Le serviteur de l’Éternel, messager et auteur du salut 1 L’Esprit du Seigneur, l’Éternel, est sur moi, parce que l’Éternel m’a oint pour porter la bonne nouvelle aux débonnaires ; il m’a envoyé pour panser ceux qui ont le cœur brisé, pour annoncer aux captifs la liberté et aux prisonniers le retour à la lumière ; 1 à 3 Le libérateur de Sion
Qui parle ici ? Selon plusieurs, le prophète lui-même. Cela ne nous paraît pas possible. Car celui qui parle ne se donne pas seulement pour un évangéliste, un messager du salut ; il en est lui-même l’auteur ; il est le Sauveur (voyez verset 3). Si l’on se rappelle les tableaux précédents de l’œuvre du Messie (Ésaïe 42.1-7 ; Ésaïe 49.8-13 ; comparez Ésaïe 11.2 ), on ne doutera pas que ce ne soit lui que le prophète introduise ici sans le nommer. C’est donc lui qui réalisera le magnifique avenir promis à Sion dans le chapitre 60.
L’Éternel m’a oint . L’onction est l’emblème de la communication des dons du Saint-Esprit. C’était par cette cérémonie que les prêtres, les rois et quelquefois les prophètes étaient introduits dans leur charge (Exode 28.41 ; 1 Rois 1.39 ; 1 Rois 19.16 ). Le serviteur de l’Éternel, tel qu’il a été dépeint jusqu’ici (particulièrement dans les chapitres 42 et 53), réunit en sa personne ces trois charges et reçoit pour les remplir la plénitude de l’Esprit divin (Ésaïe 11.2 ; Ésaïe 42.1 ). Ce don s’est réalisé pour Jésus au moment de son baptême ; l’Esprit est descendu et est demeuré sur lui (Jean 1.32 ; Jean 3.34 ). Le nom de Messie vient en hébreu du verbe oindre ; le choix de ce verbe confirme notre opinion que c’est le Messie qui parle. Jésus lui-même a déclaré être le personnage ici annoncé, quand il a dit, après avoir lu le commencement de ce discours dans la synagogue de Nazareth : Cette parole est accomplie aujourd’hui, et vous l’entendez (Luc 4.16-21 ).
La bonne nouvelle signifie la même chose que le mot grec évangile ; c’est le terme qui désigne dans le Nouveau Testament la prédication de Jésus. Ce message s’adresse tout spécialement aux débonnaires , ordinairement foulés et malheureux en ce monde (Matthieu 5.5 ).
Annoncer… la liberté… Ces expressions font allusion à l’institution du jubilé , dans laquelle Ésaïe voit un type de la délivrance messianique. L’année de jubilé , instituée par la loi, revenait tous les cinquante ans (à l’expiration de sept périodes sabbatiques). Les esclaves israélites devaient cette année-là être mis en liberté ; ceux qui avaient dû vendre leurs biens rentraient en possession de leur patrimoine. Aussi est-il dit Lévitique 25.10 : Vous sanctifierez la cinquantième année, et vous publierez la liberté par le pays à tous ses habitants . Et Ézéchiel (Ézéchiel 46.17 ) appelle cette année-là une année de liberté . Cette institution, destinée à procurer à Israël une sorte de restauration périodique, offre une belle image de l’ère de grâce dont le, Messie proclamera l’ouverture, et qui doit aboutir à la réintégration du peuple de Dieu dans son héritage.
2 pour annoncer une année de grâce de l’Éternel et un jour de vengeance de notre Dieu ; pour consoler tous les affligés ; Une année de grâce, un jour de vengeance… La vengeance (le châtiment des ennemis de Dieu et de son peuple) est inséparable du salut des fidèles. La grâce de Dieu envers les siens se manifeste entre autres par le jugement du monde qui les opprimait (Ésaïe 34.8 ; Ésaïe 35.4 ). Il est à remarquer qu’il y a un jour pour la vengeance, une année pour la grâce. Le châtiment est rapide, soudain même ; la grâce durable, éternelle. Il n’y a qu’un moment dans sa colère, mais toute une vie dans sa faveur (Psaumes 30.6 ). L’année de grâce fait l’objet des promesses contenues dans les chapitres 61 et 62 ; le jour de la vengeance sera décrit au chapitre 63.
3 pour apporter aux affligés de Sion et leur mettre un diadème au lieu de cendre, l’huile de joie au lieu du deuil, un manteau de fête au lieu d’un esprit abattu, afin qu’on les appelle les chênes de justice, que l’Éternel a plantés pour sa gloire. Les bienfaits du salut sont représentés ici par divers symboles. Avec la cendre contraste le diadème ; en effet, tandis que l’on mettait de la cendre sur sa tête en signe de deuil, il était d’usage de se couronner dans les fêtes.
L’huile de joie : on oignait d’huile aromatique la tête des convives avant le banquet (Psaumes 23.5 ; Psaumes 45.8 ; Luc 7.46 ).
Un manteau de fête : emblème de la joie (l’opposé de l’esprit abattu).
Les chênes de justice. Les élus sont comparés à des arbres au tronc et au feuillage vigoureux. Ils sont des chênes de justice en tant qu’issus d’une semence sainte ( tous justes , Ésaïe 60.21 ; comparez Ésaïe 6.13 ) ; et ils servent à la gloire de Dieu : car c’est lui qui les a plantés (comparez Ésaïe 43.3-4 ; Ésaïe 60.21 ).
4 Ils rebâtiront les ruines antiques ; ils relèveront les décombres d’autrefois ; ils restaureront les villes détruites, les décombres des plus anciens âges ; 4 à 9
Dès le verset 4 sans que la transition soit indiquée, le discours du Messie se transforme en celui du prophète lui-même. Ésaïe promet à Israël la possession de Canaan et une position privilégiée parmi les peuples.
Voyez Ésaïe 58.12 et Ésaïe 54.3 . Cette prophétie se rapporte à Israël rentré dans sa patrie après l’exil. Mais, ici pas plus qu’ailleurs, quand Ésaïe parle du rétablissement national, il n’a en vue simplement le retour sous Zorobabel et Esdras ; retour qui n’a été qu’un faible commencement de la restauration promise. Le rassemblement de tout Israël en Canaan, annoncé par les prophètes, est réservé à la fin des temps ; quelques indices peuvent faire supposer qu’il se prépare déjà de nos jours.
5 les étrangers y demeureront et paîtront vos troupeaux ; les fils de l’étranger seront vos laboureurs et vos vignerons. 5 et 6
Les païens seront les aides des Israélites dans l’œuvre de restauration, verset 4 . Israël occupera au milieu d’eux une position privilégiée ; il sera comme une famille de sacrificateurs au milieu des nations converties, vivant des dons qu’elles consacreront librement au service de Dieu (Ésaïe 23.18 ). Des vues semblables sur la relation des Juif’s et des païens dans la théocratie de l’avenir, se retrouvent au chapitre 60 et ailleurs. En parlant ainsi, Ésaïe dépeint la nouvelle alliance au moyen de couleurs empruntées à l’ancienne. L’avenir seul expliquera le sens de ces images. Cet avenir apparaît comme le renversement de l’état actuel des choses : Israël honoré, les païens soumis. La prépondérance remarquable des Juifs de nos jours, dans le domaine des choses matérielles, n’est-elle pas une sorte d’accomplissement anticipé et profane de ces perspectives prophétiques ?
Dans d’autres passages (par exemple Ésaïe 56.5-7 ; Ésaïe 66.21 ), Ésaïe semble mettre les païens sur un pied d’égalité presque complète avec les Juifs. Peut-être la difficulté se résout-elle en admettant qu’entre les deux il y aura égalité de position devant Dieu, mais différence dans le travail qui leur sera confié.
6 Mais vous, on vous appellera les sacrificateurs de l’Éternel ; on vous nommera les ministres de notre Dieu ; vous mangerez les richesses des nations, et vous vous parerez de leur gloire. 7 Au lieu de votre honte, vous aurez double part ; au lieu d’opprobre…, ils se réjouiront de leur sort ; ils posséderont ainsi double part dans le pays ; il y aura pour eux une joie éternelle. Double part (voir la note Ésaïe 40.2 ). Israël aura le double de ce qu’il a possédé autrefois, parce qu’entre le produit de son pays, il jouira encore des richesses des païens (verset 6).
Une joie éternelle : comme Ésaïe 35.10 .
8 Car moi, l’Éternel, j’aime la droiture ; je hais le pillage fait avec perfidie ; je leur donnerai fidèlement leur salaire, et je traiterai avec eux une alliance éternelle. L’Éternel prend lui-même la parole pour sanctionner les promesses qui viennent d’être faites par le Messie (versets 1 à 3) et par le prophète (versets 4 à 7). Il hait l’injustice et dédommagera Israël de tout ce qu’il a indûment souffert ; il fera avec lui une alliance éternelle (Ésaïe 55.3 ), qui le mettra pour toujours à l’abri de semblables maux.
Pillage fait avec perfidie : c’est-à-dire obtenu par trahison ; par opposition au butin qui est considéré comme étant de bonne guerre.
9 Leur race sera renommée parmi les nations, et leur postérité au milieu des peuples ; tous ceux qui les verront reconnaîtront qu’ils sont une race bénie de l’Éternel. Comparez Ésaïe 65.23 . Accomplissement de la grande promesse qui est à la base de l’alliance (Genèse 11.2-3 ).
10 Je me réjouirai en l’Éternel ; mon âme s’égaiera en mon Dieu, parce qu’il m’a revêtu des vêtements du salut et m’a couvert du manteau de la justice, comme le fiancé se pare d’un diadème, comme la mariée s’orne de sa parure. 10 et 11 Le peuple racheté exprime sa reconnaissance pour le salut qui lui est assuré
Les termes salut et justice sont parallèles. il faut donc probablement entendre par la justice la justification gratuite accordée par Dieu à son peuple (comme Ésaïe 54.17 ), et dont celui-ci s’enveloppe et se pare comme d’un vêtement de fête (comparez verset 3 ; Apocalypse 7.9 ; Apocalypse 7.14 ; Matthieu 22.11 et suivants. D’autres voient plutôtt dans la justice les œuvres justes, la sainteté qui est l’effet, et le complément du pardon (comparez Apocalypse 19.8 , et la même image appliquée à Dieu lui-même, Ésaïe 59.17 ).
Diadème . Le fiancé portait une couronne dans la fête des noces, qui durait plusieurs jours (Cantique 3.11 ).
11 Car comme la terre fait pousser ses germes et comme un jardin fait germer ses semences, ainsi le Seigneur, l’Éternel, fera germer la justice et la louange à la vue de toutes les nations.