Jérusalem, si je t’oublie… 1 Sur le bord des fleuves de Babylone Nous nous sommes assis, Et là nous avons pleuré, Nous souvenant de Sion. 1 à 3 Les harpes muettes
Les fleuves de Babylone : l’Euphrate et ses nombreux canaux. Le nom de la capitale peut d’ailleurs désigner ici le pays entier. Les déportés, dans leurs moments de loisir, cherchaient la solitude au bord des fleuves, où le murmure des flots fait oublier l’agitation humaine. C’est au bord du fleuve Kébar qu’Ézéchiel eut sa première révélation (Ézéchiel 1.3 ), et Daniel se vit transporté en vision au bord du fleuve Oulaï (Ézéchiel 8.2 ).
Nous nous sommes assis : pour méditer ; mais la méditation s’est changée en pleurs.
Nous souvenant de Sion , la ville des pères, mais plus. encore celle de l’Éternel (voir la note d’introduction).
2 Aux saules du rivage Nous avons suspendu nos harpes, Nous avons suspendu… Ils avaient pris leurs harpes en mains, dans l’intention de chanter, mais la présence d’étrangers incapables de les comprendre et l’invitation à chanter que leur ont adressée ces étrangers leur ont fermé la bouche.
Aux saules du rivage , littéralement : aux saules qui sont là au milieu (du pays). On trouve en abondance en Babylonie une espèce d’olivier (populus euphratica ) ; fort semblable aux saules de rivière.
3 Car ceux qui nous avaient emmenés captifs Nous demandaient des paroles de cantiques, Et ceux qui nous faisaient souffrir, Des chants de joie ! Chantez-nous quelque chose Des chants de Sion ! 4 Comment chanterions-nous les cantiques de l’Éternel Sur une terre étrangère ? 4 à 6
Ardent amour pour Jérusalem,
Les cantiques de l’Éternel sur une terre étrangère . Ce qui est saint a-t-il sa place en un lieu profane, et peut-on louer l’Éternel, là où son nom est blasphémé ? Ce n’est pas que les Israélites de la captivité ne fissent plus aucun usage des Psaumes , mais, s’ils continuaient à les réciter, sous forme de prières domestiques et liturgiques, dans leurs maisons et dans les lieux de culte qu’ils pouvaient se procurer, il n’était plus question pour eux de les chanter, avec accompagnement d’instruments sacrés, quand leurs maîtres païens ne voyaient là qu’un moyen de se distraire et de s’égayer. Il aurait fallu, pour cela, avoir oublié Jérusalem et son culte.
5 Si je t’oublie, Jérusalem, Que ma droite s’oublie ! Que ma droite s’oublie ! littéralement: Que ma droite oublie… La phrase reste suspendue. La pensée analogue du verset 6 , concernant la langue, montre qu’il s’agit ici d’une impuissance complète à laquelle serait réduite la main droite : qu’elle oublie d’agir de se mouvoir, surtout de manier la harpe, et que ma langue reste incapable, non seulement de chanter, mais de parler !
6 Que ma langue s’attache à mon palais, Si je ne me souviens de toi, Si je n’élève Jérusalem Au-dessus de toutes mes joies ! Au-dessus de toutes mes joies : d’où résulte que tant que Jérusalem est en ruines, il n’y a plus de joie possible, pour celui qui l’aime.
7 Garde, Éternel, aux fils d’Édom Le souvenir de la journée de Jérusalem, Alors qu’ils disaient : Démolissez, démolissez, Jusqu’à ses fondements ! 7 à 9 Le sort des ennemis de Jérusalem
Garde… le souvenir . Penser à Jérusalem (verset 6), c’est penser à ce qu’elle a souffert, le psalmiste demande à Dieu de conserver lui aussi ce souvenir, comme celui d’une dette que les Édomites ont contractée envers lui. De tout temps ce peuple, descendant d’Ésaü et par là même frère d’Israël, s’était montré jaloux et haineux envers ce dernier, au point de prendre plaisir à ses plus grandes calamités (voir Abdias 1.10-17 ). Nous pouvons conclure de ce passage de notre psaume que, lors de la ruine finale, sous Sédécias, ce peuple joua le même rôle que précédemment. Il encourageait méchamment les vainqueurs à la destruction. C’est à cela que font allusion Jérémie 49.7-22 et Ézéchiel 25.12-14 ; Ézéchiel 35.14 , qui annoncent pour cette raison à Édom un châtiment exceptionnellement rigoureux.
Démolissez… , littéralement : Mettez à découvert .
8 Fille de Babylone, la dévastée, Heureux qui te rendra ce que tu nous as fait ; Babylone, la dévastée . Elle est nommée ainsi par anticipation, de la même manière que l’on peut appeler maudit un être sur lequel la sentence divine n’a pas encore été prononcée, mais le sera tôt ou tard. On sait que Babylone, autrefois la reine de l’Orient , la ville forte et riche par excellence, est maintenant le type de la dévastation. Épargnée par Cyrus, en 538, elle fut détruite, après une révolte, par Darius, fils d’Hystaspe, en 488. Plusieurs essais de la relever échouèrent ; le projet d’Alexandre le Grand entre autres fut réduit à néant par sa mort. Actuellement encore, à une grande distance de ses ruines, des villes entières se bâtissent au moyen des matériaux enlevés à ses anciens palais.
Heureux qui te rendra… Cet homme est appelé heureux parce qu’il sera l’exécuteur des représailles divines. Les rétributions humaines sont toujours entachées de sentiments mauvais, mais si la vengeance de l’homme est coupable, celle de Dieu est juste (Deutéronome 32.35 ; Romains 12.19 ).
Tes petits enfants… Lors de la prise de Jérusalem, les Chaldéens avaient été sans pitié, comme ils l’étaient d’ailleurs dans toutes leurs guerres. Ésaïe annonce qu’à leur tour ils verront leurs petits enfants écrasés sous leurs yeux (Ésaïe 13.16 ). Le psalmiste fait sans doute allusion à cette menace ; il en appelle même de ses vœux l’accomplissement. Voir, pour tout l’ensemble de ce passage, l’introduction au psaume.
9 Heureux qui saisira tes petits enfants Et les écrasera contre la pierre !