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Genèse 2.25 Le sentiment de la pudeur n’est venu que plus tard comme effet du péché. Adam et Ève étaient encore comme des enfants.
Appendice 1 Origine, unité, état primitif du genre humain 1. Dans le passage que nous venons d’étudier est renfermée la conception biblique de l’origine de l’homme. Cette conception, nous l’avons vu, tient compte à la fois des traits par lesquels l’homme appartient au monde animal et de ceux qui l’en distinguent et font de l’humanité, comme on l’a dit, un règne à part.
Mais, d’après une opinion récemment enseignée et à laquelle adhèrent un grand nombre de savants, l’humanité procéderait sans intervention divine particulière de l’animalité qui l’a précédée, et cela aussi bien quant à ses facultés intellectuelles et morales que quant à son corps. Nous ne pensons pas que cette manière de voir, opposée à la conception biblique réponde à l’ensemble des faits qui peuvent nous éclairer sur la question.
Il y a entre l’homme et l’animal toute une série de différences caractéristiques qui ne permettent pas d’envisager l’apparition de l’homme autrement que comme un commencement nouveau, le produit d’un acte créateur immédiat. Voici quelques-uns de ces traits.
L’homme est une personnalité consciente et disposant d’elle-même, tandis que l’animal n’agit que comme représentant de l’espèce a laquelle il appartient.
L’homme a l’intuition du bien et du mal, et par cette conscience il devient responsable de ses actes ; l’animal ne connaît que la sensation agréable ou pénible et ne peut être envisagé comme moralement responsable.
L’homme parle ; l’animal n’a pas le langage, non que les organes lui manquent pour cela, mais parce qu’il n’a que des représentations individuelles et qu’il est incapable d’idées générales comme celles qu’exprime le langage.
L’homme progresse incessamment ; l’animal demeure stationnaire, enfermé qu’il est dans le cercle que lui trace l’instinct.
À ces différences intellectuelles et morales correspondent celles que l’on constate au point de vue physique ; la constitution du cerveau en particulier établit une distance incomparablement plus grande entre l’homme le plus inférieur et l’animal le plus élevé que celle qui sépare l’animal le plus élevé de ceux qui le suivent de plus près.
Les partisans de l’origine animale de l’homme pensent qu’il doit y avoir eu un être intermédiaire, dont l’existence aurait comblé cet intervalle immense. C’est là une pure hypothèse, qui n’est appuyée jusqu’ici par aucun fait.
Ou bien ils pensent qu’à l’origine l’homme était beaucoup plus rapproché de l’animalité qu’il ne l’est actuellement. Mais tous les faits constatés jusqu’ici réfutent cette manière de voir ; les crânes humains les plus anciens qu’on ait retrouvés dans les couches terrestres sont, de l’aveu même des partisans de la théorie que nous combattons, exactement semblables à ceux des hommes de nos jours.
Mais, dût même l’idée que l’homme descend de l’animalité être un jour démontrée par les faits, il n’en resterait pas moins vrai que c’est Dieu qui a, par tout le développement du règne animal, formé son corps et que, quant à son âme, terme de cette longue élaboration, elle se distingue d’une manière si profonde de celle des animaux même les plus rapprochés de lui que l’image biblique d’un esprit soufflé par Dieu dans ses narines doit en tout cas être l’expression symbolique d’un fait divin accompli à l’origine de la race humaine.
De même qu’il a fallu un acte créateur pour poser le commencement de la vie au sein de la matière, il en a fallu un nouveau pour poser l’esprit au sein de la matière animée.
2. L’Écriture pose comme un fait indubitable l’unité d’origine du genre humain. Dans notre chapitre, Dieu ne crée qu’un seul couple d’où la famille humaine tout entière doit procéder. Jésus dit : Ne savez-vous pas que Dieu fit au commencement un homme et une femme ? (Matthieu 19.4 ). Saint Paul déclare aux Athéniens que Dieu a fait naître d’un seul sang tout le genre humain (Actes 17.26 ).
Aujourd’hui, les savants sont disposés à reconnaître l’unité attestée par l’Écriture. Elle est confirmée en effet par des faits nombreux qui prouvent que les différences existant entre les hommes ne sont pas celles d’espèces diverses, mais celles de simples variétés. Tandis que les espèces animales différentes en s’unissant ne donnent naissance qu’à des produits stériles ou dont la fécondité ne dépasse pas deux ou trois générations, les races humaines, en se croisant, donnent naissance à des rejetons d’une fécondité permanente. Tous les hommes ont la même conformation du squelette ; la température moyenne du corps et la rapidité des battements du pouls est la même chez tous ; tous sont sujets aux mêmes accidents physiologiques et aux mêmes maladies ; le temps de la grossesse est le même chez toutes les races.
L’unité morale est plus évidente encore si possible ; les lois de la logique et celles de la conscience, ainsi que tout un ensemble de sentiments naturels, étendent leur pouvoir aussi loin que s’étend l’homme ; le travail intellectuel d’une partie de l’humanité réagit tôt ou tard sur la totalité de la race ; enfin l’influence du christianisme s’exerce également chez tous les peuples de la terre.
Ce n’est qu’à la condition de cette unité morale du genre humain que peut être proclamée la grande loi qui domine son existence : aimer son prochain comme soi-même.
3. Relativement à l’état primitif de l’homme, on a souvent exposé une théorie d’après laquelle l’homme aurait passé graduellement d’un état sauvage encore à demi brutal au degré le plus inférieur de la civilisation et se serait élevé progressivement de là à la hauteur à laquelle nous sommes aujourd’hui parvenus. Primitivement dénué de toute pensée religieuse et ne pratiquant aucun culte, il aurait à un degré plus avancé divinisé certains objets qui avaient pour lui une importance particulière : un arbre, une pierre, un fleuve, puis, à un degré supérieur encore, le feu, les astres, en particulier le soleil ; il en serait venu à se représenter les astres comme habités par des puissances divines en grand nombre ; enfin, par la contemplation de l’unité du ciel, il se serait élevé à la pensée d’un Dieu unique. Ainsi serait né graduellement, à travers les phases de l’athéisme, du fétichisme et du polythéisme, notre monothéisme actuel.
Si l’homme veut se mettre à créer l’histoire par un procédé d’imagination, il arrive assez naturellement à la conception que nous venons d’exposer ; mais s’il veut étudier les faits, ce qui est la seule méthode sûre pour arriver à la vérité, il sera conduit à un résultat tout opposé et reconnaîtra que le monothéisme doit avoir été le point de départ de l’humanité, que le polythéisme a été une première dégénérescence et que le fétichisme est une dégradation plus profonde encore et n’a plus au-dessous de lui que l’athéisme matérialiste qui s’empare de nos jours d’un très grand nombre d’individus.
On a étudié les religions de tous les peuples du monde, et cette étude a conduit à constater le fait que toutes ont à leur origine une notion monothéiste qui sans doute se confond chez plusieurs d’entre elles avec la notion de l’unité du ciel visible. Le polythéisme qui a suivi n’a été que comme un fractionnement de cette unité primitive, et le fétichisme que nous trouvons aujourd’hui aux plus bas degrés de la race humaine, n’est, d’après le témoignage des peuples eux-mêmes qui sont arrivés à ce point, que le reste de notions religieuses plus élevées que possédaient leurs ancêtres. Aussi n’a-t-on jamais vu un peuple fétichiste se relever par lui-même de cet état pour parvenir à une religion plus pure sans le secours des races plus avancées.
Mais, d’autre part, si l’histoire nous conduit à admettre que la connaissance religieuse primitive de l’humanité a surpassé, au point de vue de la pureté, celle des états subséquents, cela ne doit pas nous empêcher d’envisager cet état primitif comme un simple point de départ, d’où l’humanité devait sans tarder commencer à s’élever vers un terme beaucoup plus glorieux.
C’est précisément ce que nous fait comprendre le récit scripturaire en nous montrant le couple primitif dans un état d’enfance, d’innocente ignorance, mais aussi de communication directe avec l’Éternel qui était pour eux ce qu’un père et une mère sont pour leurs enfants et qui veillait à leur progrès intellectuel et moral, non moins qu’à la satisfaction de leurs besoins physiques.
Appendice II Sur la situation du paradis Beaucoup d’interprètes n’attribuent à la notion du paradis qu’une valeur purement idéale. Ce jardin de Dieu, fertilisé par des eaux abondantes et produisant des fruits de toute espèce pour l’entretien de la vie humaine, serait l’emblème de la vie et des biens excellents que Dieu accordait à l’homme dans son état d’innocence primitive.
Mais l’auteur ne l’a certainement pas entendu ainsi ; autrement, à côté des deux noms de Pischon et de Guihon, qui pourraient à la rigueur passer pour symboliques, il n’aurait pas placé ceux de deux fleuves bien connus de ses lecteurs, le Tigre et l’Euphrate.
Et si nous admettons l’unité de la race humaine comme un fait constaté, il faut bien que le premier couple, d’où est provenue toute l’humanité, ait eu quelque part une habitation réelle, où il ait joui de la protection divine et trouvé facilement les moyens de satisfaire à ses besoins.
Où chercher ce berceau primitif de l’humanité ? On a répondu à cette question de bien des manières différentes. Nous nous bornerons à indiquer les principales solutions, celles qui prennent au sérieux les données géographiques du texte et s’attachent à en rendre compte.
Plusieurs interprètes modernes, suivant une opinion émise déjà par l’historien juif Josèphe, à la fin du premier siècle après Jésus-Christ, pensent que l’auteur du récit a voulu faire du paradis le lieu central du monde, d’où sortaient tous les grands fleuves qui arrosent la terre, telle qu’elle était connue de son temps.
Ainsi dans le Pischon ils voient l’un des deux grands fleuves de l’Inde, le Gange ou l’Indus : le pays de Havila désignerait dans ce cas non seulement le désert d’Arabie, mais encore toutes les contrées situées du côté de l’est, jusqu’à l’Inde elle-même. Cette supposition est, prétend-on, confirmée par le fait que c’était probablement de l’Inde que provenaient l’or et les pierres précieuses que les israélites tiraient d’Ophir par leur commerce.
Le Guihon serait le grand fleuve qui arrose l’Afrique, comme le Pischon l’Asie orientale, c’est-à-dire le Nil, que l’on se serait représenté provenant du centre de l’Asie, traversant l’Arabie, puis arrivant en Abyssinie (la terre de Cusch) pour se diriger de là vers le nord et descendre à travers l’Égypte dans la Méditerranée. L’idée que les sources du Nil pourraient se trouver en Asie parait avoir traversé l’esprit d’Alexandre quand, arrivant à l’un des affluents de l’Indus, il vit dans ses eaux des crocodiles et sur ses bords une plante égyptienne ; mais il se convainquit immédiatement de l’impossibilité de ce rapprochement.
Les deux derniers fleuves ne peuvent être, comme nous l’avons vu, que le Tigre et l’Euphrate. D’après cela, le paradis aurait été situé sur un plateau quelconque de l’Asie centrale où se serait trouvée, dans l’imagination des peuples antiques, la source commune des quatre fleuves indiqués.
Mais l’idée d’un jardin qui aurait été arrosé simultanément par les grands fleuves de l’Asie et de l’Afrique est tellement fantastique qu’il est impossible de l’attribuer à l’auteur de la Genèse, dont les connaissances en ethnographie et en géographie sont constatées, comme nous le verrons, par le chapitre 10.
Puis il est impossible d’admettre que l’auteur de notre récit ait étendu le nom de Havila aux contrées de l’Inde, car s’il avait connaissance de ce pays et des fleuves qui l’arrosent, il devait savoir aussi que toute une mer le séparait de la côte orientale de l’Arabie.
Enfin, pour ce qui concerne le Nil, on ne peut attribuer une pareille ignorance à notre auteur, qui écrivait sans doute après le séjour du peuple d’Israël en Égypte. Comment donc supposer qu’il n’ait pas connu la mer Rouge et le détroit qui sépare l’Afrique de l’Arabie et qu’il se soit imaginé que le Nil, qu’il savait couler du sud au nord, avait ses sources dans la même région que l’Euphrate, qui venait du nord ?
Du reste les cours du Tigre et de l’Euphrate sont beaucoup trop rapprochés l’un de l’autre en proportion de l’éloignement immense qui séparerait les deux autres fleuves.
Pour peu qu’on admette la réalité historique du récit, on est obligé de chercher l’emplacement du paradis dans la région des deux fleuves connus, le Tigre et l’Euphrate. Plusieurs croient le trouver dans la contrée où ils prennent leurs sources, sur le plateau arménien, non loin de la ville actuelle d’Erzeroum.
La source orientale de l’Euphrate et la source occidentale du Tigre sont très rapprochées (environ deux mille pas), et dans la même contrée naissent deux autres fleuves, le Kour et l’Araxe , qui coulent vers le nord, puis à l’est, et qui se réunissent avant de se jeter dans la mer Caspienne ; ce sont ces derniers fleuves qui dans notre récit porteraient les noms de Pischon et de Guihon.
Le pays de Havila, arrosé par le Pischon (Kour), serait la Colchide des Grecs, dont la frontière orientale était voisine de ce fleuve ; l’on sait que cette contrée était célèbre par l’or qu’on venait y chercher de loin.
Quant au pays de Cusch, ce serait la contrée nommée par les Grecs Cossaia , sur le versant nord du plateau d’Arménie.
D’autres partisans de cette explication voient dans le Pischon le Phasis des anciens, qui, après avoir arrosé la Colchide se jette dans la mer Noire.
Mais plusieurs objections décisives s’élèvent contre cette hypothèse. Malgré leur proximité, les sources de ces fleuves sont distinctes et séparées par des montagnes assez élevées. tandis que, d’après le récit biblique, ils devraient provenir d’un seul fleuve divisé en quatre bras.
On répond, et c’était déjà la pensée de Luther, que le déluge a pu changer la configuration de cette contrée. Mais l’auteur ne parle pas d’un passé qui n’existe plus ; il a évidemment la prétention de décrire en ce point ce qui existe encore. Il s’exprime de manière à faire comprendre que dans le temps même où il écrit on va chercher à Havila l’or, le bdellium et la pierre de schoham.
Puis, si la contrée du paradis était privée de pluie, comme le dit le récit, elle ne saurait être l’Arménie d’où sortaient ces immenses cours d’eau.
En troisième lieu, l’identification du Pischon et du Guihon avec le Kour et l’Araxe, puis des pays de Havila et de Cusch avec la Colchide et le pays des Cosséens, est très arbitraire. Havila et Cusch en particulier sont des noms trop usités dans l’Ancien Testament pour qu’il soit possible de les appliquer à des contrées aussi éloignées et aussi peu connues des Hébreux.
Quant au Phasis, il n’est pas possible d’y penser, puisqu’il prend sa source dans le Caucase. Enfin pour les Hébreux l’Arménie était au septentrion et non pas à l’orient.
Une autre opinion essaie de placer le paradis près de l’embouchure des deux fleuves mésopotamiens dans le golfe Persique. Calvin et plusieurs savants après lui ont vu dans le fleuve unique le Schat-el-Arab et dans les quatre bras (têtes) l’Euphrate et le Tigre, qui se réunissent pour le former, et deux embouchures par lesquelles il se déverse dans le golfe Persique.
Cette manière de voir a été modifiée par un savant moderne (Histoire et géographie des temps primitifs, par Pressel), qui a supposé que l’expression raschim désignait les quatre affluents du Schat-el-Arah. L’auteur, dans sa description, remonterait le cours du fleuve, au lieu de le descendre. En montant le Schat-el-Arab, après avoir traversé l’endroit où était le paradis, on arriverait successivement aux quatre fleuves qui contribuent à le former : l’Euphrate, le Tigre et deux affluents venant des montagnes d’Elam, à l’est, le Kerkha (Ulaï des anciens) et le Kuran. Peut-être vaudrait-il mieux supposer, dans cette hypothèse, que les deux derniers étaient l’Ulaï venant de l’est et un affluent de l’Euphrate venant de l’Arabie centrale dont le lit desséché a été retrouvé depuis peu.
Mais les terrains d’alluvions que traverse le Schat-el-Arab sont de formation assez récente, et jusqu’au temps d’Alexandre le Grand les quatre fleuves avaient encore des embouchures distinctes. Puis le caractère marécageux de ces plaines ne convient guère à l’idée que nous nous faisons du paradis. Enfin il est bien difficile de concilier cette opinion avec le texte biblique, qui suit évidemment le cours du fleuve en le descendant, non en le remontant.
Une autre hypothèse beaucoup plus probable a été récemment présentée et développée par M. Friedrich Delitzsch, dans son ouvrage : Wo lag das Paradies (Où était situé le paradis ?) Ce ne serait pas à la source des deux fleuves, ni à leur embouchure, mais dans leur cours moyen qu’il faudrait placer le paradis. Vers le milieu de la grande plaine qu’ils arrosent du nord-ouest au sud-est, ils se rapprochent à tel point qu’il ne reste plus entre eux qu’un espace de sept à huit lieues.
C’est là qu’est aujourd’hui la ville de Bagdad. Un peu au-dessous se trouvait Babylone. Le pays qui s’étend depuis cette espèce d’isthme jusqu’au sud de Babylone, porte dans les inscriptions assyriennes le nom de Kardounias, jardin du dieu des pays . Les anciens nous en ont laissé des descriptions ravissantes. Des forêts de palmiers bordaient le cours des deux fleuves et les accompagnaient jusqu’à la mer ; le blé y rapportait trois cents pour un ; la vigne et les arbres à fruits de toute nature y foisonnaient.
Un fait digne de remarque, c’est que le nom le plus ancien de Babylone, Tintira , signifie bosquet de la vie . Cette fertilité exceptionnelle était due à tout un système d’irrigation provenant de l’Euphrate, car en cet endroit le lit de ce fleuve est plus élevé que celui du Tigre. Ce serait là qu’aurait été situé le jardin ; et la contrée tout entière (haute et basse Mésopotamie) aurait porté le nom d’Edin , qui en assyrien signifie plaine. Les Hébreux l’auraient changé en Éden , mot qui dans leur langue signifiait délices.
L’Euphrate serait donc le fleuve sortant d’Éden pour arroser le jardin. Quant aux quatre bras, il faudrait les envisager comme étant quatre branches de l’Euphrate lui-même qui se serait divisé en ce point-là, de même que le Nil au commencement du Delta. Le bras le plus considérable est la continuation naturelle du fleuve principal, et garde le nom d’Euphrate. D’entre les trois autres deux seraient les principaux d’entre les nombreux canaux provenant de l’Euphrate dont on trouve des traces dans toute la contrée.
L’un était appelé par les anciens Pallakopas ; il se détachait de l’Euphrate sur sa rive droite (occidentale), un peu au-dessus de Babylone ; il longeait le désert d’Arabie, l’ancienne Havila, et allait se jeter dans le golfe Persique à l’ouest de l’embouchure du Schat-el-Arab. Il est très vraisemblable que ce canal, qui avait les dimensions d’un fleuve navigable, n’a pas été creusé de main d’homme, mais que c’est un bras naturel de l’Euphrate, qui servait à régler l’élévation des eaux de ce fleuve et à mettre ce pays de plaine à l’abri des inondations.
Par sa position, ce cours d’eau répond donc de tous points au Pischon du texte biblique. Il est à remarquer que le nom hébreu Pischon a une grande analogie avec le mot babylonien pisanou , qui désigne dans les inscriptions un réservoir d’eau, et de là un canal. Il serait possible que, de même que le fleuve principal de la Babylonie s’appelait le fleuve (Purat), le canal principal fût nommé tout court le canal (Pisanou).
L’autre canal, qui se détachait de l’Euphrate sur la rive gauche (orientale) et qui devait aussi être un bras naturel de ce fleuve, a reçu des Arabes le nom de Schat-en-Nil. Il arrosait toute la Mésopotamie inférieure (l’ancien Cusch asiatique) et rejoignait l’Euphrate un peu au-dessus des son embouchure. Ce canal aujourd’hui comblé ne peut être que celui qu’on trouve plusieurs fois mentionné dans les inscriptions à côté de l’Euphrate et du Tigre sous le nom de Gouhandi ou Gouhâna , le même mot que l’hébreu Guihon . En effet, la contrée désignée dans les inscriptions comme bassin de ce bras de l’Euphrate est la même que celle que traverse le Schat-en-Nil.
Quant au Tigre, il peut paraître étonnant qu’il soit indiqué comme un bras de l’Euphrate. Mais à un certain point de vue il l’est bien réellement, car il reçoit par des canaux une partie des eaux de l’Euphrate dont le lit, comme nous l’avons vu, est plus élevé que celui du Tigre dans cette région. Depuis ce point le Tigre peut donc être envisagé comme un cours d’eau provenant de l’Euphrate, et le Tigre supérieur comme un affluent de ce Tigre inférieur.
Ajoutons que, il y quelques années, un savant de Prague a cru pouvoir affirmer, en se basant sur des mesures trigonométriques faites sur les lieux, que, dans les temps préhistoriques, l’Euphrate et le Tigre devaient se réunir et former un seul fleuve au-dessus de Bagdad, pour se séparer de nouveau plus bas. Si cette supposition est un jour prouvée, elle rendra plus simple encore la solution du problème.
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