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D’après Josué 20.7-9 six villes de Palestine ont été consacrées comme cités de refuge, trois à l’ouest du Jourdain et trois à l’est Elles n’ont pas été « … mises à -part », au hasard : il y en a deux au Nord, deux au sud et deux au centre ; d’aucune partie du pays on n’avait à faire plus de 50 kilomètres pour atteindre l’une ou l’autre. Puis ce n’étaient pas des villes quelconques, mais bien des endroits ayant une antique réputation de sainteté, antérieure même à la conquête. Les trois villes de refuge de l’ouest étaient : Kédès, dans la montagne de Nephthali ; comme son nom l’indique (signifiant : la Sainte), c’était un ancien sanctuaire cananéen. Sichem, au pied du mont Garizim ; son caractère sacré est prouvé par plus d’un passage biblique : d’après Genèse 12.6, il y avait près de Sichem un bocage où l’on venait consulter les devins (Chênes de Moré) ; Abraham y éleva un autel (Genèse 12.7) et Josué y dressa un menhir (Josué 24.26). Hébron, dans les monts de Juda, d’après Nombres 13.22 l’une des plus anciennes villes de Palestine ; avant qu’Abraham y dressât un autel, sous les chênes de Mamré (Genèse 13.18), les Cananéens et les Héthiens (Hittites) y avaient longtemps adoré leurs dieux.
Les villes de refuge de l’est sont moins connues. Golan était dans le territoire accordé à la demi-tribu de Manassé. Ramoth en Galaad se trouvait dans le pays attribué à Gad. Béther, dans la région donnée originairement à la tribu de Ruben. Les ennemis d’Israël ne cessèrent de lui disputer ces trois localités.
La nécessité d’avoir en Israël des villes possédant un droit officiel d’asile est due à l’institution du gôël (voir Vengeur du sang). Pour tout Israélite se trouvant dans l’embarras, son plus proche parent du côté masculin (père, oncle, cousin), appelé son gôël, devait venir à son secours : racheter un champ que dans un moment de détresse il avait dû abandonner à un créancier, le racheter lui-même si, pour non-paiement d’une dette, il était devenu esclave. En cas de mort violente de son parent, il était tenu de mettre lui-même à mort le meurtrier ; il devenait alors le « vengeur du sang ». En effet, la loi israélite ne connaissait pas de bourreaux chargés d’exécuter les gens coupables de meurtre. Le gôël, en accomplissant cet acte, faisait œuvre de justice, tenue pour œuvre sainte (Nombres 35.33). Cependant la mort pouvait être due à quelque accident : il avait pu y avoir homicide par imprudence ; cela ne diminuait pas le devoir du gôël de poursuivre le meurtrier, mais la loi accordait à ce dernier une chance d’échapper à sa fureur.
(a) D’après la législation la plus ancienne, celle du Code de l’Alliance (Exode 21.1-23.19), l’homicide par imprudence pouvait chercher un refuge auprès d’un autel élevé à la divinité (Exode 21.13 et suivant). Chaque sanctuaire possédait le droit d’asile. Mais s’il s’agissait vraiment d’un meurtre commis avec préméditation, ou par suite d’un accès de haine, le coupable, sur décision du prêtre du sanctuaire, était arraché de l’autel et remis entre les mains du gôël. Nous avons deux exemples bibliques de cet usage de l’asile sacré : 1 Rois 1.50 ; 1 Rois 2.28.
(b) Il est à présumer que, dès les jours de Salomon, le roi ou les juges avaient « mis à part » comme lieux de refuge certains endroits : Hébron, Sichem, Kédès, etc. Quand le roi Josias eut opéré, en 621, sa réforme religieuse, tous les sanctuaires établis ici et là dans le pays durent disparaître, mais on ne songea pas à réserver le droit d’asile au seul temple de Jérusalem. Au contraire, on maintint l’institution des villes de refuge avec la réglementation qui avait été établie au sujet de l’exercice du droit d’asile. Ce sont ces règlements que nous trouvons dans Deutéronome 19.1-13 ; Josué 20.4 ; Josué 20.6. Ils montrent le meurtrier qui, après avoir couru le long d’une route constamment maintenue en bon état (Deutéronome 19.3), arrive à la porte de la ville de refuge. C’est là que l’occasion lui est donnée d’exposer son cas aux anciens. Ceux-ci, s’ils acceptent sa défense, lui assignent une demeure. Quant à la question de ses moyens d’existence, dans une ville où il est étranger, le texte n’en dit rien.
Dans le cas d’un meurtrier volontaire, les choses se passaient autrement. Si les anciens de sa ville le réclamaient, les autorités de la ville de refuge devaient l’envoyer sous bonne garde dans son lieu d’origine ; et les juges de cet endroit, après avoir éclairci la question et prononcé leur sentence, le livraient au vengeur du sang pour être exécuté.
(c) Le Code sacerdotal (P) compléta les dispositions du Code deutéronomique : voir Nombres 35.9 ; Nombres 35.34. Dans ce texte, pour la première fois, les villes susmentionnées sont officiellement appelées « villes de refuge » (verset 11). Ce Code précise l’attitude que doit prendre le meurtrier involontaire. Il stipule qu’il doit rester dans la cité de refuge jusqu’à la mort du grand-prêtre. Au décès de ce dernier, une amnistie générale suspend les droits et devoirs de tout gôël sur les réfugiés non coupables, mais il leur est bien recommandé de ne pas tenter de sortir avant un tel événement de la banlieue de la ville où ils se sont réfugiés, car le gôël avait le droit de les mettre à mort.
Un autre article rappelle (Nombres 35.30, cf. Deutéronome 19.15) qu’il faut au minimum deux témoins pour établir la culpabilité d’un meurtrier, et que la déposition d’un seul témoin ne compte pas.
Il semble, d’après Nombres 35.24, que désormais c’étaient les juges du lieu d’origine et non les anciens de la ville de refuge qui devaient décider si le meurtre pouvait être considéré comme involontaire. Dans ce cas ils renvoyaient l’inculpé dans la ville où il s’était réfugié.
Le Code sacerdotal défend très expressément tout arrangement financier entre le gôël et le réfugié : l’argent ne saurait racheter le sang versé ! (Nombres 35.32)
On remarquera que le caractère spécial des villes de refuge ne porta nulle atteinte à leur prestige, et c’est pourquoi elles peuvent être inscrites au nombre des villes lévitiques, prévues par Josué 20.3 et suivants, Nombres 35.1 et suivants : celles qui, avec leur banlieue, devaient être attribuées par les diverses tribus aux membres de celle de Lévi. Cette dernière ordonnance paraît peu compatible avec les données de Nombres 26.62 et avec le principe même sur lequel le Code sacerdotal a établi toute l’histoire des institutions théocratiques d’Israël : principe d’après lequel les descendants de Lévi devaient être exclus de tout droit de propriété en Israël. Aussi se demande-t-on dans quelle mesure la théorie des villes lévitiques et celle des villes de refuge ont pu être effectivement réalisées : jamais Israël ne posséda la totalité des territoires visés par ces lois.
Pour refuge, voir aussi Asile. Ch. B.