Nécessité de la repentance 1 Or, en ce même temps, quelques-uns se trouvaient là, lui racontant ce qui était arrivé à des Galiléens, dont Pilate avait mêlé le sang à leurs sacrifices. Incidents et enseignements
Chapitre 13
1 à 9 nécessité de la repentance
En ce même temps , c’est-à-dire peu de temps après le discours qui précède (Luc 12.54-59 ).
Les exhortations à la conversion (versets 3, 5 ) sont en rapport avec les avertissements qui terminent le chapitre 12. Le récit du fait qui y donna lieu, ainsi que la parabole qui les suit (versets 6 à 9 ), appartiennent en propre à Luc.
Cette phrase : mêlé le sang à leurs sacrifices , peut signifier que Pilate faisant massacrer ces Galiléens au moment où ils offraient leurs sacrifices, leur sang avait rejailli sur leurs victimes ; ou bien que ce sang, répandu près de l’autel, s’était mêlé au sang de ces victimes. Dans l’un et l’autre cas, l’évangéliste peint ce qu’il y avait eu de tragique et d’horrible dans ce massacre, commandé par Pilate.
On n’a que des conjectures sur les causes de ce fait, dont les historiens anciens n’ont pas conservé le souvenir.
Quelques interprètes ont pensé que ces Galiléens étaient peut-être des adhérents du fameux Judas de Galilée (Actes 5.37 ), ce qui est assez peu probable.
Luc ne nous dit point dans quelle intention ces quelques-uns venaient raconter à Jésus ce fait probablement tout récent.
Peut-être agissaient-ils avec l’empressement d’une vaine curiosité ou d’une propre justice qui, en s’applaudissant elle-même, attendait de Jésus quelque sévère jugement à la fois sur Pilate et sur les malheureux qu’il avait fait périr ; car aux yeux des Juifs, tout grand malheur était le châtiment d’un grand péché particulier (voir le livre de Job et Jean 9.2 , note). Cette supposition est justifiée par la réponse de Jésus, qui devait, comme une épée à deux tranchants, pénétrer dans la conscience de ces hommes légers.
2 Et répondant, il leur dit : Pensez-vous que ces Galiléens fussent plus pécheurs que tous les Galiléens, parce qu’ils ont souffert ces choses ? 3 Non, vous dis-je ; mais si vous ne vous repentez, vous périrez tous de même. C’est à tort qu’on a voulu conclure de cette réponse que le mal n’est pas un châtiment du péché en général, ou même parfois des péchés individuels.
Non seulement Jésus ne nie point cette justice qui s’exerce par les dispensations de Dieu dans la vie des hommes. Il dénonce, au contraire, des jugements semblables à ses interlocuteurs frivoles, pour leur faire sentir qu’ils sont tout aussi pécheurs que ceux dont ils racontent complaisamment la fin tragique.
Et les termes de cette menace peuvent, dans le cas actuel, s’entendre à la lettre : moins de quarante ans après, à la destruction de Jérusalem, des milliers de Juifs périrent, soit égorgés par les Romains, soit écrasés sous les décombres (verset 4 ).
Mais les avertissements de Jésus élèvent notre pensée jusqu’au jugement éternel de Dieu, devant qui tous les hommes seront trouvés coupables et dignes de condamnation, à moins qu’ils ne se repentent .
Nous conservons ce dernier mot dans notre version, quoiqu’il rende imparfaitement le terme de l’original, qui désigne un changement ou une transformation complète de l’homme moral (Matthieu 3.2 , 1re note).
La repentance est toujours le commencement de cette œuvre divine dans l’homme.
D’autres traduisent par le mot de conversion , ou se convertir , ce qui n’est pas non plus exact. Quoi qu’il en soit, être régénéré ou périr , telle est l’alternative rigoureuse que Jésus présente à tout homme pécheur.
4 Ou, ces dix-huit sur qui la tour de Siloé est tombée, et qu’elle a tués, pensez-vous qu’eux-mêmes fussent plus coupables que tous les habitants de Jérusalem ? 5 Non, vous dis-je ; mais si vous ne vous repentez, vous périrez tous de même. On ne sait rien non plus de l’événement auquel Jésus fait ici allusion.
La tour de Siloé se trouvait probablement au-dessus de la source de ce nom (Jean 9.7 , note ; Néhémie 3.15 ; Ésaïe 8.6 ), soit pour protéger la ville, soit pour abriter ceux qui venaient à la source.
Jésus rappelle cet exemple des jugements de Dieu, arrivé à Jérusalem même, parce que, en concluant du châtiment des Galiléens que tous les hommes sont coupables et doivent se repentir, il risquait de ne pas atteindre les Juifs qui l’écoutaient, et qui dans leur orgueil se croyaient beaucoup meilleurs que les Galiléens.
Le texte reçu dit en parlant de ces dix-huit malheureux : « pensez-vous que ceux-là fussent plus coupables ? » Selon la variante adoptée d’après Codex Sinaiticus , A, B. l’expression est plus précise encore : eux-mêmes . Le texte le plus autorisé (Codex Sinaiticus , B, A, D) porte : « tous les hommes habitant Jérusalem ».
6 Or il disait cette parabole : Quelqu’un avait un figuier planté dans sa vigne, et il vint y chercher du fruit, et n’en trouva point. Il disait . Dans Luc et surtout dans Marc, la formule : Or il disait (encore ), indique une idée nouvelle et importante qui vient s’ajouter à un discours et en est la conclusion (comparer Luc 12.54 ).
Cette parabole est une admirable illustration des exhortations qui précèdent.
Le sens littéral de cette parabole est si simple et si clair, qu’il n’exige aucune explication. Quant à la signification religieuse et morale, elle ressort également de chaque trait.
Le propriétaire de la vigne , c’est Dieu. Le figuier représente le peuple juif. Cet arbre est très fertile en Orient et produit plusieurs récoltes par an. En outre, le figuier de la parabole est planté dans le terrain le plus favorable à sa fertilité, une vigne. Le maître était donc en droit d’attendre de lui beaucoup de fruits. Telle était la condition d’Israël, que Dieu avait favorisé de toutes manières.
7 Et il dit au vigneron : Voici trois ans que je viens chercher du fruit sur ce figuier, et je n’en trouve point ; coupe-le ; pourquoi rend-il aussi la terre inutile ? Le vigneron , auquel le propriétaire du figuier adresse cette plainte, c’est le Sauveur, qui va se révéler à nous par sa miséricordieuse intercession (versets 8, 9 ).
Dieu cherche du fruit sur ce figuier, il en cherche en tout homme ; nul ne peut se soustraire à l’obligation de porter du fruit. Sur le figuier de la parabole, il n’en trouva point . En trouve-t-il en nous ?
Quant aux trois ans ici mentionnés, quelques interprètes y voient les trois années qui se seraient écoulées depuis que Jésus était entré dans son ministère. Cette idée n’est pas inadmissible, car la présence et l’activité du Sauveur au milieu de son peuple constituaient pour celui-ci une épreuve décisive. Il est cependant plus simple, et plus conforme à l’ensemble de la parabole que ces trois ans représentent un délai après lequel le propriétaire avait lieu de croire son figuier vraiment stérile.
Cette sentence est méritée. Tout cultivateur agirait ainsi. Car non seulement le figuier ne produit rien, mais il nuit aussi à la terre ; il la rend inutile , infructueuse, par l’ombrage qu’il y projette et en attirant à lui les sucs du sol. Ainsi tout homme qui ne fait pas de bien fait du mal, ne fût-ce que par l’exemple pernicieux d’une vie inutile.
Si la sentence est juste, elle est aussi absolue. Un arbre coupé n’est plus bon qu’à être brûlé (Jean 15.6 ).
8 Mais lui, répondant, lui dit : Seigneur, laisse-le encore cette année, jusqu’à ce que j’aie creusé autour de lui, et que j’y aie mis du fumier ; Non seulement l’intercesseur demande une année de sursis, mais il s’engage à donner au figuier ses soins, culture, engrais, tout ce qui sera possible.
Cette prière fut exaucée pour le peuple juif : quarante ans s’écoulèrent avant la ruine de Jérusalem. Et dans cet intervalle la mort et la résurrection de Jésus, la Pentecôte et la fondation de l’Église furent des appels, représentés dans la parabole par les soins exceptionnels que le vigneron promet de donner au figuier.
9 peut-être portera-t-il du fruit à l’avenir ; sinon, tu le couperas. Grec : et s’il porte du fruit …(c’est bien) ; sinon tu le couperas .
Le texte reçu, avec A, D, la plupart des majuscules et des versions place les mots à l’avenir ou l’année prochaine , après tu le couperas .
Presque tous les critiques et traducteurs préfèrent la leçon alexandrine (Codex Sinaiticus , B, versions égyptiennes), qui donne un meilleur sens.
Le dernier mot de la parabole est : sinon, tu le couperas .
Le vigneron ne dit pas : Je le couperai (verset 7 ), mais il remet la chose au propriétaire. Toutefois, il cesse de prier pour le figuier. La puissance du royaume de Dieu 10 Or il enseignait dans l’une des synagogues le jour du sabbat ; Plan
Guérison d’une malade le jour du sabbat
a) Le miracle. Jésus enseigne dans une synagogue un jour du sabbat, lorsque survient une femme courbée par un esprit d’infirmité depuis dix-huit ans. Jésus lui annonce sa guérison et lui impose les mains. Elle est redressée, et glorifie Dieu (10-13).
b) Le blâme. Le chef de la synagogue invite les assistants à amener leurs malades les six jours de la semaine, et non le sabbat (14).
c) La justification. Jésus rappelle à ces hypocrites qu’ils détachent le jour du sabbat leurs bêtes pour les abreuver, et il n’aurait pas le droit de délivrer cette fille d’Abraham du lien qui la retenait depuis dix-huit ans ! Confusion des adversaires ; joie de la foule (15-17).
Deux paraboles
Jésus conclut de l’acte qu’il vient d’accomplir la puissance du royaume, et il la représente dans deux paraboles :
a) la parabole du grain de sénevé qui montre la puissance d’extension du royaume (18, 19)
b) la parabole du levain qui montre sa puissance de transformation (20, 21).
10 à 21 la puissance du Royaume de Dieu 11 et voici une femme qui avait un esprit d’infirmité depuis dix-huit ans, et qui était courbée et ne pouvait absolument pas se redresser. L’histoire de cette guérison nous a été conservée par Luc seul.
Un esprit d’infirmité est un état maladif attribué à un mauvais esprit .
Jésus lui-même confirme expressément cette opinion (verset 16 ). Le mal parait avoir eu son siège dans le système nerveux ; de là une contraction qui tenait cette pauvre femme courbée , et cela depuis dix-huit ans !
12 Mais Jésus la voyant, l’appela à lui et lui dit : Femme, tu es délivrée de ton infirmité. 13 Et il lui imposa les mains, et à l’instant elle fut redressée, et elle glorifiait Dieu. La seule vue de cette longue souffrance émeut la compassion du Sauveur. Sans attendre que la malade invoque son aide et lui demande la guérison, il l’appelle à lui et prononce la parole puissante : Tu es délivrée !
Le verbe est au parfait, exprimant le fait déjà accompli et la permanence de la guérison. La foi de la malade s’attache à cette déclaration et obtient ainsi la délivrance. Cependant Jésus lui impose les mains, afin d’entrer en communication avec elle, pour rendre à son cœur le calme et la confiance, aussi bien que la force à sa volonté débile. La reconnaissance de la malade éclate en des paroles d’actions de grâce, par lesquelles elle glorifiait Dieu .
14 Mais le chef de la synagogue, indigné de ce que Jésus avait guéri le jour du sabbat, ayant pris la parole, disait à la foule : Il y a six jours pendant lesquels il faut travailler : venez donc ces jours-là pour être guéris, et non le jour du sabbat. Ce chef , ou président de la synagogue , adresse ses reproches à la foule , et ainsi indirectement à Jésus qu’il n’ose pas attaquer en face.
Son discours est appelé une réponse (ayant pris la parole , grec répondant , Matthieu 11.25 ). Il répond en effet à l’acte de Jésus. Cet acte de puissance dont il vient d’être témoin lui impose quelque retenue, et il craint d’exciter l’indignation des autres témoins de cette scène.
Les paroles, ici rapportées, ne sont qu’une partie de la répréhension qu’il fit entendre à la foule. C’est ce qu’indique le verbe à l’imparfait : il disait , qui suppose une harangue plus prolongée.
Dans son aveugle attachement à la légalité, il en appelle au quatrième commandement, et il ne s’aperçoit pas que les termes mêmes dont il se sert : (grec) venant soyez guéris , rendent un éclatant témoignage à la réalité des œuvres du Sauveur.
15 ? Mais le Seigneur lui répondit et dit : Hypocrites, chacun de vous, le jour du sabbat, ne détache-t-il pas son bœuf ou son âne de la crèche, et ne l’emmène-t-il pas boire ? Le Seigneur . Ce titre est donné à Jésus quand il manifeste sa souveraineté (Luc 7.13 ; Luc 10.1 , comparez Luc 6.5 ).
Hypocrites . Par ce mot au pluriel selon le vrai texte, Jésus prononce un jugement sévère à là fois sur le chef de la synagogue et sur tous ceux qui étaient animés du même esprit pharisaïque. Leur hypocrisie consistait à s’accorder une grande latitude dans l’observation du sabbat, quand il s’agissait de leurs propres intérêts, et à l’appliquer strictement, quand il s’agissait des intérêts du prochain.
Comparer Luc 14.5 ; Matthieu 12.11-12 , notes.
16 Et cette femme qui est une fille d’Abraham, et que Satan a liée voici dix-huit ans, ne devait-elle pas être délivrée de ce lien le jour du sabbat ? Admirable réfutation du sophisme pharisaïque ! De quelle confusion elle couvrait, aux yeux de la foule, celui qui l’avait provoquée ! (verset 17 )
Jésus justifie son apparente violation du sabbat par une double considération : cette pauvre femme était fille d’Abraham , appartenant au peuple de Dieu, et probablement animée de l’esprit du patriarche dont elle descendait ; et malgré cela, Satan , le prince des ténèbres, la tenait liée depuis si longtemps ! Ne fallait-il pas, même le jour du sabbat , lui arracher sa victime, et la rendre à la liberté aussi bien qu’à la santé ?
17 Et comme il disait ces choses, tous ses adversaires étaient couverts de confusion, et toute la foule se réjouissait de toutes ces choses glorieuses qui se faisaient par lui. Confusion des adversaires, joie de la foule qui suivait Jésus avec confiance, tels étaient les effets de ses œuvres et de ses paroles.
Ainsi triomphait sa cause et avançait son règne. C’est là peut-être ce qui engage Luc à placer ici les deux courtes paraboles qui suivent, sur la manière dont le royaume de Dieu s’établit dans le monde.
18 Il disait donc : À quoi est semblable le royaume de Dieu, et à quoi le comparerai-je ! « Il disait donc ».
Codex Sinaiticus , B, Itala portent : Or il disait. Le texte reçu confirme la pensée exprimée à la fin de la note précédente.
Ce serait ici la place historique de ces deux courtes paraboles si riches et si profondes dans leur signification. Voir Matthieu 13.31-32 , note et Marc 4.30-32 .
19 Il est semblable à un grain de sénevé qu’un homme a pris et jeté dans son jardin ; et il a crû et il est devenu un arbre, et les oiseaux du ciel se sont abrités dans ses branches. Le texte reçu fait dire à Jésus que ce grain de semence devient un grand arbre ; le mot grand n’est pas authentique ; il serait une exagération ; et même le mot arbre doit être pris dans le sens restreint et plus exact que nous trouvons dans Matthieu et Marc qui disent : « plus grand que tous les légumes ».
20 Et il dit encore : À quoi comparerai-je le royaume de Dieu, ? 21 Il est semblable au levain qu’une femme a pris et qu’elle a caché dans trois mesures de farine, jusqu’à ce que tout fût levé. Luc met tous les verbes au passé et donne ainsi à ces paraboles le caractère de récits, de faits accomplis. Peut-être voulait-il montrer par là que ces similitudes trouvaient déjà leur accomplissement dans les œuvres et les discours par lesquels Jésus établissait alors le royaume de Dieu dans les âmes.
Nouvelle série de récits et d’enseignements La porte étroite 22 Et il traversait les villes et les bourgs, enseignant, et faisant route vers Jérusalem. Plan
Préambule historique
Jésus, se dirigeant vers Jérusalem, traverse le pays, en s’arrêtant pour enseigner dans les villes et les villages (22).
Le petit nombre des élus
Quelqu’un demande à Jésus s’il n’y en a qu’un petit nombre de sauvés. Jésus répond : Efforcez-vous d’entrer par la porte étroite ; car beaucoup ne pourront entrer (23, 24).
Vaines réclamations de ceux qui sont exclus
Ils frapperont en vain à la porte et invoqueront les relations qu’ils ont eues avec le Seigneur. Il leur déclarera qu’il ne les a pas connus (25-27).
Leurs regrets amers à la vue des élus
Ils se livreront à des pleurs et à des grincements de dents à la vue des patriarches et des prophètes, et de tous ceux qui seront venus d’orient et d’occident : car plusieurs des derniers seront les premiers, et des premiers les derniers (28-30).
Nouvelle série de récits et d’enseignements
Les élus
23 à 30 La porte étroite.
Grec : « Et il allait au travers du pays par les villes et les bourgs, enseignant et faisant voyage vers Jérusalem ».
Il y a en grec une particule distributive qui indique que Jésus, en traversant la contrée, s’arrêtait dans chaque ville et chaque bourg ou village pour y enseigner , mais en poursuivant toujours, par divers détours, son voyage vers Jérusalem , où il se rendait pour la dernière fois.
Luc répète de temps en temps ces indications, comme pour jalonner la route que suivait Jésus (Luc 9.51 , note, Luc 10.38 ; Luc 17.11 ).
23 Or quelqu’un lui dit : Seigneur, n’y a-t-il que peu de gens qui soient sauvés ? Grec : les sauvés sont-ils peu nombreux ? Cette question est l’une des plus obscures que des esprits réfléchis puissent se poser ; elle se présente inévitablement à eux et les remplit d’angoisse ; mais elle ne doit pas devenir l’objet de spéculations oiseuses, Dieu seul en a le secret.
Quelque parole du Seigneur sur les difficultés du salut, peut-être sur la réjection future du peuple juif, avait soulevé le redoutable problème.
24 Mais il leur dit : Efforcez-vous d’entrer par la porte étroite ; car beaucoup, je vous le dis, chercheront à entrer et ne le pourront. Grec : « Combattez pour entrer par la porte étroite » (comparer Matthieu 7.14 , note ; 1 Timothée 6.12 ).
Le Seigneur, par une image familière aux Écritures, représente le salut comme une maison dans laquelle beaucoup de gens désirent entrer. L’accès en est rendu d’autant plus difficile, car la porte est étroite .
C’est le symbole de l’humiliation, de la repentance, de la foi, du renoncement, qui sont les conditions d’entrée du royaume des cieux. N’est-ce pas aussi le chemin douloureux par lequel Jésus lui-même a voulu entrer dans son règne ?
Jésus ne répond pas à la question qui lui a été adressée, mais faisant appel à la conscience, il ramène de la théorie à la pratique, de la spéculation au devoir présent, qui incombe personnellement à celui qui l’interroge (comparer Luc 12.41 ; Jean 3.3 ).
Et ce n’est pas seulement au questionneur, c’est à tous (« il leur dit ») qu’il adresse cette sérieuse exhortation. Vous vous occupez du salut des autres, vous demandez combien seront sauvés ; il y a une question plus pressante : Le serez-vous vous-mêmes ? Combattez pour entrer ! (comparer Matthieu 7.14 , note).
Ils ne le pourront , non à cause d’une volonté arbitraire de Dieu, mais parce qu’ils n’auront pas eu assez de décision et de persévérance pour entrer par la porte étroite, parce qu’ils auront reculé devant les humiliations et les douleurs de la repentance. Les paroles qui suivent décrivent d’une manière saisissante, tragique, cette scène finale de la réprobation.
25 Dès que le maître de la maison se sera levé et aura fermé la porte, et que vous, étant dehors, vous vous mettrez à heurter, en disant : Seigneur, ouvre-nous ; et, que répondant, il vous dira : Je ne sais d’où vous êtes, Le maître de la maison est le Seigneur lui-même.
Il attend, assis, que les siens soient entrés. Puis, à l’heure fixée pour l’ouverture de la fête, il se lève , et ferme la porte . Ceux qui sont restés dehors se mettent à heurter et a demander l’entrée, qui leur est refusée par ce motif : Je ne sais d’où vous êtes , c’est-à-dire vous n’êtes point de la maison, je ne vous connais point (comparer Matthieu 25.11-12 ).
26 alors vous vous mettrez à dire : Nous avons mangé et bu en ta présence, et tu as enseigné dans nos places publiques. Alors , c’est la conclusion de la longue phrase qui précède ; alors , mais quand il sera trop tard, vous direz …
Les deux arguments auxquels en appellent ces malheureux sont littéralement vrais, mais n’expriment que des rapports tout extérieurs avec le Sauveur. Leur réclamation, comme le remarque M. Godet, caractérisé la tendance des Juifs à faire reposer le salut sur certains avantages extérieurs. Jésus oppose à ces privilèges leur conduite morale (comparer Luc 3.8 ).
27 Et il dira : Je vous le déclare, je ne sais d’où vous êtes. Retirez-vous de moi, vous tous, ouvriers d’injustice. Il y a quelque chose de solennel dans la répétition de ces mots : Je ne sais d’où vous êtes .
Mais les dernières paroles de ce verset montrent que le juste Juge savait très bien ce qu’ils étaient, des ouvriers d’injustice , c’est-à-dire des hommes qui ont fait et pratiqué l’injustice (Psaumes 6.9 ). C’est la cause de leur réjection.
Mais il ne faut pas oublier que l’essence même de l’injustice c’est la résistance à la volonté de Dieu (comparer Matthieu 25.41 ).
28 Là seront les pleurs et les grincements de dents ; quand vous verrez Abraham et Isaac et Jacob et tous les prophètes dans le royaume de Dieu, et vous-mêmes jetés dehors. Matthieu 8.12 , note.
Le mot là reporte la pensée sur le lieu où les réprouvés viennent d’être relégués (verset 27 ).
La vue d’un bonheur infini, perdu par sa faute, sera, pour le réprouvé, la source de poignants regrets, d’une douleur morale sans nom, qui s’exprimeront par des pleurs (ou gémissements) et des grincements de dents .
29 Et il en viendra d’orient et d’occident, du septentrion et du midi, et ils se mettront à table dans le royaume de Dieu. 30 Et voici, il y en a des derniers qui seront les premiers, et il y en a des premiers qui seront les derniers. Matthieu 19.30 ; Matthieu 20.16 , notes.
Cette maxime, qui formule la loi mystérieuse du royaume de Dieu, fut répétée par Jésus à diverses reprises et dans diverses applications. Jésus ne dit pas que tous les premiers (les Juifs) seront les derniers, ni que tous les derniers (les païens) seront les premiers.
Les différents temps du verbe qu’il emploie font ressortir le contraste entre le présent et l’avenir. Il dit littéralement : « Et voici, il en est des derniers qui seront les premiers, et il en est des premiers qui seront les derniers ».
Les desseins d’Hérode 31 En cette heure même, quelques pharisiens s’approchèrent en lui disant : Sors et va-t’en d’ici, car Hérode veut te tuer. Plan
Les desseins d’Hérode
Des pharisiens invitent Jésus à s’éloigner en lui annonçant qu’Hérode en veut à sa vie. Jésus fait dire à Hérode, en lui montrant qu’il a pénétré ses ruses, que son ministère approche de son terme, mais qu’il n’en continuera pas moins à agir tranquillement, allant à Jérusalem, où il convient qu’un prophète meure (31-33).
Plainte sur Jérusalem
Dans une apostrophe douloureuse, Jésus rappelle à
Jérusalem, meurtrière des prophètes, toutes les tentatives qu’il a faites pour l’attirer à lui. Elle sera désormais privée de sa présence, jusqu’au jour où elle le saluera du cri : Béni soit celui qui vient au nom du Seigneur ! (34, 35)
31 à 35 l’hostilité d’Hérode et les résistances de Jérusalem
Le texte reçu porte : « En ce même jour : » la variante adoptée se lit dans Codex Sinaiticus , A, B, D.
C’est à l’heure même où Jésus tenait le discours qui précède que des pharisiens vinrent à lui avec le message ici rapporté.
Luc seul a conservé ce trait (versets 31-33 ). Il ne dit pas où cet entretien eut lieu, mais il est évident que ce fut encore au sud de la Galilée, ou dans la Pérée, qui étaient sous la domination d’Hérode.
Quel motif les pharisiens avaient-ils pour donner à Jésus cet avertissement ? On ne peut guère supposer qu’ils le faisaient par intérêt pour lui ; ni que ce conseil ne fût de leur part qu’une ruse destinée à hâter son arrivée en Judée et à Jérusalem, où tant de dangers l’attendaient.
La réponse de Jésus s’adressant directement à Hérode prouve qu’il considère les paroles des pharisiens comme un message de la part de ce prince. Et il n’y a pas lieu de douter de la réalité de ce message. Hérode, qui avait une crainte superstitieuse de Jésus (Luc 9.7-9 ), ne voulait pas réellement le faire mourir, d’autant moins que sa conscience lui reprochait encore le meurtre de Jean-Baptiste ; mais comme les miracles du Sauveur lui inspiraient de la crainte, il emploie les pharisiens, dont il connaissait la haine contre Jésus, pour l’éloigner des contrées qu’il gouvernait.
Précédemment déjà on avait vu les hérodiens s’unir aux pharisiens pour comploter contre le Seigneur (Marc 3.6 ).
32 Et il leur dit : Allez et dites à ce renard : Voici, je chasse les démons et j’achève de faire des guérisons aujourd’hui et demain, et le troisième jour je suis consommé. Le renard est le type de la ruse dans toutes les langues.
En désignant de la sorte Hérode, Jésus montrait à ses envoyés qu’il pénétrait fort bien ses desseins. Dans le message dont il les charge, il commence par rassurer Hérode : son ministère touche à son terme.
Chasser des démons et achever de guérir quelques pauvres malades, telle est l’œuvre inoffensive qu’il va faire encore aujourd’hui et demain ; et le troisième jour , c’est-à-dire après un temps très court (Osée 6.2 ), il sera consommé ou accompli . Ce dernier verbe : je suis consommé ou accompli, présent qui exprime un futur imminent, est entendu par quelques interprètes comme se rapportant à la fin de son œuvre dans les États d’Hérode ; mais, ni le sens ordinaire du mot même, ni la déclaration qui termine le verset 33 , ne permettent de l’entendre autrement que de la mort de Jésus.
Jésus fait donc répondre solennellement à Hérode, non seulement que bientôt il ne sera plus pour lui un sujet de crainte, mais que, pour sa vie sur la terre, tout sera accompli (comparer Jean 19.30 ).
33 Seulement il faut que je marche aujourd’hui, demain et le jour suivant, parce qu’il ne convient point qu’un prophète périsse hors de Jérusalem. Seulement (cela concédé il me reste ceci :) il faut (en vertu de la volonté supérieure de Dieu) que je marche , que je continue ma route, pendant le court temps qui me reste, m’avançant vers la capitale de la Judée ; car, malgré la menace d’Hérode de me tuer, ce n’est pas ici que je mourrai ; c’est Jérusalem qui a le triste privilège de tuer les prophètes ! (verset 34 )
Il y a une poignante ironie dans ce terme : il ne convient point , cela serait contraire aux usages et à l’esprit de la théocratie qui a son siège à Jérusalem. Il ne faut pas prendre à la lettre cette expression d’une tristesse indignée ; car plus d’un prophète, et Jean-Baptiste, le dernier de tous, est mort hors de Jérusalem .
34 Jérusalem, Jérusalem, qui tues les prophètes et qui lapides ceux qui te sont envoyés, combien de fois ai-je voulu rassembler tes enfants, comme une poule rassemble sa couvée sous ses ailes, et vous ne l’avez pas voulu ! 35 Voici, votre maison vous est laissée ; mais je vous dis que vous ne me verrez plus, jusqu’à ce que vienne le jour où vous direz : Béni soit celui qui vient au nom du Seigneur ! Voir, sur ces deux derniers versets, Matthieu 23.37-39 , notes.
Le texte reçu porte : « Voici, votre maison vous est laissée déserte . Mais en vérité , je vous dis ».
Les deux mots soulignés ne sont pas authentiques.
Le mot déserte est douteux même dans Matthieu, d’où il parait avoir été introduit dans le texte de Luc.
Jésus veut donc dire : « Quand je m’en serai allé, votre maison (votre ville, votre temple) vous reste encore pour un temps, sous la protection divine ; mais, dans votre abandon, je ne vous apparaîtrai plus comme Sauveur ».
Je vous dis que vous ne me verrez plus jusqu’à ce qu’arrive (le jour) où vous direz , d’après A, D et le texte reçu ; ou, jusqu’à ce que vous disiez , d’après Codex Sinaiticus , B, et quelques majuscules La première leçon est préférable.
D’après la place que Luc assigne à ces paroles, quelques interprètes pensent que les derniers mots désignent le moment prochain où Jésus fera son entrée à Jérusalem, le jour des Rameaux, et où ses adhérents de la Galilée le salueront en s’écriant : Béni soit celui qui vient au nom du Seigneur !
Mais quelle mesquine interprétation d’une pensée énoncée sous une forme si solennelle et précédée de la plainte douloureuse du verset 34 ! Non, il s’agit du sévère jugement de Dieu, d’après lequel le peuple d’Israël sera privé de la présence du Sauveur jusqu’au jour de son retour dans la gloire, jour où tous ceux qui auront cru en lui le recevront avec cette acclamation si connue et sacrée pour des Israélites (Psaumes 118.26 ).
À moins d’admettre la supposition, très peu vraisemblable, de quelques interprètes (Stier), que Jésus a prononcé deux fois ces solennelles paroles, il faut choisir entre Matthieu et Luc. On ne peut nier qu’il y ait dans Luc une liaison très naturelle entre nos deux versets et les paroles de Jésus qui précèdent.
Mais comme la circonstance où les place Matthieu est plus solennelle et plus vraie ! Avec lui, nous sommes à Jérusalem même, la ville ingrate et rebelle, à laquelle Jésus adresse directement ce dernier cri de douleur, à la suite de son grand discours contre les chefs de la théocratie juive.
Les mots : combien de fois ai-je voulu …rappellent à cette cité les diverses visites de Jésus, que nous connaissons par saint Jean et que supposent les synoptiques.
C’est aux habitants de Jérusalem encore que Jésus dit, au moment de les quitter pour toujours : votre maison vous est laissée .
Et enfin, ce n’est qu’à ce moment suprême qu’il pouvait ajouter : vous ne me verrez plus . Ces paroles seraient inexplicables dans la situation où Luc les fait prononcer, puisque Jérusalem allait bientôt revoir le Seigneur qui, durant une semaine entière, fera entendre dans ses murs quelques-uns de ses plus solennels appels.