation de la communion avec Dieu (Matthieu 25.41 ; Galates 3.10 ; Galates 3.13).

Le passage 2 Corinthiens 13.3 ; 2 Corinthiens 13.7 emploie trois fois le mot : réprouvé. Il exprime ici une opposition à un état où l’on peut être approuvé par sa conscience. Il faut s’éprouver pour savoir si l’on est dans la foi, si Christ habite en nous… à moins qu’on ne soit réprouvé (verset 5) ; mais les Corinthiens reconnaîtront que Paul n’est pas réprouvé (verset 6) ; cependant l’apôtre désire que ses correspondants pratiquent le bien, non pour obtenir ainsi lui-même un bon témoignage, mais pour qu’eux-mêmes réellement fassent bien, dût-il lui-même paraître réprouvé (verset 7) ; son amour pour les Corinthiens, qui le critiquent si inconsidérément, est assez grand pour accepter un jugement défavorable à son propre prestige.

La réprobation peut être un état passager de conscience ou même une mesure disciplinaire temporaire cessant avec le repentir du coupable ; mais elle peut être aussi un état de rejet définitif : voir les déclarations de Jésus dans le sermon sur la montagne, menaçant de la Géhenne le pécheur endurci et excluant du Royaume ceux qui ne font pas la volonté de son Père (Matthieu 5.22-29 ; Matthieu 7.21-23). Voir surtout ses condamnations dans Matthieu 18.8 et suivant et Marc 9.43. Il convient cependant de remarquer que, dans cette image du feu qui ne s’éteint point, Jésus ne dit pas que le pécheur brûlera éternellement, comme voudraient nous le faire croire les catholiques et certains protestants, mais que le brasier est éternel (« leur feu ne s’éteindra point », Ésaïe 66.24), c’est-à-dire que la flamme aura toute qualité pour consumer entièrement l’objet qui lui aura été livré. Il semble bien cependant que, dans la pensée de Jésus et des apôtres, la possibilité d’une réprobation absolue et éternelle soit une réalité profonde de l’économie spirituelle (voir Eschatologie).

Nulle part, dans l’Écriture, il n’est question d’un décret éternel de réprobation, c’est-à-dire d’un décret par lequel tel individu aurait été, de toute éternité et par une prédestination personnelle voulue de Dieu, condamné à la malédiction. Ce qui ne veut pas dire que l’homme ne puisse, en fin de compte et comme conséquence de son incrédulité et de son endurcissement dans le mal, être définitivement rejeté, mais ce ne sera pas par un décret de Dieu le visant personnellement dès avant sa naissance et de toute éternité. Voir Prédestination, Repentir.


Dictionnaire Encyclopédique de la Bible par Alexandre WESTPHAL, Pasteur, Docteur en Théologie, et professeur honoraire de l'Université de Toulouse (Faculté de Théologie protestante de Montauban).
Edition originale publiée en 1932 par les Editions et Imprimeries « Je Sers », Issy-les-Moulineaux. Imprimeries Réunies Ducros et Lombard, Aberlen et Cie. Valence sur Rhone.
Numérisation Yves PETRAKIAN – 2005 France.

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